La Belgique n’allant pas en Afrique du Sud pour la Coupe du monde 2010, Solidaire a demandé à l’Afrique du Sud de venir chez nous, en la personne de Chris Matlhako. Le foot n’a toutefois pas été notre sujet de conversation.
En 1994, après une très longue lutte, l’ANC, le Congrès national africain, renvoyait dans les livres d’histoire le régime d’apartheid de l’Afrique du Sud. Auparavant, le noir n’était même pas assez bon pour cirer les chaussures des blancs. Aujourd’hui, cela fait 15 ans que l’ANC est au pouvoir.
Chez nous, l’Afrique du Sud est souvent perçue négativement dans les infos, avec sa criminalité élevée, le sida et les conditions de vie misérables dans les townships. Dépassons cette première impression avec l’interview de Chris Matlhako, responsable international du Parti communiste sud-africain (SACP). Il était invité à la dernière université d’été de l’Institut d’études marxistes (INEM). Le SACP, qui compte presque 100.000 membres, travaille en liaison étroite avec l’ANC.
Comment se fait-il que quinze ans après la fin de l’apartheid, il n’y a toujours pas d’amélioration sensible des conditions de vie de la majorité noire ?
Chris Matlhako. Le 27 avril 1994, l’apartheid et le racisme étaient définitivement supprimés Tous les gens, même les noirs, sont allés voter. Le premier gouvernement de l’ANC a réalisé beaucoup de choses. Il y a eu par exemple un million de nouveaux logements sociaux et des raccordements à l’électricité partout dans les campagnes.
« La richesse en Afrique du Sud est répartie selon la recette de l’Irish Coffee »
L’ANC n’a pas pu sortir de là ?
Sous le président Mbeki de l’ANC, on a opté, selon les recettes du FMI et de la Banque mondiale, pour une politique économique orientée sur l’exportation de matières premières et de produits semi-finis. Cela a fait le jeu de la dépendance vis-à-vis de l’étranger et des multinationales, avec des bénéfices qui vont aux actionnaires de Londres ou de New York.
La politique du nouveau gouvernement se situe sous le signe d’un changement structurel de l’économie afin de mettre un terme à l’emprise des grandes multinationales sur notre société. Les grandes entreprises vont devoir produire selon les besoins fixés dans notre plan national, avec des profits qui iront à la création de nouveaux emplois. Dans les zones rurales, nous voulons créer de l’espace pour la petite industrie de transformation.
D’autre part, le gouvernement prévoit des travaux d’infrastructure. L’exécution de ces travaux doit aller à des entreprises qui créent de l’emploi en Afrique du Sud. Et, au lieu d’importer des matériaux de construction et des technologies, nous devons les produire le plus possible localement.
Depuis 1994, lorsque l’ANC est arrivé au pouvoir, il est question de réforme agraire. Mais jusqu’à présent, c’est resté lettre morte.
Pourquoi, malgré plus de dix ans de politique néolibérale, le SACP a-t-il maintenu une alliance avec l’ANC ?
Une partie de cette thèse concernait l’ANC, qui était à l’époque un mouvement nationaliste plutôt modeste. Notre parti conservait son indépendance, mais faisait tout pour que cette ANC se développe en une grande organisation de masse – reposant sur les syndicats, les organisations paysannes et les travailleurs – qui pourrait mobiliser toute la population noire dans la lutte contre la bourgeoisie blanche et le colonialisme.
Fait remarquable, au contraire de la plupart des partis communistes, le SACP est surtout fort dans les régions rurales.
Après dix ans d’extension et de recrutement, deux tiers de nos 100.000 membres viennent de ces régions. C’est grâce à cette solide implantation que, lors des dernières élections, nous avons contribué pour une bonne part à la victoire de l’ANC.
Lors de l’Université marxiste d’été de l’INEM, le forum sur l’Afrique, avec Chris Matlhako, a été repris sur DVD. De même, le débat sur le Congo avec ColetteBraeckman, journaliste au Soir, et le débat sur le panafricanisme et sur Kwame Nkrumah, avec l’écrivain Mohamed Hassan. Vous pouvez commander chaque débat séparément auprès de l’INEM pour la somme de 5 euros l’unité.Tél. : 02/504 01 52 ou docu(at)marx.be. Voir aussi http://www.marx.be/
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