mercredi 27 août 2008

Afghanistan :: « L’OTAN bombarde les fêtes de mariage mais épargne les champs d’opium »

26 août 2008 12:53
Parti du Travail de Belgique

Le pavot, dont on extrait l’opium, fleurit gaiement dans l’Afghanistan du président pro-OTAN Karzai. C’est ce qu’affirme l’ancien chef américain de la lutte anti-drogue, Thomas Schweiz. Après sa démission, il a enfin pu parler librement du « narco-État afghan ».

Bert de Belder

Julien Le Pahun avait à peine vingt ans et n’en avait plus que pour un mois en Afghanistan. C’était sa première mission à l’étranger. Son père, Joël Le Pahun, a demandé au gouvernement « qu’il cesse d’envoyer des enfants se faire massacrer en Afghanistan ».1 Un sondage réalisé par le CSA et publié dans Le Parisien révèle que 55 % des Français réclament le retour des soldats français déployés en Afghanistan.

Les soldats français en danger avaient demandé un renfort aérien. Dans ce genre de situations, les avions de combat de l’OTAN entrent généralement en action. La plupart du temps, ils se mettent à bombarder et c’est dans le cadre de ces bombardements que sont tuées la plupart des victimes civiles, ce qui explique pourquoi le soutien apporté par la population à l’opposition ne cesse d’augmenter. Pour Antonio Giustozzi (Crisis State Research Centre, London School of Economics) il s’agit là de la principale raison du soutien croissant à la résistance : « La haine que suscite la présence de soldats étrangers dans le pays est exacerbée par les attaques aériennes de la coalition qui souvent tuent des civils innocents ». L’expert afghan, Habibullah Rafi, confirme que les talibans « ont pu regagner la sympathie de la population grâce à ces bombardements qui bien trop souvent font des victimes civiles ».2 Et comme l’a décidé le ministre De Crem, les soldats belges y contribueront eux aussi dès le 1er septembre prochain !

Pavots en pleine floraison

« Nous irons bombarder villages et fêtes de mariage. Mais nous épargnerons les champs d’opium et les barons de la drogue car il s’agit là du domaine de nos partenaires et amis. » C’est en ces termes qu’un lecteur du Standaard a résumé la mission des F-16 belges lorsque le conseil des ministres a annoncé qu’il prolongerait la mission de 6 + 6 mois 3.

Le pavot, dont on extrait l’opium, fleurit gaiement dans l’Afghanistan du président Karzai pro-OTAN. C’est ce qu’affirme l’ancien chef de la lutte anti-drogue américain, Thomas Schweiz. Après sa démission, il a enfin pu parler librement du « narco-état afghan ». Selon lui, la production d’opium en Afghanistan a considérablement augmenté entre 2006 et 2007 et représente actuellement 93 % de la production mondiale d’héroïne.

Le principal coupable serait le président Karzai lui-même, foncièrement corrompu. Au cours de ses deux années de mandat, Schweiz a tenté de rallier ses interlocuteurs afghans à une campagne de destruction des pavots par l’air – sans succès. Pire encore, l’OTAN les laisse faire. Ainsi, en 2006, craignant de s’attirer la colère des habitants de la province du Helmand, des soldats britanniques ont dispersé par avion des avis dans lesquels ils expliquaient qu’ils n’avaient nullement eu l’intention de détruire les champs de pavots au cours de leurs opérations.4

1 AFP, 20/08 •
2 La Croix, 19/08 •
3 De Standaard, 26/07 •
4 New York Times Magazine, 27/07

lundi 25 août 2008

De la chair à canon pour le marché

RÉFLEXIONS DU COMPAÑERO FIDEL

(Traduction ESTI)

Peut-être certains gouvernements ignorent-ils les données concrètes. Voilà pourquoi le message de Raúl fixant la position de Cuba m’a paru très opportun. Je reviens sur des points qu’on ne peut aborder dans une déclaration officielle précise et brève.

Le gouvernement géorgien n’aurait jamais lancé ses forces armées contre la capitale de la République autonome d’Ossétie du Sud, au petit matin du 8 août, pour une opération qu’il a qualifiée de rétablissement de l’ordre constitutionnel, sans une concertation préalable avec Bush qui s’est engagé auprès du président Saakashvili, en avril dernier à Bucarest, à soutenir l’entrée de son pays à l’OTAN, ce qui revient à tenter de planter un couteau affilé dans le cœur de la Russie. De nombreux Etats européens membres de cette organisation militaire s’inquiètent sérieusement de la manipulation irresponsable de la question des nationalités, grosse de conflits potentiels, qui peut donner lieu jusqu’à l’éclatement du Royaume-Uni. C’est par ce biais qu’on a désintégré l’ancienne Yougoslavie : après la mort de Tito, toutes les tentatives pour l’éviter se sont avérées vaines.

A quoi bon allumer la poudrière du Caucase ? Combien de fois la cruche devra-t-elle aller à l’eau avant de se casser ? La Russie reste une forte puissance nucléaire. Elle possède des milliers d’armes de ce genre. Je dois rappeler par ailleurs que l’économie occidentale en a ponctionné illégalement plus de 500 milliards de dollars. Si la Russie ne signifie plus le spectre du communisme, si plus de quatre cents plates-formes de lancement nucléaire ne visent plus directement les objectifs militaires et stratégiques de l’Europe de l’Ouest, puisqu’elles ont été démantelées à la disparition de l’URSS, pourquoi cet entêtement à l’encercler d’un bouclier atomique ? Le vieux continent a aussi besoin de paix.

Les troupes russes stationnées en Ossétie du Sud y étaient dans le cadre d’une mission de paix reconnue à l’échelle internationale. Elles ne tiraient contre personne.

Pourquoi la Géorgie a-t-elle choisi le 8 août, jour de l’inauguration des Jeux olympiques de Beijing, pour occuper Tskhinvali, la capitale de la République autonome ? Ce jour-là, quatre milliards de personne sur toute la planète assistaient à la télévision au merveilleux spectacle par lequel la Chine inaugurait ces jeux. Seule le peuple étasunien n’a pas pu profiter ce jour-là de la transmission en direct de la stimulante fête d’amitié entre tous les peuples du monde qui s’y est déroulée. Une chaîne de télévision avait acheté pour 900 millions de dollars les droits de retransmission exclusifs et souhaitait tirer le maximum de profit commercial de chaque minute de transmission : les chaînes concurrentes ont pris leur revanche en divulguant à cette même heure les images de la guerre du Caucase qui n’étaient de l’exclusivité de personne. Les risques d’un sérieux conflit menaçaient le monde.

Bush, en revanche, a pu profiter du spectacle à titre d’invité officiel. Le dimanche 10, deux jours et demi après, on le voyait encore agiter de petits drapeaux, feignant d’être un porte-parole de la paix et prêt à se réjouir des victoires des magnifiques athlètes étasuniens que ses yeux, habitués à tout souiller, voyaient comme des symboles du pouvoir et de la supériorité de son Empire. Quand il n’avait rien à faire, il maintenait de longues conversations avec les fonctionnaires subordonnées à Washington, menaçait la Russie et encourageait les interventions, humiliantes pour ce pays, de son représentant au Conseil de sécurité des Nations Unies.

Certains des anciens pays qui constituaient le camp socialiste ou faisaient même partie de l’URSS agissent aujourd’hui comme des hommes liges de Washington. Leurs gouvernements, poussés par une haine irresponsable de la Russie, tels ceux de la Pologne et de la République tchèque, s’alignent totalement sur Bush, soutenant l’attaque surprise lancée contre l’Ossétie du Sud par Saakashvili, un aventurier au passé louche qui, né sous le socialisme à Tbilissi, capitale de son pays, est devenu avocat dans une université de Kiev, a fait des hautes études supérieures à Strasbourg, à New York et à Washington. Il exerçait cette profession à New York. Il se présente en Géorgien occidentalisé, ambitieux et opportuniste. Il est rentré dans son pays avec le soutien des Yankees et a pêché dans les eaux troubles de la désintégration de l’Union soviétique. Il a été élu président de la Géorgie en janvier 2004.

Ce pays est, après les USA et la Grande-Bretagne, celui qui a le plus de soldats à participer à l’équipée militaire d’Iraq, et il ne le fait pas précisément par esprit internationaliste. Quand, pendant presque vingt ans, Cuba a dépêché des centaines de milliers de combattants lutter pour l’indépendance et contre le colonialisme et l’apartheid en Afrique, elle n’a pas cherché de carburants, de matières premières ni de plus-value : ses soldats étaient volontaires. C’est ainsi que s’est trempé l’acier de nos principes. Que font les soldats géorgiens en Iraq, sinon appuyer une guerre qui a coûté au peuple de ce pays des centaines de milliers de vies et des millions de sinistrés ? Quels idéaux sont-ils allés y défendre ? Il est tout à fait logique que les Ossétiens du Sud ne souhaitent pas qu’on les envoie se battre comme soldats en Iraq ou d’autres points de la planète au service de l’impérialisme.

Saakashvili n’aurait jamais osé de sa propre initiative dépêcher l’armée géorgienne en Ossétie du Sud où elle se heurterait forcément aux troupes russes déployées là comme force de paix. On ne peut jouer à la guerre nucléaire ni primer la livraison de chair à canon pour le marché.

J’avais déjà écrit ces Réflexions quand Bush a parlé à 17 h 30 (heure de Cuba). Rien de ce qu’il a dit ne dément mes analyses, sauf que la guerre médiatique de l’administration étasunienne est encore plus intense aujourd’hui. C’est la même manœuvre préconçue qui ne dupe personne.

Les Russes ont déclaré en toute clarté que le retrait des envahisseurs à leur point de départ était la seule solution digne possible. Espérons que les Jeux olympiques puissent se poursuivre sans être interrompus par une crise gravissime. La victoire de nos volleyeuses sur une bonne équipe des USA a été phénoménale, et le base-ball n’a pas encore commencé.

Fidel Castro Ruz
Le 11 août 2008
18 h 21

La mutation des politiques québécoises en faveur du développement de marchés privés de la santé

Dans le Devoir du jeudi 21 août 2008

Opinion
Par Marie-Claude Prémont, Professeure de droit à l'ENAP

L'annonce du passage rapide de Philippe Couillard de la tête du ministère de la Santé et des Services sociaux à un fonds d'investissement privé en santé a soulevé cette semaine maints questionnements dans les médias du Québec et d'ailleurs. S'il est toujours vrai qu'on peut présumer de la bonne foi des gens et qu'il est périlleux de spéculer sur leurs intentions, il est, de toute façon, superflu d'en faire ici l'exercice.

La mise à plat de l'orientation donnée aux politiques publiques de santé sous la gouverne de M. Couillard suffit. Il faut aussi déplorer le réflexe répété de taxer d'idéologie ou de radicalisme quiconque s'oppose à une politique de privatisation des soins de santé. L'idéologie a la tonalité de l'accent: c'est toujours l'autre qui en souffre. Quant à l'accusation de radicalisme supposé des opposants à la privatisation, les chiffres internationaux, qui démontrent que le Québec fait déjà la part généreuse au financement privé de la santé, la contredisent nettement.

Les amendements législatifs et réglementaires, poursuivis de façon constante depuis la publication du livre blanc Garantir l'accès, en février 2006, dans la foulée de la décision Chaoulli de la Cour suprême du Canada, révèlent pourtant une direction claire. Elle peut se résumer à la mise en place des premières étapes nécessaires à la création de marchés privés viables et rentables de soins de santé à l'intérieur du régime public québécois.

La loi 33 joue un rôle majeur dans cette nouvelle structuration poursuivie depuis 2005, mais elle n'en est pas le seul outil. La loi permet certes l'ouverture à l'assurance privée duplicative, pour l'heure limitée à trois chirurgies -- celles du genou, de la hanche et de la cataracte --, mais elle fournit surtout les outils de l'expansion de différents marchés privés de la santé, y compris ceux qui pourront bénéficier de fonds publics et qui se confirment déjà. La panoplie des actes chirurgicaux autorisés dans les Centres médicaux spécialisés, sortes d'hôpitaux (avec ou sans hébergement) de capital privé à but lucratif, vient soudainement de passer des trois actes cités plus haut à une ouverture quasi illimitée à tous les actes chirurgicaux.

En effet, deux jours avant que les médias ne nous apprennent que M. Couillard s'apprêtait à quitter son poste, il a adopté le 18 juin 2008 un décret concernant le règlement qui lève presque toute limite et vise à permettre aux centres médicaux spécialisés de pratiquer tous les actes chirurgicaux. Le règlement, publié au coeur de l'été, le 9 juillet dernier, entrera en vigueur 180 jours plus tard. Il relègue aux oubliettes la limite des trois actes prévus à la loi. Il faut d'ailleurs s'étonner d'un tel usage du pouvoir réglementaire face à sa disposition habilitante.

L'adoption de la loi 33, en décembre 2006, prévoit aussi que les investisseurs peuvent détenir 50 % moins une des actions de ces hôpitaux privés. Par la suite, soit le 21 février 2007, le jour même du déclenchement des élections québécoises pour le 26 mars 2007, on s'est empressé d'adopter le décret d'adoption d'un règlement qui établit la règle générale autorisant les médecins à s'incorporer, entré en vigueur le 22 mars 2007, à temps pour l'entrée en vigueur, le 1er janvier 2008, de toutes les dispositions de la loi 33. Ce n'est pas tant que la portion du privé est en croissance qu'elle est en train de se métamorphoser et de changer de nature. Ce seront dorénavant les politiques publiques de financement des soins de santé qui devront s'ajuster aux besoins et aux demandes des investisseurs, et non l'inverse.

À l'occasion de l'ouverture officielle de RocklandMD et de la négociation et de la conclusion d'une entente avec l'Hôpital du Sacré-Coeur, le ministre Couillard a eu l'occasion de répéter devant les médias son appui indéfectible au modèle de transfert de chirurgies auprès des nouvelles entités à capital privé.

L'implantation et la croissance des marchés privés à même le réseau public nécessitera certes de franchir d'autres étapes que celles déjà accomplies. Mais le chemin semble bien tracé puisque, outre les mesures évoquées plus haut, la distinction théorique entre le financement privé et la prestation privée fait déjà l'objet de vases communicants grâce à la garantie d'accès qui attend son heure pour se développer.

Et surtout, les autres étapes sont connues et déjà tracées dans le rapport Castonguay, rendu public en février dernier. Le vibrant plaidoyer en faveur de la pratique médicale hybride, l'introduction des mécanismes de financement à l'activité pour appuyer la transformation des agences de santé en acheteurs de services auprès de fournisseurs privés et publics mis en concurrence, le transfert de la gestion des hôpitaux et des CHSLD à des entreprises privées ainsi que la pleine ouverture à l'assurance privée duplicative forment un carnet de commande destiné à poursuivre de façon déterminée la transformation du réseau public de soins de façon à favoriser les «occasions d'investissement intéressantes», pour reprendre ici les termes du communiqué de presse du 18 août 2008 de PCP, le nouvel employeur de M. Couillard.

Quand, pourquoi et comment l'Otan a commencé à s'intéresser à la Géorgie...

Michel Collon

Dans le livre Monopoly - l'Otan à la conquête du monde, publié en janvier 2000, au lendemain de la guerre contre la Yougoslavie, nous avions analysé pourquoi les Etats-Unis, à travers l'Otan étaient si intéressés au Caucase et spécialement à la Géorgie...

Caucase: l’autre guerre du pétrole se prépare
Janvier 2000
Qui veut diriger le monde doit contrôler le pétrole. Tout le pétrole. Où qu’il soit. Ce principe, souligné dans notre livre Poker menteur (1998) n’a fait que se confirmer depuis. Prendre le contrôle absolu du pétrole — et du gaz — du Caucase et d’Asie centrale est devenu une priorité fondamentale dans la stratégie des Etats-Unis et de l’OTAN.
La preuve? Un secrétaire d’Etat adjoint aux Affaires étrangères ne s’occupe que du Caucase. Et le gouvernement américain a instauré un groupe de travail interdépartemental uniquement consacré à l’énergie de la Mer Caspienne. Ce groupe est présidé par le National Security Council (organe suprême de la politique étrangère US). Il se réunit chaque mois, voire chaque semaine. Commentaire de Glen Howard, spécialiste de l’Eurasie et consultant des principales firmes pétrolières US aussi bien que d’organismes gouvernementaux: «Ces dernières années, aucune région pétrolière du monde n’a bénéficié d’autant d’attention à ce haut niveau.»11
Et comment le même Howard s’y prend-il pour faire comprendre l’importance stratégique de la région? «Deux fois déjà dans ce siècle, les stratèges de l’étatmajor général allemand ont préparé l’occupation des champs pétroliers de Bakou. En 1918, l’Allemagne et son allié, l’empire ottoman, ont coordonné une attaque victorieuse qui leur a permis de les occuper. Vingt-cinq ans plus tard, les stratèges allemands ont, à la demande d’Hitler, essayé de s’emparer du pétrole de la Caspienne pour contrôler le coeur pétrolier de l’Union soviétique.»12 Rassurantes références historiques! Et voici qu’en février 1997, une visite solennelle de Javier Solana démontre que l’OTAN aussi s’intéresse énormément à cette région stratégique: «C’est ma première visite, mais pas ma dernière», déclare à Bakou le secrétaire général de l’Alliance.
Des projets planétaires
D’où vient cette passion irrésistible pour le Caucase? De ce que les multinationales occidentales y voient la source de profits considérables. Les contrats signés avec le seul Azerbäidjan dépassent déjà 30 milliards de dollars. Un point intrigue cependant: les réserves de pétrole ne manquent pas dans le monde. Et celui du Caucase est souvent plus cher à exploiter que celui du Moyen- Orient. Alors?
«Diversifier l’énergie par rapport au Moyen-Orient est crucial pour la sécurité d’approvisionnement des alliés de l’OTAN,» explique Howard. «La tension prolongée avec Saddam Hussein a eu une influence importante (…) Pratiquement tous les membres de l’OTAN demeurent largement dépendants du Moyen-Orient: pour 55% actuellement, plus de 60% vers 2010 et 75% vers 2015. L’Union Européenne a adopté un plan incorporant le Caucase dans sa stratégie énergétique.»13 Notons en passant que l’Occident craint sérieusement une révolte des peuples arabes qui mettraient en cause sa domination et réclameraient un juste prix pour leur pétrole.
L’administration Clinton a fait sien le projet dit «Eurasian Transport Corridor». Celui-ci comprendrait tout un système de pipelines depuis l’Asie centrale jusqu’à la Méditerranée (au port turc de Ceyhan). En passant par le Caucase ou plus exactement par l’Azerbaïdjan.
Mais l’enjeu est même planétaire. De ces gisements de Tengiz et de la Mer Caspienne, peuvent partir trois routes. 1. Vers l’Ouest, c’est-à-dire vers l’Europe. 2. Vers le Sud, c’est-à-dire vers le Golfe Persique (via l’Iran) ou vers l’Océan Indien (via l’Afghanistan et le Pakistan). 3. Vers l’Est, c’est-à-dire vers la Chine et le Japon. Un projet japonais envisage, malgré l’énorme coût: «un pont terrestre eurasien qui relierait Rotterdam à Tokyo. D’énormes ressources énergétiques gisent sous la Caspienne et l’Asie centrale. (…) Avec ces pipelines, la structure énergétique de la Chine (75% de charbon) pourrait changer plus vite. Si le Japon peut importer pétrole et gaz naturel de la Caspienne, d’Asie centrale et du Xingjiang chinois par des pipelines traversant la Chine, il pourra réduire sa dépendance vis-à-vis du Moyen- Orient et des USA. Le pont terrestre comporterait également une route pour transporter les céréales d’Asie centrale, de Russie et de Chine vers le Japon. Combiné avec un port (japonais) accueillant les cérales d’Amérique du Nord et du Sud, l’approvisionnement en céréales provenant des principaux producteurs mondiaux serait garanti.»14 Le Japon est particulièrement handicapé par son énorme dépendance pétrolière et céréalière15.
Aujourd’hui, les stratèges américains assurent que leurs intentions sont bien plus pures que celles d’Hitler. «La visite historique de Solana reconnaît l’émergence du Caucase comme une composante décisive des plans de sécurité américains et européens dans un carrefour énergétique crucial de l’Eurasie.», écrit Howard. On parle seulement de «protéger les intérêts vitaux des Etats-Unis». «Intérêts vitaux»? «Sécurité d’approvisionnement»? Mais ce sont exactement les termes invoqués en 1991 par George Bush pour attaquer l’Irak. C’étaient aussi, d’ailleurs, les termes employés par Hitler, mais il serait malvenu de le signaler…
(…)
L’OTAN veut absolument dominer la région et en chasser Moscou. Quel argument utilisera- t-elle pour y arriver? Le prétexte des minorités nationales opprimées, par exemple en Tchétchénie? Ou bien celui de la sécurité d’approvisionnement en pétrole du monde dit libre? Ou encore le danger de laisser entre des mains hostiles les armes nucléaires ou l’uranium? Il est trop tôt pour le dire, et ce n’est pas le vrai débat. Washington prétend s’installer là pour mettre fin aux haines ethniques et nationales. Pourtant, les grandes puissances n’ont jamais hésité à exciter les pires extrémistes pour prendre le contrôle de l’ex-Yougoslavie. Et Zbigniew Brzezinski a reconnu (voir page 126) avoir financé de tels extrémistes pour faire éclater l’URSS. Bref, les proclamations morales font seulement partie de la propagande à destination du public.
Rédigé avant la guerre de 99 contre la Yougoslavie, l’ouvrage des stratèges américains Nato after enlargement se conclut sur ces phrases peu rassurantes: «Caucase et Asie centrale pourraient devenir le véritable terrain pour inaugurer des opérations OTAN “out of area” (hors de sa zone). La région pose des problèmes plus importants que les complications liées aux opérations en ex-Yougoslavie. Un conflit en Europe orientale ou centrale poserait des problèmes à l’OTAN, mais au moins il impliquerait des acteurs bien connus: les pays de l’ex-Pacte de Varsovie. En Asie centrale et dans le Caucase, ce n’est pas le cas. Ici, les acteurs probablement impliqués seraient la Chine, l’Iran et l’Inde, ainsi que la Russie.»24
Bref, une guerre dont les implications pourraient être extrêmement larges. Nous voilà avertis.
Outre l’Azerbaïdjan, un autre pays caucasien joue un rôle-clé dans les manoeuvres de Washington: la Géorgie. Rien qu’en 1998, 130 activités militaires ont été prévues dans la coopération OTAN-Géorgie. Et le président géorgien Chevarnadze (en tant que ministre soviétique des Affaires étrangères, il aida Washington à enterrer l’URSS), réclame tous les quinze jours l’adhésion de son pays à l’OTAN. Géorgie et Azerbaïdjan sont au coeur d’une alliance économique, mais de plus en plus militaire, qui regroupe aussi deux autres protégés des USA, l’Ukraine et la Moldavie. Baptisée GUAM, elle a déjà créé un bataillon commun, dénommé Eurasia, qui pourra être chargé de missions «de paix’ dans la région.
Deux prétextes d’intervention
Azerbaïdjan et Géorgie disposent tous deux d’un «problème ethnique» qui pourrait — le jour où ce serait jugé utile par leurs maîtres — permettre de lancer un scénario à la yougoslave. Certes, nous l’avons vu, Washington estime qu’il est encore trop tôt pour pousser à fond l’offensive contre Moscou. Mais déjà on jette de l’huile sur le feu, préparant les prétextes d’une future intervention de l’OTAN dans la région. Par exemple, l’expert américain Glen Howard: «Les deux plus importants conflits régionaux non résolus du Caucase — l’Abkha- zie et le Nagorny-Karabakh — demeurent bloqués car l’Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe (OSCE) est incapable d’arranger un accord. Frustrés par cette absence de progrès des conversations OSCE menées par les Européens, aussi bien l’Azerbaïdjan que la Géorgie appellent de plus en plus nettement l’OTAN à s’engager d’une certaine façon dans la région.»21 L’appel vient-il vraiment de Tbilisi et de Bakou, ou bien de Washington?
C’est à propos de la Yougoslavie qu’on avait commencé à entendre ces couplets sur l’impuissance de l’ONU ou de l’OSCE et sur la supériorité de l’OTAN. Les voici qui ressortent à propos du Caucase, et le même Glen Howard écrit en 1997: «Selon les responsables azerbaïdjanais, l’OTAN a une grande compétence pour résoudre le conflit des Balkans après le succès de son opération de maintien de la paix en Bosnie. Face aux deux milliards de dollars du budget OTAN, les 100 millions du budget OSCE ne font pas le poids.»
Le président géorgien Chevarnadze reprend lui aussi un refrain entendu: «Si nous ne pouvons obtenir de résultats à la table de négociation, alors nous serons forcés de songer à l’usage de la force comme cela s’est passé en Bosnie.»22 Depuis la guerre du Kosovo, ce refrain a été chanté encore un ton plus haut. Le 17 mai 99, en pleine guerre contre le peuple yougoslave, Chevarnadze, fidèle agent des USA, titrait un article paru dans la presse occidentale «Pour un monde de paix, l’ONU ne suffit plus».23 En Yougoslavie aussi, il s’est écoulé quelques années de préparation psychologique de l’opinion et de pressions sur la Yougoslavie avant que l’OTAN écarte l’ONU et passe à l’action ouverte. L’OTAN veut absolument dominer la région et en chasser Moscou. Quel argument utilisera- t-elle pour y arriver? Le prétexte des minorités nationales opprimées, par exemple en Tchétchénie? Ou bien celui de la sécurité d’approvisionnement en pétrole du monde dit libre? Ou encore le danger de laisser entre des mains hostiles les armes nucléaires ou l’uranium? Il est trop tôt pour le dire, et ce n’est pas le vrai débat. Washington prétend s’installer là pour mettre fin aux haines ethniques et nationales. Pourtant, les grandes puissances n’ont jamais hésité à exciter les pires extrémistes pour prendre le contrôle de l’ex-Yougoslavie. Et Zbigniew Brzezinski a reconnu (voir page 126) avoir financé de tels extrémistes pour faire éclater l’URSS. Bref, les proclamations morales font seulement partie de la propagande à destination du public.
Rédigé avant la guerre de 99 contre la Yougoslavie, l’ouvrage des stratèges américains Nato after enlargement se conclut sur ces phrases peu rassurantes: «Caucase et Asie centrale pourraient devenir le véritable terrain pour inaugurer des opérations OTAN “out of area” (hors de sa zone). La région pose des problèmes plus importants que les complications liées aux opérations en ex-Yougoslavie. Un conflit en Europe orientale ou centrale poserait des problèmes à l’OTAN, mais au moins il impliquerait des acteurs bien connus: les pays de l’ex-Pacte de Varsovie. En Asie centrale et dans le Caucase, ce n’est pas le cas. Ici, les acteurs probablement impliqués seraient la Chine, l’Iran et l’Inde, ainsi que la Russie.»24 Bref, une guerre dont les implications pourraient être extrêmement larges. Nous voilà avertis.
11 Glen Howard, Nato and the Caucasus, the Caspian Axis, US Army War College, Washington, 1998, p. 162.
12 Idem, pp. 151-152.
13 Idem, p. 156.
14 Nikkei Weekly, 17 mai 99.
15 Michel Collon, Poker menteur, EPO, Bruxelles, 1998, p. 126.
16 Rosemarie Forsythe, The Politics of Oil in the Caucasus and Central Asia, Adelphi, Oxford, 1997, p. 61.
17 Nato after enlargement, pp. 106-107.
18 Nato after enlargment, p. 174.
19 Washington Times, 9 janvier 98.
20 Bulletin de la Générale de Banque, juin 99.
21 Nato after enlargement, p. 198.
22 Reuters, 1er février 98.
23 La Repubblica, 17 mai 99.
24 Nato after enlargement, p. 231.
25 Corriere Economia, 14 décembre

Sur l'agression des États-Unis et de l'OTAN dans le Caucase

Le conflit armé meurtrier déclenché dans le Caucase est non seulement une catastrophe humanitaire, qui a déjà coûté la vie à environ 2000 personnes, mais aussi une menace très réelle d'éclatement de guerres plus étendues dans la région. Les préparatifs et les agressions militaires menés par l'impérialisme en Géorgie sont des étincelles qui pourraient finir par déclencher une guerre beaucoup plus vaste. Ils exigent la plus ferme condamnation de la part du mouvement syndical international, ainsi que de toutes les forces de paix et des forces anti-impérialistes.

Sans l'entrave que constituait le puissant bloc de pays socialistes, les pays impérialistes, placés sous la direction des États-Unis au sein de l'alliance militaire qu'est l'OTAN, utilisent la Géorgie pour préparer de futures agressions, violant ainsi les principes fondamentaux du droit international, entre autres ceux de la Charte des Nations Unies.

Le Parti communiste du Canada dénonce l'invasion géorgienne perpétrée le 7 août, et les bombardements aériens de zones résidentielles, d'hôpitaux et d'écoles de Tskhinvali, capitale de l'Ossétie du Sud, comme étant une agression ne répondant à aucune provocation, qui a plongé le Caucase dans la guerre. Nous appuyons pleinement les appels lancés par de nombreux pays en vue du retrait total des forces géorgiennes de l'Ossétie du Sud, mesure qui constituerait le premier pas vers une solution pacifique de ce conflit, qui ne devrait pas être autorisé pour éviter qu'il ne se développe au point de devenir une confrontation généralisée au Moyen-Orient et en Asie centrale.

Nous constatons également, contrairement aux déclarations des médias occidentaux et du régime Bush, qu'il ne s'agit pas d'une "agression russe". La source des tensions croissantes survenant dans le Caucase n'est pas la présence de troupes russes. Celles-ci étaient entrées en Ossétie du Sud au début des années 1990, en tant que gardiens de la paix, après la tentative par la Géorgie d'annexer par la force la région, ce qui avait conduit une grande partie de la population à traverser la frontière pour se rendre en Ossétie du Nord, qui continue de faire partie de la Russie.
La véritable cause de ce conflit réside dans l'expansionnisme des politiques impérialistes des États-Unis et de l'OTAN. Depuis des décennies, en commençant par la guerre froide, les États-Unis ont cherché à encercler militairement leur rival, l'Union soviétique, à affaiblir ses alliés et, plus tard, la Russie elle-même, en mettant en place des régimes soi-disant "pro-occidentaux", qui permettent l'établissement de bases états-uniennes sur leur territoire et dépendent fortement de la coopération et de l'aide militaires des États-Unis. La Russie, se souvenant de l'invasion nazie, qui a coûté au pays plus d'une vingtaine de millions de vies, s'oppose fermement à un tel encerclement impérialiste.

C'est le cas de la Géorgie, devenue cliente des États-Unis au moment de la guerre illégale menée par l'OTAN contre la Yougoslavie en 1999. Israël, principal allié des États-Unis dans la région, a également établi des liens politiques et économiques étroits avec le gouvernement géorgien. Il semble évident, en raison du niveau élevé d'intégration militaire entre les États-Unis, l'OTAN, Israël et la Géorgie, que l'agression du 7 août était déjà connue à l'avance et avait été approuvée par les gouvernements Bush et Olmert. Ce point de vue semble être confirmé par la décision prise le 9 août par les États-Unis de fournir des avions de transport militaire afin de dépêcher une importante partie du contingent de 2000 soldats géorgiens postés en Irak et de les envoyer combattre dans leur pays.
L'offensive impérialiste visant le pillage du pétrole et des autres ressources vitales constitue un facteur-clé de la déstabilisation de la région. En particulier le pipeline BTC (Bakou-Tbilissi-Ceyhan) permet le transport de pétrole et de gaz à travers la Géorgie vers la Méditerranée orientale, dont une grande partie du pétrole importé de l'Azerbaïdjan par Israël. Contrôlé par la British Petroleum et construit avec l'aide des États-Unis, le pipeline BTC est un élément essentiel du bloc militaire et politique constitué par l'Azerbaïdjan, la Géorgie, la Turquie et Israël, jugé indispensable par les États-Unis pour contrebalancer l'influence de la Russie et la Chine dans la région.

Tenant compte de la guerre menée par les États-Unis et le Royaume Uni contre l'Iraq et des efforts continuels déployés par les forces d'occupation pour remettre les vastes richesses pétrolières de l'Irak aux sociétés transnationales, personne ne devrait sous-estimer la volonté de la clique d'extrême droite qui gravite autour de Bush, de Cheney et des autres faucons républicains d'utiliser les événements du Moyen-Orient et de Asie centrale pour accroître cette offensive stratégique. Dans ce contexte, l'agression de la Géorgie contre l'Ossétie du Sud, qui a rapidement dû faire face à une puissante résistance russe, semble avoir été une provocation visant à créer de meilleures conditions pour l'expansion de la présence militaire des États-Unis et de l'OTAN dans la région.

La guerre du Caucase pourrait également influer sur les élections présidentielles états-uniennes, en augmentant l'appui des électeurs au candidat républicain John McCain. Ces événements visent, sans l'ombre d'un doute, à préparer le terrain en vue d'une attaque des États-Unis contre l'Iran, et, à long terme, de la saisie impérialiste des réserves de pétrole de ce pays. Une telle attaque pourrait déclencher une guerre aux dimensions imprévisibles, au coût de millions de vies, et pourrait s'étendre bien au-delà des frontières du Moyen-Orient.

Engagé dans la poursuite de l'hégémonie mondiale, l'impérialisme joue avec le feu, et l'agression récente perpétrée par la Géorgie fait partie de ce vaste plan. Le Parti communiste du Canada demande instamment un plein appui aux tentatives internationales de circonscrire et d'éteindre ce conflit et de mettre fin à toutes les tentatives impérialistes d'ingérence dans le Caucase.

Déclaration émise par le Comité exécutif central du
Parti communiste du Canada
Le 14 août 2008

jeudi 14 août 2008

Beijing 2008: regard alternatif sur les Jeux Olympiques

Rarement les JO ont suscité autant de discussion. Le monde découvre la Chine nouvelle. Un pays complexe, malaisé à comprendre. Solidaire vous propose un regard dégagé de tout simplisme et de toute partialité.
Tony Busselen
Parti du Travail de Belgique, http://www.ptb.be/fr
« Ils nous en ont mis plein les Jeux », titrait La Dernière Heure à propos de la cérémonie d’ouverture des Jeux le 8 août. Quatre heures d’un spectacle total qui a montré la riche histoire de la Chine et son importante contribution au développement de l’humanité. « Il n’y avait absolument rien de militaire, de rigide, d’étroit. On a assisté à une espèce de fête qui, pour avoir été extrêmement bien réglée, gardait quelque chose de joyeux, de spontané, de fluide », dit Jacques Delcuvellerie, l’un des meilleurs metteurs en scène et hommes de théâtre belges. « Très intéressant aussi, le mélange de la tradition et de l’art contemporain. »
Cette cérémonie ne change naturellement rien à toutes les objections soulevées ces dernières semaines à propos de la Chine. Mais Delcuvellerie est toutefois critique à l’égard de l’image du pays telle que l’ont esquissée un grand nombre de nos médias : « Personnellement, je suis outré par la manière dont on n’a cessé de nous dépeindre la Chine depuis plusieurs mois, en insistant toujours sur ce qui ne va pas – et il y a des choses qui ne vont pas (…). Mais on ne dit pas d’où vient la Chine, on ne rappelle pas quelle était sa situation, il y a cent ou cinquante ans. Comme c’est étonnant de constater que, brusquement, la fracture sociale nous scandalise en Chine, mais pas au Koweït ou aux Etats-Unis ! »
De même, une journaliste du Morgen, qui ne passe pas habituellement pour une partisane du socialisme à la chinoise, s’est irritée des commentaires de certains rapporteurs qui décrivaient la Chine comme un pays arriéré. « L’éducation primaire gratuite a été introduite en 1950 déjà. Comment expliquer autrement que plus de neuf Chinois sur dix savent lire et écrire ? Et selon l’étude que l’on consulte il n’y a plus que de 90 à 220 millions de personnes qui vivent sous le seuil de pauvreté, et non pas les trois quarts de la population. Mais pourquoi est-il toujours si malaisé d’admettre que la Chine est parfois en mesure de faire des choses devant lesquelles nous, Occidentaux, ne pouvons rester que bouche bée ? »
Çà et là, on commence à nous mettre en garde contre la partialité des informations européennes. De Standaard, par exemple, a publié un billet d’humeur intitulé « L’Europe se berce d’illusions » de Jacob De Roover (université de Gand). « Imaginez un genre (journalistique) qui ne cesse de répéter que l’Europe et les USA prospèrent peut-être économiquement, mais ils sont également confrontés aux problèmes x, y et z ; les classes dirigeantes ne s’emploient pas assez à résoudre ces problèmes ; et les gouvernements s’irritent quand on leur tape sur les doigts. De tels articles ne seraient pas vraiment populaires et seraient même passablement ennuyeux. » Comment se fait-il alors que de tels articles aient tant de succès quand il s’agit d’un pays comme la Chine. À cela, l’auteur répond : « Répéter sans cesse que la croissance de la Chine va de pair avec toutes sortes de problèmes nous donne un faux sentiment de sécurité : nous ne devons pas nous en faire, nos sociétés sont quand même plus justes et meilleures. (…) Jusqu’il y a peu, il semble que ce sentiment trouvait sa confirmation dans la situation socio-économique et géopolitique du monde. Mais le “boum” de la Chine a changé les choses. C’est angoissant. Le nouveau genre journalistique semble vouloir atténuer cette crainte : tout est en ordre ; l’Europe est toujours mieux aujourd’hui. »

Alerte rouge dans le Caucase, que cherchent les Etats-Unis ? (*)

Le vendredi 8 août, la guerre a éclaté entre la Géorgie ( le Caucase du Nord ) et la republique autonome d’Ossétie du Sud appuyée par la Russie. La capitale autonome de l’Ossétie, Tskhinvali a été bombardé. Il y aurait eu 1 400 morts, en majorité des civils, selon l’agence de presse russe Interfax, qui cite le chef des séparatistes ossètes, Edouard Kokoity.
Danielle Bleitrach
La capitale ossète, Tskhinvali, a été investie par la Géorgie qui a prétendu venir mater les “tendances séparatistes”. On compte de nombreuses victimes, mais les communiqués venus des deux camps sont contradictoires. Un porte-parole de l’Agence des Nations unies pour les réfugiés en Ossétie du Sud a aussi indiqué que de nombreux immeubles et maisons avaient été détruits dans le combat.
La Russie n’a pas tardé à réagir, d’autant que des tirs géorgiens avaient tué dix soldats russes dans une caserne de la force de maintien de la paix, à Tskhinvali. Cent cinquante chars et véhicules blindés russes sont entrés en Ossétie du Sud, alors que, à Moscou, se tenait un conseil de sécurité sous la présidence de Medvedev. La Géorgie a fait état du bombardement de sa base aérienne de Vaziani, à 25 km de Tbilissi, par l’aviation russe.
En occident, on présente l’Ossétie comme ayant choisi le séparatisme, mais c’est oublier qu’à l’époque de l’URSS, l’Ossétie du Sud avait le statut de “région autonome” au sein de la RSS de Géorgie, qu’elle est peuplée par une population qui a souvent le double passeport et qu’elle est proche de l’Ossétie du Nord qui est restée russe.
En 1991, elle a proclamé son indépendance envers Tbilissi après la suppression de son autonomie par le premier président géorgien Zviad Gamsakhourdia. Tbilissi a perdu le contrôle du territoire sud-Ossète en 1992 à la suite d’un conflit meurtrier. La paix dans la zone du conflit osséto-géorgien est actuellement maintenue par un contingent composé de trois bataillons (russe, géorgien et ossète), fort de 500 hommes chacun comme soldats de la paix. Dans son attaque de l’Ossétie la Géorgie a tué des soldats russes chargés de maintenir la paix.
La Géorgie est devenue la marionnette des Etats-Unis
Dans ce conflit nous sommes devant le résultat du dépeçage de l’ex-URSS, dépeçage organisé par les Etats-Unis en particulier par le milliardaire Soros, homme de la CIA, qui a entretenu une masse d’ONG provoquant des guerres civiles, des mouvements sociaux en profitant de la débandade des institutions et des pouvoirs. Le tout sur la décomposition de l’ancien appareil d’Etat soviétique et la ruée des apparatchiks vers l’appropriation privée des ressources nationales.
Georges Soros, le milliardaire américain a soutenu financièrement les mouvements étudiants géorgiens et le parti de Saakachvili. il a financé la carrière politique de Saakachvili depuis le début. Son influence continue aujourd’hui à être grande sur le nouveau gouvernement géorgien. Des ministres de l’actuel gouvernement sont des anciens collaborateurs du financier américain au sein de sa fondation. Un certain nombre de jeunes conseillers de Saakachvili ont également été formés aux Etats-Unis dans le cadre des échanges universitaires mis en place et gérés par la Fondation privée de Soros. Le gouvernement américain, quant à lui, a doublé son aide économique bilatérale à la Géorgie depuis la révolution. Cette aide annuelle atteint donc aujourd’hui 185 millions de dollars. De plus, la Maison-Blanche est engagée dans un programme de formation des forces spéciales de l’armée géorgienne dans le cadre de la lutte contre le terrorisme islamiste dans la région avec l’aide d’Israël. Les Etats-Unis ont également débloqué de l’argent pour régler la facture énergétique de la Géorgie au lendemain de la révolution de novembre 2003. Il est évident que Soros qui y trouve ses propres intérêts financiers a joué en lien étroit avec la CIA un rôle dans la main mise directe des Etats-Unis sur cette zone stratégique d’abord sur un plan énergétique mais pas seulement. (1)
C’est un scénario que l’on a vu s’appliquer dans bien d’autres endroits, cette “balkanisation”, vassalisation est partout y compris en Amérique latine, en Asie, comme en Europe, le moyen d’asseoir la puissance étasunienne face à des pays rebelles. Aujourd’hui c’est l’avancée de l’OTAN, l’installation de missiles dirigés contre l’Iran mais en fait contre la Russie. Mais pourquoi envahir l’Ossétie indépendante de fait depuis de nombreuses années? S’agit-il de créer une situation irréversible avant le départ de l’actuel hôte de la maison Blanche? Si l’influence de Soros reste déterminante s’agit-il au contraire de jouer la carte dessinée par Obama du renforcement de l’intervention vers l’Afghanistan et vers une zone irano-orientale ?
Pourtant récemment Condolezza Rice était à Tiblissi et on imagine mal que l’opération se soit faite sans son aval. Sous l’influence de Washington, qui souhaite l’intégration de la Géorgie dans l’OTAN .
Depuis la Géorgie est totalement vassalisée aux Etats-Unis et d’un point de vue militaire très liée à Israël. il est donc peu probable que la Géorgie ait lancé l’assaut sur l’Ossétie, tué dans leur caserne des soldats russes du contingent de la paix, sans l’accord des Etats-Unis.
Dans un premier temps la Géorgie, puissamment armée et entraînée par Israël a contesté l’organe chargé de régler le conflit - la Commission mixte de contrôle est coprésidée par la Russie, la Géorgie, l’Ossétie du Nord et l’Ossétie du Sud. Et a suivi le 7 août, l’attaque contre l’Ossétie, le bombardement de sa capitale, les populations civiles qui fuient, on parle d’un désastre humanitaire et c’est enfin l’affrontement direct avec les forces russes.
Une attaque contre l’Ossétie mais aussi contre la Russie
Aujourd’hui les dirigeants politiques géorgiens prétendent mener une opération de pacification. Tbilissi se dit prêt à arrêter le bain de sang si Tskhinvali [capitale sud-ossète] accepte une négociation directe [sans médiation russe], ce qui signifierait une capitulation des ossètes. Tbilissi promet par ailleurs d’octroyer à la république “une large autonomie au sein de la Géorgie et une aide humanitaire de 35 millions de dollars pour la reconstruction.” Le Premier ministre géorgien Vladimir Gourguénidzé a également proposé “une amnistie juridico-politique pour tous les hauts fonctionnaires de la république autoproclamée” tout en réitérant la volonté de Tbilissi de “poursuivre [l'action militaire] jusqu’au rétablissement de l’ordre“.
Dans son allocution à la nation, citée par l’agence d’information géorgienne Akhali Ambebi Sakartvelo, le président géorgien Mikhaïl Saakachvili a annoncé que dans la matinée du 8 août, “la majeure partie de l’Ossétie du Sud était libérée et contrôlée par les forces gouvernementales géorgiennes”. Il a ensuite accusé Moscou d’avoir envoyé des bombardiers SU-24 frapper les alentours de la ville géorgienne de Gori [à une cinquantaine de kilomètres de Tskhinvali] et les régions de Kareli et de Variani. Information catégoriquement démentie par la Russie : “C’est du délire, une énième provocation nauséabonde de Tbilissi”, a rétorqué un haut fonctionnaire du ministère des Affaires étrangères russe, cité par Izvestia.
Le même jour ce “délire” sur le bombardement de Gori était relayé par toutes les agences de presse occidentales qui faisaient avec une belle unanimité de la Russie l’agresseur.
Le premier dirigeant russe à avoir réagi à l’escalade de la violence a été le chef du gouvernement Vladimir Poutine. Depuis Pékin, il a regretté le non-respect par la Géorgie de la trêve olympique et a promis “une riposte à l’agression géorgienne“, rapporte le quotidien en ligne russe Vzgliad. L’agence russe Ria Novosti fait état des propos de Wladimir Poutine auprès de Bush affirmant que les peuples russes en particulier ceux du Caucase n’accepteront une telle agression contre leurs compatriotes. Bush parait avoir manifesté de l’embarras. Pour sa part, le président russe Dimitri Medvedev a promis de protéger la population civile ossète dont la majorité possède un passeport russe, informe Vzgliad. “Nous n’accepterons pas la mort impunie de nos concitoyens où qu’ils se trouvent“, a-t-il martelé. Selon Vzgliad, le jour même des troupes et des blindés russes franchissaient la frontière russo-géorgienne et se dirigeraient vers Tskhinvali.
Les Etats-Unis par la bouche de Condoleezza Rice ont réclamé la fin de combat alors que la vraie question est leur implication dans l’assaut. Quant à la communauté internationale, l’OTAN, l’ONU et le Conseil de l’Europe ont appelé les parties à cesser le feu et à s’asseoir autour de la table des négociations. A l’heure actuelle, la pacification semble toutefois être un vœu pieux.
Le Caucase s’embrase ?
La fièvre monte du côté russe, en particulier dans le Caucase, l’agence de presse Ria novosti nous apprend que “les Cosaques ont lancé la formation de bataillons de volontaires pour faire face à une éventuelle aggravation de la situation en Ossétie du Sud, a annoncé mardi aux journalistes le chef (ataman) de la Troupe des Cosaques du Don, Viktor Vodolatski.
“Ces bataillons sont prêts à aller dès demain en Ossétie du Sud”, a indiqué l’ataman. Selon lui, les bataillons sont formés de Cosaques qui ont servi dans l’armée. “Nous voulons que les meilleurs Cosaques qui défendront l’Ossétie du Sud et la Russie en fassent partie”, a souligné l’ataman.Selon les responsables sud-ossètes, si la Géorgie déclenche une guerre contre la république autoproclamée, on fera appel à ces bataillons. “Dans ce cas-là, les Cosaques auront le statut de militaires sud-ossètes”, a précisé Anatoli Barankevitch, secrétaire du Conseil de sécurité de la république. Ces deniers jours, a-t-il poursuivi, la Géorgie a multiplié ses provocations, “tuant, lors de tirs, six personnes et en blessant 13 autres”.
“Sur les six tués, trois sont des civils”, a-t-il rappelé, ajoutant que l’évacuation des femmes et des enfants des zones menacées par les tirs géorgiens avait été ordonnée le 2 août.”
Au-delà de l’événement
Comme toujours on ne peut dire la véritable signification de l’événement - et a fortiori qui en sortira victorieux- ne peut se comprendre qu’en le renvoyant à la totalité historique qui lui donne sens.
Le fond est ce que nous avons décrit le dépeçage des marches de l’ex-Urss et la tentative de poursuivre l’assaut en particulier à travers l’Otan qui tente d’intégrer la Géorgie et l’Ukraine. Partout ont été installés par de pseudo- révolutions populaires et des élections achetées, manipulées des hommes de paille dont la politique consiste à s’approprier sous couvert de privatisation les ressources du pays, entraînant une aggravation de la situation des populations. Il faut également mesurer que l’entreprise est partie dès Gorbatchev, qui sous couvert de créer un pluripartisme a sollicité partout des partis “nationalistes” ou plutôt régionalistes issus de l’appareil, avec une propagande en faveur des autonomies puis des indépendances.
La Géorgie était l’une des Républiques où le niveau de vie était le plus élevé aux côtés des Pays baltes et certaines régions de la Russie occidentale. Quelques années après la chute de l’Union Soviétique, la Géorgie était dans le peloton de queue des républiques post-soviétiques. Si l’on prend les revenus par habitant, la Géorgie est aujourd’hui dans les trois ou quatre derniers pays de l’ex-Union soviétique. Le PIB a chuté de manière très spectaculaire : le PIB de 1993 représentait 17% de celui de 1989. Au lendemain de la disparition de l’URSS, il y a donc eu une décomposition totale du tissu économique. Depuis 1995-1996, la croissance est redevenue positive. A partir de 1998, la crise financière russe a marqué la Géorgie. La corruption et la criminalisation de l’économie sont également entrées en jeu à partir de la fin des années 90 entravant sérieusement le développement de l’économie. En matière économique, la Géorgie est ainsi devenue un pays en proie à des groupes d’intérêts politico-mafieux qui empêchaient tout investissement étranger. Les seules entreprises étrangères qui sont parvenues à s’implanter dans le pays, notamment dans la distribution d’électricité ou la production de vin ou d’eau minérale, ont du quitter le pays au bout de deux ou trois ans en raison de la pression de ces groupes criminels. Il y eu aussi des enlèvements d’hommes d’affaires à plusieurs reprises.
La révolution de velours, menée en fait directement par les Etats-Unis avec des “experts” et politiciens directement importés de ce pays a été mené contre la corruption et les bandes mafieuses. Il a fait grand bruit de quelques arrestations de responsables politiques impliqués dans la corruption de l’ancien régime. Les ministres de l’Energie, des Transports, le directeur des chemins de fer ou encore le président de la Fédération géorgienne de Football ont ainsi figuré sur la ” black list ” de l’équipe Saakachvili. Mais en fait il y a eu entente entre les nouveaux et les anciens dans le dépeçage et le peuple qui avait accueilli avec soulagement le changement d’équipe a rapidement déchanté.
Qu’est-ce qui peut donc expliquer cette offensive contre une région autonome depuis pas mal de temps et surtout contre l’armée russe ?
Ce qu’il faut voir c’est que le Caucase du sud est une région stratégique d’une très grande hétérogénéité ethnique qui est la région qui sert de lien entre la Russie et l’Asie Mineure, et qui après la chute de l’URSS s’est convertie en une zone de tension et de conflits armées. Le gouvernement de Géorgie est un agent nord-américain, c’est un avocat new yorkais d’origine géorgienne Mijail Shajashvili, cette situation créée de toute pièce est un des principaux facteurs d’instabilité à cause de la politique intérieure de privatisation et d’hostilité à l’égard de russophones. Du côté Russe, la défense de dignité nationale par Poutine a d’abord consisté à enrayer le dépeçage et cette politique a été menée aussi en s’appuyant sur la résistance des populations russophones à la soumission aux Etats-Unis. On retrouve en Ukraine un cas de figure comparable. On connait par ailleurs la manière dont la Russie a été conduite à créer autour d’elle un glacis d’alliance dont le plus célèbre est l’organisation de Coopération de Shanghai, mais il faut également considérer l’organisation des riverains de la mer Caspienne proche de cette zone. Partout la Russie a sollicité des alliances défensives contre les assauts conjugués de pseudo terroristes et de séparatistes dirigés par des hommes de paille, avec intégration dans l’OTAN.
Parce que l’autre facteur de déstabilisation est le rôle que les États-Unis et leur allié Israël prétendent faire jouer à la Géorgie. La Géorgie, en effet, constitue une des pièces du dispositif contre l’Iran autant qu’un des facteurs de démantèlement de l’ex-Union Soviétique, voir de la Russie elle-même. C’est même une chaîne de poudrière qui comprend la Tchétchénie, le Daguestan avec ses réserves et l’enclave arménienne de Nagorno-Karabaj dans le territoire de l’Azerbaidzhan. Pour bien mesurer l’ensemble il faut encore avoir en mémoire que se multiplient dans la même zone les agressions de la Turquie contre les Kurdes, le tout dans le contexte explosif de l’Iran.
Derrière ces conflits ethniques il y a en effet le grand jeu pour le contrôle des gazéoducs et oléoducs. C’est le gaz du Turkménistan et les réserves pétrolières d’Azerbadjian. Les Américains sont actifs depuis longtemps dans cette région en raison des ressources énergétiques de la Caspienne. Ils sont également entrain de déplacer leurs bases militaires de l’Europe de l’Ouest vers l’Europe de l’Est et l’Asie centrale officiellement dans le cadre de leur stratégie de lutte contre le terrorisme. Washington envisage notamment d’installer de nouvelles bases en Géorgie ou en Azerbaïdjan. La Géorgie est le véritable verrou stratégique du Caucase car c’est le seul pays qui a un accès à une mer ouverte et qui a une frontière très longue avec le Caucase russe. La Géorgie est un pays clef pour la stabilité régionale dans le Caucase
Alors que le conflit armé paraissait improbable, il semble que celui-ci ait été décidé ce qui est très inquiétant pour l’embrasement de la zone. S’agit-il d’une mise à feu dont la poudrière serait l’Iran? Avec les Etats-Unis on peut s’attendre à tout.
(1) Cela dit Soros dont nul ne peut nier le rôle dans la déstabilisation qui lui rapporte en général pas mal d’opérations financières est actuellement en crise ouverte avec le gouvernement Bush et un des plus gros soutiens financiers de Obama. C’est un personnage qui s’agite beaucoup mais est-ce lui qui tire les ficelles, on peut en douter, le complexe militaro-industriel étasunien se méfie de cet aventurier, l’utilise.

(*) Cet article a été publié sur http://socio13.wordpress.com/

mercredi 13 août 2008

Déclaration du Comité de la Paix de Géorgie

Comité de la Paix de Géorgie0182. Apt. 2, quarter 8, house 10, massif 3, Tbilissi, Géorgie Tél: + + 995 93 7613 63 Fax / Tél: + + 995 32 7315 16 E-mail: pc_of_georgia@yahoo.com

Une fois de plus la Géorgie a été projetée dans une situation de chaos et d'effusion de sang. Une nouvelle guerre fratricide a explosé avec une force redoublée sur le sol géorgien.

À notre grande déception, les mises en garde du Comité de la Paix de Géorgie et de personnalités géorgiennes progressistes sur le caractère pernicieux de la militarisation du pays ainsi que sur le danger d'une politique pro-fasciste et nationaliste n'ont eu aucun effet. Les autorités de Géorgie, ont organisé, à nouveau, une guerre sanglante, se sentant appuyées par certains pays occidentaux et par certaines organisations régionales et internationales. La honte versée, par les détenteurs actuels du pouvoir, sur les peuples géorgiens nécessitera plusieurs décennies pour être lavées. L'armée géorgienne formée par des instructeurs étasuniens et équipées d'armements également étasuniens a soumis la ville de Tskhinvali à une destruction barbare. Les bombardements ont tué des civils ossètes, nos frères et sœurs, enfants, femmes et personnes âgées. Plus de deux mille habitants de Tskhinvali et de ses environs sont morts. Sont également morts des centaines de civils de nationalité géorgienne, à la fois dans la zone de conflit ainsi que sur l'ensemble du territoire géorgien. Le Comité de la Paix de Géorgie exprime ses profondes condoléances aux familles et aux amis de ceux qui ont péri.

L'entière responsabilité pour cette guerre fratricide, pour les milliers d'enfants, de femmes et de vieillards morts, pour les habitants de l'Ossétie du Sud et de Géorgie est exclusivement celle de l'actuel président, du Parlement et du Gouvernement géorgien. L'irresponsabilité et l'aventurisme du régime de Saakachvili n'ont pas de limites. Le Président de Géorgie et son équipe, sans aucun doute, sont des criminels et doivent être tenus pour responsables.

Le Comité de la Paix de Géorgie, avec tous les partis progressistes et des mouvements sociaux de Géorgie, s'engage dans la lutte pour que les organisateurs de ce monstrueux génocide reçoive une punition sérieuse et bien méritée. Le Comité de paix de Géorgie déclare et demande à la large opinion publique de ne pas identifier les actuels dirigeants géorgiens avec le peuple géorgien, avec la nation géorgienne, et lance un appel à tous de soutenir le peuple géorgien dans la lutte contre le régime criminel de Saakachvili. Nous lançons un appel à toutes les forces politiques de Géorgie, les mouvements sociaux et la population de Géorgie pour s'unir afin de libérer le pays du régime anti-populaire, russophobe et pro-fasciste de Saakachvili!

Le Comité de la Paix de Géorgie
Tbilissi, 11 août de 2008

(Traduction non officielle)

dimanche 10 août 2008

Evo en danger au référendum révocatoire du 10 août ? Mes impressions de Bolivie

MICHEL COLLON

La Bolivie a bien changé. A La Paz, j'assiste à une grande réception donnée par l'ambassadeur de Cuba. Mojitos, buffet, danses, grosse ambiance. Où sommes-nous ? Dans la salle des fêtes de... l'armée bolivienne. Oui, celle qui a tué le Che.
La Bolivie a bien changé, mais tout le monde ne lui veut pas que du bien. Nous sommes venus nous en rendre compte sur place avec quelques intellectuels progressistes d'une quinzaine de pays : Frei Betto, Ernesto Cardenal, Ramsey Clark, François Houtart, Luis Britto Garcia, Pascual Serrano... Quelques journées de rencontres et d'échanges avec des intellectuels boliviens, des représentants des communautés indiennes, des artistes... Le moment est tendu. La droite essaie de provoquer une scission des riches régions de l'Est. Pour déjouer la manoeuvre, le président Evo Morales, à mi-mandat, appelle à un référendum révocatoire, ce 10 août. Une sorte de vote de confiance. Il remet son mandat en jeu, mais aussi celui des préfets de départements, y compris ceux tenus par l'opposition. La droite tente de saboter le référendum et on craint des incidents... Nous allons voir qui est derrière ces incidents, quel rôle jouent ici les Etats-Unis, et la CIA, et un ambassadeur vraiment curieux, et aussi l'Europe...

Un Bolivien sur quatre doit émigrer
Impressions fortes. Physiquement, d'abord. La Paz est à 3.600 mètres d'altitude. Son aéroport à 4.000 mètres. Arrivés dans la nuit, à court d'oxygène, nous sommes au bord de l'évanouissement. Très prévenants, les jeunes qui nous accueillent, nous font asseoir au calme, s'occupent de nos bagages et nous laissent récupérer notre souffle. Le premier jour sera consacré au repos, à l'acclimatation. Avec Luis, un ami vénézuélien, nous faisons un petit tour, à petits pas et de banc en banc, dans une des plus belles capitales du monde. Imaginez une immense cuvette, bordée par les grandioses montagnes Huayna Potosí (6.094 m) et Nevado Illimani (6.460 m), non loin du lac Titicaca, le plus haut lac navigable du monde. Ici, l'eau bout à 80°. Et toutes les rues sont en pente. Ce qui frappe à La Paz, en hiver en tout cas, c'est la douceur du climat, ensoleillé et frais. Et la douceur des gens. Partout, on vous accueille avec gentillesse, avec une sorte de sérénité tranquille. Les Indiennes portent de lourds vêtements avec de superbes châles bariolés. Et de curieux petits chapeaux 'boule', noirs, bruns ou gris. Parfois, elles portent aussi des charges impressionnantes. Les Indiens représentent deux tiers de la population.

L'importance des communautés indiennes
« Un Indien président ? L'oligarchie blanche, raciste, ne l'accepte toujours pas. », nous confie Evo. En fait, j'ai commencé à comprendre toute la richesse de cet héritage indien en visitant avec des amis boliviens Tiwanaku, la capitale d'un ancien empire Inca...Nous sommes sur le très haut plateau de l'Altiplano, bordé de montagnes. Ici, les Indiens vivent, dans des conditions difficiles, d'agriculture et d'élevage. Pas un nuage dans le ciel, un air incroyablement pur, on sent encore le froid de la nuit. Tiwanaku fut une ville immense, les fouilles commencent à peine. Une centaine d'Indiens de la région sont occupés à restaurer le temple, une énorme pyramide en terrasses. C'était une civilisation très avancée qui construisait ses bâtiments en s'appuyant sur une connaissance poussée de l'astronomie. Elle avait créé une industrie métallurgique et textile. Elle cultivait plus de deux cents sortes différentes de maïs et quatre cents sortes de patates. Dont une espèce qui pouvait se congeler et rester comestible dix ans. Le système d'irrigation était très perfectionné avec une inclinaison très précise pour que les pierres réchauffent l'eau et l'empêchent de geler. Système si perfectionné qu'aujourd'hui, le ministère de l'Agriculture va le réutiliser pour développer l'agriculture en terrasses. L'eau est rare ici, un trésor.Un vieil Indien opère avec notre petit groupe une cérémonie rituelle, une sorte de sacrifice de petits objets symboliques, pour célébrer l'union avec le Cosmos et rassembler les souhaits que nous formons. Emotion. Il ne s'agit pas ici de glorifier le passé pour le passé, mais d'en préserver la mémoire et les valeurs pour les intégrer à la nouvelle société. Un journaliste bolivien nous explique l'importance que prend ici la communauté : « C'est un élément fort de la Bolivie. Tenez, selon les statistiques internationales, le paysan bolivien a un revenu moyen de cinquante dollars par an. Autant dire qu'il est mort ! Sauf si on comprend que l'économie communautaire est la base de notre vie ici. »Bref, un héritage précieux qu'on ne peut pas perdre.

Le sort des Boliviens quand ils émigrent...
Impressions fortes aussi sur les réalités sociales de ce pays. A La Paz, les classes hautes vivent dans le bas de la ville, à 3.000 mètres, où on respire plus facilement. Les basses classes, par contre, à El Alto (pas besoin de traduire) : 4.000 mètres. Petits commerces, petits artisanats, un peu d'élevage dans les hauts plateaux... La vie est dure.Deuxième pays le plus pauvre d'Amérique latine, la Bolivie a vu émigrer un sur quatre de ses enfants. Pourquoi ? Pendant des siècles, cette terre a été colonisée par l'Espagne. Et tous les bénéfices de ses richesses minières, extraites au prix d'un travail meurtrier dans un quasi-esclavage, ont été emportés en Europe. Pendant des décennies, son gaz et son pétrole ont profité à une poignée de riches, mais surtout à quelques multinationales, européennes notamment. Le Nord a bien saigné le Sud. Ne laissant sur place que la misère.Et les conflits. Evo Morales, président depuis deux ans et demi, n'est pas tombé du ciel, il est le fruit de longues années de résistances ouvrières et paysannes. Les communautés indiennes ont toujours été exploitées, exclues, méprisées par une élite blanche et raciste, liée aux Etats-Unis et à l'Europe.Voilà d'où viennent la pauvreté et le sous-développement. Mais quand les Boliviens, pour survivre, vont faire les ménages en Europe, celle-ci les traite comme des criminels et les emprisonne. Même des enfants ! Evo Morales a courageusement dénoncé la récente 'Directive de la Honte' qui permettra à tous les pays européens d'emprisonner jusqu'à dix-huit mois les délinquants, pardon : les immigrés. Justement, avant de partir, je venais de rencontrer à Bruxelles des travailleurs immigrés, notamment latinos. En lutte depuis des mois pour obtenir des papiers, c'est-à-dire leurs droits, leur dignité. Face à des ministres complètement sourds, ils ont été obligés de mettre leurs vies en danger : grève de la faim, escalade de grues... Appréciant beaucoup la lettre d'Evo à l'U.E. ils m'ont chargé de remettre un petit message de gratitude au président bolivien. Je le lui ai remis. Sourire sur sa figure.En fait, quand on voit ici la pauvreté, les salaires dérisoires, le manque d'industrie, on comprend pourquoi tant de Boliviens doivent émigrer. Mais, en allant plus loin, on comprend aussi que l'Europe est une sale hypocrite qui porte une lourde responsabilité dans cette émigration. Nous allons y revenir...

Qu'a réalisé Evo ?
Mais voyons d'abord ce qu'a réalisé Evo en deux ans et demi... Il a nationalisé le pétrole et le gaz. Vous voulez savoir pourquoi, dans nos médias, on dit du bien du président colombien Uribe et du mal d'Evo Morales ? Très simple. Le premier a fait passer les taxes sur les multinationales de 14% à... 0,4%. Pour faciliter l'installation de ces multinationales, ses paramilitaires ont chassé de leurs terres quatre millions de paysans. Le second a osé rendre à la nation bolivienne les richesses qui lui appartenaient afin de combattre la pauvreté. En nationalisant les hydrocarbures, Evo a multiplié par cinq les revenus de l'Etat et s'est donné les moyens de soulager les maux les plus urgents : analphabétisme en baisse de 80%, retour à l'école d'une partie des enfants travaillant dans la rue, création d'écoles dans les langues indiennes aymara et quechua (vingt mille diplômés), soins de santé gratuits déjà pour la moitié des Boliviens, pension Dignidad pour les plus de 60 ans, crédit à zéro pour-cent pour des produits comme le maïs, le blé, le soja et le riz. Grâce à l'aide du Venezuela, six mille ordinateurs ont été offerts, surtout à des écoles. Grâce à l'aide de Cuba, deux cent soixante mille personnes ont été opérées des yeux. Ailleurs en Amérique latine, elles seraient condamnées à être aveugles, car pauvres.En outre, les investissements publics ont fortement augmenté pour développer l'économie. La Bolivie a comblé son déficit fiscal, remboursé la moitié de sa dette extérieure (de 5 à 2,2 milliards de dollars), reconstitué une petite réserve financière, multiplié par quatre l'emploi dans les mines et la métallurgie, doublé la production et les revenus de ces industries. Le PIB industriel est passé de 4,1 à 7,1 milliards de dollars en trois ans. Mille tracteurs ont été distribués à des paysans. De nouvelles routes ont été construites.Bref, la Bolivie avance. Pas assez vite, disent certains pour qui Evo n'y va pas assez fort contre la droite et les grands propriétaires. C'est un débat à mener entre ceux qui vivent sur place et peuvent apprécier la situation, ses possibilités, ses dangers. En sachant qu'il ne suffit pas de dire « Y a qu'à » pour sortir un pays de la pauvreté et de la dépendance. En sachant qu'il faut tenir compte du rapport de forces avec la droite qui s'agite beaucoup et sabote. En tenant compte de l'armée (Tous ses chefs seront-ils loyaux jusqu'au bout ?).Autre facteur négatif : « La Justice demeure totalement corrompue », m'a confié... le plus haut magistrat de La Paz. « C'est une vieille caste qui se protège et protège les intérêts des riches. C'est un véritable business. Pourtant, nous avons menacé de révocation immédiate tout juge qui sera pris en flagrant délit. Mais c'est un combat difficile. »Et justement, quand je me trouvais là, la Justice venait fameusement en aide à la droite en essayant d'empêcher par une bataille juridique la tenue du référendum. Mais il y a danger bien plus grand que la Justice...

Derrière la droite, les Etats-Unis préparent une guerre civile
C'est le nouveau truc des Etats-Unis. S'avérant incapable de gagner une guerre d'occupation, Washington recourt à la guerre indirecte, la guerre par intermédiaires. Actuellement, la stratégie de Washington est d'essayer de provoquer une guerre civile en Bolivie. Pour cela, les provinces contrôlées par la droite et qui contiennent les grandes propriétés agricoles liées aux multinationales ainsi que la majorité des réserves de gaz et de pétrole, ces provinces multiplient les provocations pour préparer une sécession.Ayant personnellement étudié l'action secrète des grandes puissances pour faire éclater la Yougoslavie, j'ai tenu à attirer l'attention des Boliviens, lors de quelques interviews : aujourd'hui, Washington risque de transformer leur pays en une nouvelle Yougoslavie.Voici les ingrédients de son action : 1. Des investissements massifs de la CIA. 2. Un ambassadeur spécialisé dans la déstabilisation. 3. Des fascistes expérimentés. Avec ces ingrédients, vous pouvez préparer un coup d'Etat ou une guerre civile. Ou les deux.Premier ingrédient. Comme au Venezuela, la CIA investit beaucoup en Bolivie. A travers ses paravents habituels : USAID, National Endowment for Democracy, Institut Républicain International, etc. Les organisations de la droite séparatiste sont abondamment subventionnées. L'USAID a, par exemple, financé Juan Carlos Orenda, conseiller du Comité civique de Santa Cruz d'extrême droite et auteur d'un plan prévoyant la sécession de cette province.Mais aussi des organisations plus discrètes chargées de semer la confusion et de préparer une propagande anti-Evo. A l'université San Simon de Cochabamba, la Fondation du Millénaire a reçu 155.000 dollars pour critiquer la nationalisation du gaz et défendre le néolibéralisme. Treize jeunes dirigeants boliviens de droite ont été invités à des formations à Washington : 110.000 dollars. Dans les quartiers populaires d'El Alto, USAID lance des programmes pour « réduire les tensions dans les zones sujettes à conflits sociaux ». Lisez : discréditer la gauche.En tout, des millions de dollars ont été versés à toutes sortes d'organisations, des groupes étudiants, des journalistes, des politiciens, des magistrats, des intellectuels, des hommes d'affaires. Le parti populaire espagnol, autour de José Maria Aznar, participe aux manoeuvres.Deuxième ingrédient. D'où vient Philip Goldberg, l'actuel ambassadeur des Etats-Unis en Bolivie ? De Yougoslavie. Où il a accumulé une riche expérience sur la manière de faire éclater un pays. De 94 à 96, il a travaillé en Bosnie pour l'ambassadeur Richard Holbrooke, un des stratèges de la désintégration. Puis, il a fomenté les troubles au Kosovo et la scission entre Serbie et Monténégro. Un expert, on vous dit.Et pas inactif. Comme le raconte le journaliste argentin Roberto Bardini : « Le 28 juin 2007, une citoyenne américaine de vingt ans, Donna Thi, de Miami, a été détenue à l'aéroport de La Paz pour avoir tenté d'introduire dans le pays cinq cents balles de calibre 45 qu'elle avait déclarées aux douanes comme du 'fromage'. Au terminal, l'attendait la femme du colonel James Campbell, le chef de la mission militaire de l'ambassade US en Bolivie. L'ambassadeur US Philip Goldberg est intervenu immédiatement pour obtenir qu'on la relâche en disant qu'il ne s'agissait que d'une 'innocente erreur'. Les munitions, a-t-il déclaré, ne devaient servir qu'au sport et au spectacle. En mars 2006, un autre citoyen US, Triston Jay Amero, alias Lestat Claudius, un Californien de 25 ans, porteur de quinze documents d'identité différents, a fait exploser trois cents kilos de dynamite dans deux hôtels de La Paz. » Pourquoi a-t-on exporté Goldberg des Balkans à la Bolivie ? Pour transformer, j'en suis sûr, ce pays en une nouvelle Yougoslavie. Le séparatisme est une méthode privilégiée par les Etats-Unis pour reprendre le contrôle de richesses naturelles ou de régions stratégiques lorsque des gouvernements se montrent trop indépendants, trop résistants aux multinationales.Troisième ingrédient. Des fascistes expérimentés. En Bolivie, Goldberg a ouvertement soutenu et collaboré avec des hommes d'affaires croates à la tête de la sécession. Particulièrement, Branko Marinkovic, membre de la Fédération des entrepreneurs libres de Santa Cruz (province sécessionniste). Très grand propriétaire de terres, Marinkovic tire aussi les ficelles de Transporte de Hidrocarbures Transredes (qui travaille pour Shell). Il gère les six mille kilomètres de pipelines de gaz et de pétrole qui mènent au Chili, au Brésil et en Argentine.Et quand ces gens sont-ils venus de Croatie ? Il faut rappeler que, durant la Seconde Guerre mondiale, Hitler a installé une Grande Croatie fasciste où ses collaborateurs, les Oustachis, ont mis sur pied des camps d'extermination (y compris un spécialement pour enfants !), perpétrant un génocide épouvantable contre les Serbes, les juifs et les tziganes. Après leur défaite, l'Eglise croate et le Vatican ont organisé, les Ratlines, filières d'évasion des criminels fascistes croates (et de Klaus Barbie). De la Croatie à l'Autriche, puis à Rome. Et de là vers l'Argentine, la Bolivie ou les Etats-Unis. Quand on sait que Franjo Tudjman et les dirigeants de la 'nouvelle' Croatie née en 1991 ont réhabilité les anciens criminels croates de la Seconde Guerre mondiale, on aimerait savoir si Monsieur Marinkovic renie tout ce passé ou bien si, tout simplement, il emploie les mêmes méthodes là où il se trouve à présent. Quant aux Etats-Unis, on sait qu'ils ont récupéré et recyclé quantité de criminels et d'espions nazis de la Seconde Guerre mondiale. Les réseaux, ça sert toujours.

Ce qui se cache derrière le séparatisme
Voilà, tous les ingrédients sont prêts pour faire exploser la Bolivie... Les dollars de la CIA, plus des experts dans la provocation de guerres civiles, plus des fascistes recyclés en businessmen. Une guerre civile qui servirait bien les intérêts des multinationales, mais que l'opinion internationale doit absolument empêcher. Les Boliviens ont le droit de décider eux-mêmes de leur sort. Sans la CIA.Car une sécession ne profiterait qu'à l'élite. L'écrivain brésilien Emir Sader vient d'écrire très justement : « Aujourd'hui, une des modalités qui renferme le racisme, c'est le séparatisme, les tentatives de délimiter les territoires de la race blanche, en s'appropriant et privatisant les richesses qui appartiennent à la nation et à son peuple. Nous connaissions déjà ces intentions sous la forme des quartiers riches qui cherchaient à se définir en tant que municipalités, afin que la part des impôts prélevée obligatoirement de leurs immenses richesses, reste dans leur escarcelle pour augmenter les bénéfices de leurs quartiers retranchés, derrière lesquels ils cherchaient à isoler et défendre avec une sécurité privée, évidemment, leurs styles de vie privilégiés ». (...) Le référendum séparatiste est une expression oligarchique, raciste et économique car ils veulent garder l'usufruit des richesses de Santa Cruz pour leur propre bénéfice et parce que les oligarques veulent, en plus, empêcher que le gouvernement d'Evo Morales poursuive son processus de réforme agraire et qu'il l'étende à tout le pays. » Cette autonomie-là, en effet, ça veut dire que les Blancs riches qui ont contrôlé la Bolivie depuis toujours, refusent d'être gouvernés par la majorité, non blanche, de l'Ouest. Quand on parle d'autonomie, Evo Morales répond : « Parlons d'autonomie, non pas pour l'oligarchie, mais pour les peuples avec qui nous luttons. Ces groupes séparatistes qui viennent de perdre leurs privilèges, ont été depuis longtemps dans le Palais, ils ont gouverné et ont permis que l'on pille notre pays, nos ressources naturelles, y compris les ressources de base, de même que la privatisation de nos entreprises, et maintenant ils envisagent de nouveau ce système qui démontre son véritable intérêt : le contrôle économique ».Mais il n'y a pas que les Etats-Unis qui s'acharnent sur la Bolivie...

L'hypocrisie de l'Europe :qui donc l'a causée,
« toute la misère du monde » ?
Pourchassant les sans-papiers, l'Europe glisse dans un soupir de dame patronnesse : « Nous ne pouvons quand même pas accueillir toute la misère du monde ». Ah, bon ? Mais, en réalité, cette misère, c'est vous qui l'avez créée ! Vos Charles-Quint, vos Louis XIV, vos Elisabeth I et vos Léopold II ont allègrement massacré les 'sauvages' pour voler leurs richesses ! Le décollage économique du capitalisme européen s'est construit sur ce pillage. Et jusqu'à aujourd'hui, vos sociétés minières, agricoles et autres n'ont cessé de piller les matières premières sans les payer, n'ont cessé de dominer et déformer les économies locales et de bloquer leur développement ! N'est-ce pas vous qui avez une Dette à rembourser au Sud ?Serait-ce du passé ? Dans les médias, les responsables européens aiment à raconter qu'aujourd'hui, ils ne veulent que du bien à l'Amérique latine et au tiers monde...« Totalement faux », me confie avec indignation Pablo Solon qui représente la Bolivie dans les négociations commerciales entre l'Amérique latine et l'U.E : « La Bolivie l'a exprimé à l'U.E. Avant les négociations, nous avions dit que nous ne négocierions pas un traité style Libre Commerce. Et nous avions communiqué nos points de divergence sur les services, les investissements, la propriété intellectuelle et les biens publics. La Commission nous a promis qu'on discuterait ces points dans la négociation. Qu'à la différence des 'autres', on ne nous imposerait pas un format unique. Mais, lorsque nous nous sommes réunis avec Peter Mandelson, commissaire européen pour le Commerce, il nous a dit de façon catégorique et impérative : 'Ceci est un Traité de Libre Commerce. Ou bien vous l'acceptez, ou bien vous êtes hors des négociations.'. J'ai répondu personnellement que nous n'allions pas nous exclure et que nous allions défendre nos points de vue jusqu'au bout. Car la Bolivie a beaucoup d'industries qu'elle doit défendre : acier, plastique, papier, qui ont besoin de mécanismes de protection tout comme ce fut les cas pour les industries naissantes européennes à l'époque. »Effectivement, l'Europe se montre hyper-dominatrice et arrogante. Elle prétend imposer à toute l'Amérique latine et aux Caraïbes l'arrêt des subventions qui aident à développer les produits locaux, la suppression des droits de douanes aux importations (mais elle refuse de faire de même chez elle !), la suppression de toutes limites pour les exportations européennes (refusant l'inverse), le transfert sans limites de la main d'oeuvre européenne qualifiée, la modification de toutes les lois protégeant les économies locales. Et en plus, elle veut imposer la privatisation de tous les services, biens et entreprises des Etats. Alors qu'en 2000 déjà, sur les cinq cents plus grandes entreprises d'Amérique latine et des Caraïbes, 46 % appartenaient déjà à des entreprises étrangères.Et en plus, l'U.E. prétend imposer des brevets sur le vivant (la Bolivie a une biodiversité très riche convoitée par les multinationales chimiques et pharmaceutiques). Mais le vivant, et l'eau aussi, ne sont-ils pas des biens essentiels à la survie, un patrimoine qui doit rester à ceux qui l'ont toujours protégé et utilisé à bon escient ?En définitive, l'U.E. veut imposer des traités tout à fait déséquilibrés qui tueront les entreprises boliviennes. Tout ce qu'elle cherche, c'est que les entreprises européennes puissent envahir librement les marchés. Donc ruiner ces pays. Donc provoquer de l'émigration. Un système absurde, non ?

Qui 'choisit' l'immigration et pourquoi ?
J'ai écrit que l'Europe chassait les émigrés latinos. Ce n'est pas exact. Elle ne les traite pas tous de la même façon. D'un côté, le patronat européen importe les meilleurs cerveaux du tiers-monde, et aussi des techniciens très qualifiés. Sous - payés pour grossir les bénéfices des sociétés. C'est ce que Sarkozy et d'autres appellent 'immigration choisie'. Le maître sélectionne ceux qui auront la chance de travailler pour lui. Mais ce vol des cerveaux prive le tiers-monde des gens qu'il a formés (à grand coût) et qui seraient nécessaires à son développement. Une nouvelle forme de pillage.De l'autre côté, l'Europe accueille aussi une partie des non qualifiés. En les laissant sans papiers, donc sans droits, elle les oblige à vivre dans la peur, à accepter des salaires et des conditions de travail qui constituent un recul social. Bon moyen de diviser et de faire pression sur les autres travailleurs. Voilà comment se fabrique la 'compétitivité' de cette vertueuse Europe. La façon de traiter les sans-papiers n'est pas une bavure, elle est un rouage essentiel d'un système économique égoïste.Résumons. L'Europe a volé l'Amérique latine. L'Europe continue à voler l'Amérique latine. Elle l'empêche de nourrir ses enfants. Mais quand ceux-ci sont forcés d'émigrer, elle les emprisonne. Ensuite, elle donne des leçons de démocratie et de moralité au monde entier.

Le temps est venu
Je n'ai pu rester longtemps en Bolivie, mais ce peuple m'a profondément impressionné. Je me rappelle ces milliers de manifestants qui descendaient, ce dimanche-là, vers le centre de La Paz, dans leurs minibus, leurs autos ou leurs taxis bondés, Indiens et Blancs, du plus clair au plus foncé..Avec un calme étonnant, bien moins de bruit que dans n'importe quelle manif du monde. Avec une détermination simple et noble. Et dans leurs yeux, une évidence : le temps est venu de mettre fin à des siècles d'humiliations, le temps est venu de la dignité pour tous, le temps est venu de faire disparaître la misère.Et je repensais à ces amis sans-papiers de Bruxelles, manifestant eux aussi pour leur avenir et pour leur dignité. Le problème est évidemment le même, à Bruxelles et à La Paz : à qui doivent servir les richesses d'un pays ? Et si ce problème ne se résout pas à La Paz, des millions de sans-papiers continueront à frapper aux portes de l'Europe.

Et demain ?
Comment cela évoluera-t-il ? Pour le 10 août, un institut de sondage pro-US annonce une victoire d'Evo par 60%. Comme la plupart de mes interlocuteurs à La Paz. Certains craignaient, par contre, l'influence du problème de l'inflation et du renchérissement de la vie. D'autres craignent que la droite lance des provocations violentes pour empêcher le référendum. Quoi qu'il en soit, le référendum ne résoudra rien, ni dans un sens, ni dans l'autre. Evo Morales sera toujours devant le même problème : le gouvernement est à gauche, mais ne contrôle pas l'économie du pays, ni les médias (aux mains des gros propriétaires et de la multinationale espagnole Prisa), ni les universités, ni l'Eglise qui est aux côtés des riches, comme d'habitude dans ce continent. On ne peut pas tout faire en deux ans et demi. Mais, pour avancer, Evo devra réussir à mobiliser plus avant les masses populaires. Sa seule force.De toute façon, après le référendum, la question restera la même : les richesses du pays doivent-elles servir à enrichir les riches et les multinationales ou bien à développer le pays et à vaincre la pauvreté ?Pour trancher cette question à leur avantage, les Etats-Unis sont prêts à tout. Et le mouvement progressiste international ? Comment réagira-t-il contre la désinformation et la préparation d'une guerre civile ? La réponse dépend de nous tous.

Michel Collon
La Paz - BruxellesAoût 2008
D'autres articles sont disponibles en tapant 'Bolivie' au moteur de recherches :

----- Original Message -----
From: Michel Collon
To: secretaire@tcsqc.ca
Sent: Friday, August 08, 2008 6:43 AM
Subject: Evo en danger ? Mes impressions de Bolivie.

samedi 9 août 2008

Deux poids, deux mesures

La plupart des pays occidentaux pratiquent 'les droits de l'homme à géométrie variable'... Le cirque médiatique au sujet de la Chine est scandaleux lorsqu'on regarde comment plusieurs de ces pays qui l'attaquent, respectent chez eux, ou ailleurs, les droits de l'homme. Plus près de chez nous, il suffit de se rappeler que les États-Unis qui sont derrière de nombreux génocides depuis le début du XXième siècle, pratiquent aujourd'hui la torture dans leur prison de Guantanamo, que le Canada complice, refuse de rapatrier Omar Kadr, un enfant-soldat, il suffit de se rappeler le sort misérable que ces pays réservent aux peuples autochtones, au peuple afro-américain, etc.
Pourtant, des organismes comme Reporters sans frontières, aveuglés sans doute par la poutre qu'ils ont dans les yeux, mènent des campagnes hystériques et enragées contre "la paille" qu'il y aurait selon eux dans les yeux des pays socialistes et des pays qui luttent contre l'impérialisme. Mais ils n'ont rien à dire par exemple contre l'État d'Israël qui, avec le soutien des USA, vole, viole et élimine tout un peuple dans le silence et avec la complicité des pays occidentaux. La Chine, elle, n'a jamais colonisé ni génocidé aucun peuple !

Ci-dessous un article rappelant un évènement historique survenu lors des jeux de Mexico en 1968 dans le cadre de la lutte contre l'Apartheid made in USA par des sportifs noirs courageux.

Vendredi 8 août 2008

Olympiques 1968: Le courage de Tommie Smith et John Carlos (in English)Olympiques 1968: Le courage de Tommie Smith et John Carlos (in English) - Le blog de hort
http://bricabraque.unblog.fr/2008/07/26/le-16-octobre-1968-tommie-smith-et-john-carlos-transforment-le-stade-en-arene-politique/

Le 16 octobre 1968: Tommie Smith et John Carlos transforment le stade en arène politique.

Philippe Artières écrit dans “68, une histoire collective [1962-1981]”, ouvrage qu'il co-dirige avec Michelle Zancarini-Fournel : «Ces deux-là n'ont pas prononcé le moindre slogan et pourtant leur geste a fait le tour du monde, offrant de manière inattendue à leur cause la plus grande des tribunes; ils ont soudain, au moment où personne ne s'y attendait, transformé un événement sportif en événement politique.»
Le 16 octobre 1968, Tommie Smith bat le record du monde du 200 mètres et remporte donc cette épreuve d'athlétisme, devançant l'Australien Peter Norman et son compatriote John Carlos. Lors de la remise des médailles, ils brandissent le poing ganté de noir, tête baissée, à la manière du Black Power. En fait, les deux athlètes prennent leur décision dans les vestiaires entre la fin de l'épreuve et la remise des médailles. Smith et Carlos sont tous les deux formés à l'université de San Jose State enCalifornie (”Speed city”), qui rassemble les athlètes de premier plan. Ils y ont rencontré Harry Edwards, un ancien athlète, désormais professeur de sociologie, très engagé en faveur de la cause noire.
En 1967, Edwards fonde l'Olympic Project for Human Right (OPHR), dans le but d'organiser un boycottage des JO au motif que les noirs n'ont pas à gagner des médailles pour un pays qui les opprime : «Pourquoi courir à Mexico quand on doit ramper à la maison?». De fait, les raisons de se rebeller étaient alors légions pour les Noirs américains. Carlos et Smith, par exemple, sont victimes de discriminations au sein même de Speed City (interdiction de certains cours, relégation dans des résidences de seconde zone…).
Sans être membres des Black Panthers (fondées en 1966 à Oakland), ils n'en partagent pas moins avec l'organisation une profonde colère face à la situation faite aux Noirs aux Etats-Unis. N'oublions pas que l'assassinat de Martin Luther King (MLK) en avril 1968 provoque des émeutes dans les grandes villes américaines. Pour beaucoup, le mouvement pacifique incarné par MLK a montré ses limites et il est grand temps désormais pour les Noirs américains de se défendre face aux violences policières, d'affirmer son identité, sans courber l'échine.
Les deux athlètes entendent donc apporter leur pierre à l'édifice en protestant à leur manière. Ils décident d'arborer lors de la remise des médailles un badge confectionné par l'OPHR avec le nom de l'association entouré d'une couronne de laurier. Ils décident également de brandir leurs poings gantés de noir. Ne disposant que d'une paire de gants, Smith prendra le gant droit et Carlos le gauche. L'australien Norman, quant à lui, mis au courant par les deux Américains, décide de porter lui aussi un badge de l'OPHR en solidarité avec ses camarades. Lorsd'une interview accordée en 1997, Tommie Smith revient sur ce geste : «Il ne s'agit pas de saboter une cérémonie que je respecte, mais de lui donner un sens. […] Les pieds nus évoquent la pauvreté des Noirs en Amérique. Mon foulard et le collier de John Carlos rappellent les lynchages opérés dans le sud. Les poings gantés représentent la force et l'unité du peuple noir. Je conserve à la main la pousse d'olivier que l'on vient de m'offrir. L'hymne va commencer. […]”
Les athlètes sortent sous les sifflets de la foule. Quelques jours plustard, le 18 octobre, les Américains Lee Evans, Larry James, Ron Freeman, arrivés en tête du 400 mètres portent sur le podium le béret noir des Black Panthers en levant le poing. Aussitôt, la presse américaine fustige les deux hommes comme des “non patriotes” et “anti-américains”. Le Comité International Olympique, dirigé par l'Américain Average, connu pour ses sorties racistes, ne décolère pas et exige de la délégation américaine l'expulsion de Smith et Carlos du village olympique. La carrière olympique de Smith et Carlos est stoppée net. Norman, lui aussi, subit de lourdes représailles après son geste de solidarité. Ecarté des JO de Munich en 1972 (alors qu'il était le meilleur sprinter australien), il sombre dans la dépression et meurt en 2006. Smith et Carlos se rendront d'ailleurs en Australie pour porter leur camarade en terre.
Quarante ans après, le geste de Smith et Carlos, de scandaleux, est devenu héroïque et tend même à éclipser les épreuves sportives de ces jeux.

Sources:
- Pap Ndiaye: “Les poings de la liberté”, in Les Collections de l'Histoire, pp82-85, juillet-septembre 2008.
- P. Artières et M. Zancarini-Fournelle (dir):”mai 68_ une histoire collective (1962-1981)”, 2008.

Photo des athletes
:http://www.universalis.fr/media-encyclopedie/87/PH995925/encyclopedie/Tommie_Smith_et_John_Carlos.htm
Videos à regarder
Black history, 1968 olympics
http://www.youtube.com/watch?v=47vvdOfPzLY&feature=related
The black power salute: the real story
http://www.youtube.com/watch?v=85Nf9ECBelU&feature=related
Cointelpro: The FBI's War on Black America
http://video.google.com/videoplay?docid=-7574288480731470534&q=documentary+war+duration:long&pl=trueLe nettoyages des dissidents en chine
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