dimanche 18 avril 2010

Le Pentagone accusé de financer les talibans

La Havane. 15 Avril 2010
Enrique Roman


Deux alliés des Etats-Unis dans leur principale zone de conflit, le Moyen Orient et l’Asie centrale, ont osé élever la voix contre l’administration actuelle en un bref laps de temps.
En premier lieu, Israël, qui a boudé la visite du vice-président Joseph Biden en annonçant sans préavis la construction de nouveaux établissements dans l’est de Jérusalem.
L’autre voix discordante est celle de l’Afghanistan, dont le président Hamid Karzaï, jusqu’ici l’homme de Washington dans cette guerre déboussolée, a réagi avec violence aux critiques formulées par Barack Obama lors de sa récente visite, contre la corruption gouvernementale.
Dans ce qui a été interprété comme une tentative de prendre ses distances par rapport aux forces d’invasion, Karzaï a soutenu que s’il y avait eu fraude aux dernières élections, c’était les Occidentaux qui s’en étaient chargés, nommément les observateurs des Nations unies et de l’Union européenne.
Ses réflexions sur la présence des troupes d’occupation ont laissé coi ses interlocuteurs : « Dans cette situation, c’est à peine s’il existe une différence entre invasion d’une part, assistance et coopération de l’autre. » Et d’ajouter que si les soldats étrangers sont perçus comme des envahisseurs et les soldats du gouvernement afghan comme leurs mercenaires, l’insurrection des talibans « pourrait devenir un mouvement de résistance nationale ».
Le sens même de la guerre en Afghanistan, qui a déjà suscité pas mal de polémiques, revient donc à l’ordre du jour. Aux déclarations de Karzaï s’ajoutent l’invitation qu’il a faite au président iranien Mahmoud Ahmadinejad et ses menaces d’alliance avec les talibans. On ne s’en étonnera pas : nombreux sont ceux, du côté étasunien, à voir dans le président afghan non pas une perspective de solution mais au contraire une complication supplémentaire.

On le sait : en matière de politique, ce qui fait surface n’est souvent que la pointe de l’iceberg dont le volume réel, dans le cas de l’Afghanistan, est incommensurable, puisque gonflé par des intérêts obscurs et inavouables. Les exemples ne manquent pas.
On attend toujours les résultats d’une enquête ouverte à la demande du Congrès étasunien sur la dénonciation, il y a quelques mois, d’un fait insolite : 10% des dépenses du Pentagone en contrats logistiques au profit de cette guerre aboutiraient aux mains des talibans.
C’est le célèbre journaliste Aram Roston, de The Nation, qui aurait levé le lièvre. Son article très documenté a ensuite été repris par d’autres Les révélations de Roston étaient pour le moins déconcertantes : « Des militaires des Etats-Unis à Kaboul estiment qu’au moins dix pour cent des contrats logistiques du Pentagone – des centaines de millions de dollars - consistent dans des paiements versés à l’insurrection. » A quoi des fonctionnaires afghans ajoutent : « C’est de là que provient la plus grosse part de leurs revenus. »
La dénonciation pourrait viser plusieurs coupables. Comme en Irak, des entreprises privées complètent la logistique militaire étasunienne et font ainsi de bonnes affaires. Roston détaille la participation à ce négoce de figures importantes de la famille Karzaï, dont certaines ont été liées, à une période ou une autre, aux talibans. Il évoque aussi le soutien apporté par ces entreprises à la création d’institutions qui s’occupent de faire monter la pression politique sur Washington.
Ainsi, fait aujourd’hui partie de la direction de la Campaign for a U.S.-Afghanistan Partnership, une institution de création récente qui fait du lobbying politique, un certain Ahmed Wardak, fils du ministre afghan de la Défense et président de NCL Holdings, une des principales sociètés privées associées à la guerre.
Ou encore Ahmad Rateb Popal, le traducteur du ministre des Affaires étrangères des talibans avant l’invasion de 2001, un homme que l’on voyait sur les écrans de télévision avec un turban noir, une barbe fournie et les traces de la guerre contre l’Union soviétique : une main et un bras difformes et un pansement sur l’œil. Popal, cousin du président Karzaï, contrôle aujourd’hui le Watan Group, un consortium spécialisé dans les télécommunications, la logistique et la sécurité.
Ces entreprises florissantes ont pour mission de protéger les convois d’armes et d’autres livraisons destinés aux troupes occidentales depuis le Pakistan jusqu’au territoire afghan. Ces convois empruntent des passages creusés dans l’imposante cordillère dominée par des tribus armées, des seigneurs de la guerre et des groupes de talibans.
« En fait, les sociètés en question ne protègent pas les convois destinés aux troupes des Etats-Unis. Pour la simple raison qu’elles n’en ont pas les moyens. Il leur faut la coopération des talibans », écrit le journaliste Bruce Wilson. Et Roston précise : « Le vrai secret du transport par camion est d’assurer le passage sur des routes dangereuses. Le cadre étasunien avec qui j’ai parlé a été clair et précis : ‘ L’Armée paye les talibans pour qu’ils ne tirent pas. Cet argent provient du département de la Défense’. Tout le monde confirme ses dires. »
Jean McKenzie, du Global Post, raconte qu’un agent de ces firmes dans la province de Helmand négociait avec un fournisseur local un chargement de canalisations à faire venir du Pakistan. Le fournisseur a facturé 30% de plus que le prix réel : une somme à verser aux talibans pour garantir que le chargement arrive à bon port.
La doctrine de la contre-insurrection de l’administration Obama a fait de l’argent une arme puissante, et ceci a servi à grossir le chiffre d’affaires des firmes sous contrat. Les transports routiers de NCL Hodings, assurent les journalistes, lui ont rapporté 2,2 milliards de dollars, soit 10% du produit intérieur brut de l’Afghanistan.
Au moment où ces données scandaleuses ont été publiées, le représentant John Tierney, président du Sous-comité de sécurité nationale et des relations extérieures, a informé qu’une enquête préliminaire avait permis de réunir assez de preuves pour lancer une enquête exhaustive

Mais l’enquête n’est toujours terminée, et on ignore si elle le sera un jour. NCL Holdings a intenté un procès à Aram Roston, indiquant que Wardak avait été informé des opportunités de contrats de transports routiers en Afghanistan par le site web consacré aux affaires fédérales du gouvernement des Etats-Unis.
Même les partisans de l’administration de Barack Obama multiplient les critiques contre la guerre. Quant aux troupes d’occupation, elles parcourent les chemins qu’ont connus d’autres armées et distribuent de coquettes sommes à leurs ennemis dans une guerre criminelle, impopulaire et inutile. •

L'islamophobie comme fondement de légitimité à l'impérialisme et au colonialisme de l'Occident



Houria Tahrir

Même si le terme d’islamophobie n’existe que depuis quelques dizaines d’années, le rejet et la méfiance de l’Occident à l’égard de l’islam en tant que religion et système de valeurs est très ancien. Depuis les croisades en passant par le début du colonialisme européen, la caricature des sociétés de civilisation musulmane a toujours été une pièce centrale de l’idéologie des conquérants. Les stéréotypes sur l’islam et les musulmans ont une longue histoire. Ils ont structuré les relations de l’Occident au monde musulman particulièrement dans ses rapport dominant avec lui.

L’Occident a eu recours à des moyens « déloyaux » pour affirmer des choses qui le satisfont intellectuellement sur l’Islam , car il a toujours eu du mal à contenir politiquement cet Islam. Il était perçu dès son avènement, et à juste titre, comme un défi culturel et militaire important pour l’Occident. D’ailleurs ce sont à la fois les moyens que l’Occident a mis en œuvre pour faire face à ces défis et sa rencontre avec l’Autre que soi qui l’ont poussé à se définir par rapport à cet islam, à développer un sentiment de supériorité. En quelque sorte c’est l’Islam en tant que civilisation qui a forcé cette prise de conscience de "soi" de l’Occident.

Ce qui est donc intéressant de remarquer c’est comment ce rejet de l’islam a parcouru l’histoire de l’Europe et comment cette islamophobie et cette représentation péjorative de l’islam servent encore aujourd’hui, sous d’autres formes, l’impérialisme en Irak en Afghanistan ou encore en Palestine. Sans oublier comment en France on se sert de l’islamophobie pour criminaliser tout soutien aux résistances populaires de ces pays et pour légitimer les guerres dites « anti-terroristes » et « anti-islamistes » et ce, au nom du fameux « choc des civilisations ».

Les racines profondes de l’islamophobie en occident

On peut remonter à ce niveau jusqu’aux Croisades. Urbain II lors du Concile de Clermont en 1095 promet l’indulgence plénière, pour ceux qui partiront "délivrer les frères d’Orient" et Jérusalem alors entre les mains des musulmans . Il évoque les "malheurs de chrétiens d’Orient" et appelle ceux-ci à cesser de se faire la guerre et à s’unir pour combattre les "païens". On peut remarquer à ce propos cette constante dans les discours dominants d’aujourd’hui ; les élites politiques et les médias n’ont de cesse de déplorer le sort des chrétiens d’Irak ou de Palestine qui seraient « opprimés » dans les pays arabes dominés par l’islam. Au delà du problème de fond qui peut se poser, cette identité de discours à travers les siècles pour justifier l’expansionnisme occidental est frappante.

La propagande des croisades affublait les musulmans d’idolâtrie, d’immoralité et même de louer et justifier la violence, alors que les chrétiens eux-mêmes faisaient l’apologie de la guerre pour rassembler et recruter des chevaliers sous la bannière du Christ. Le Prophète Mohammed (pbsl) était décrit dans les légendes médiévales par les auteurs médiévaux comme un guerrier assoiffé de sang tenant une épée dans une main et le Coran dans l’autre. Là encore, on peut constater cette similitude du discours avec l’attitude contemporaine envers le Prophète (pbsl). De sa description avec une épée ensanglantée aux caricatures danoises où il est représenté avec une bombe en guise de turban, peu de choses ont changé dans la conscience occidentale.

A partir du milieu du XVIIIe siècle l’intérêt croissant de l’Occident pour l’Orient donne naissance au un courant culturel, littéraire que l’on nomme « orientalisme » et qui a pour objectif de connaitre et de développer un savoir sur ce que l’on désigne comme « les orientaux » c’est-à-dire les peuple arabes et musulmans. Ces orientalistes vont construire tout un imaginaire et tout un système de pensée sur l’islam et le monde arabe qui fera autorité et qui va se nourrir toujours plus de préjugés et de représentation sur les musulmans.

On peut citer comme exemple Voltaire qui, en ayant lu sur l’islam et ce qu’on en rapportait dans les bibliothèques orientalistes, écrit une pièce le « Fanatisme ou Mahomet » où il considère le prophète ’pbsl) comme un imposteur, un fanatique, un hypocrite. Ou encore un grand écrivain orientaliste nommé Ernest Renan qui dans l’essentialisation et la caricature incessante des musulmans et des arabes va décréter que l’islam et les musulmans sont « par nature » incapables de « progrès ».

L’orientalisme va préparer le terrain à la conquête politique coloniale de ces peuples musulmans ou "orientaux" qu’on a réussi à désincarner et déshumaniser durant des dizaines d’années à coup de littérature, de peinture et d’érudition. Là encore, la colonisation va être un vecteur puissant d’islamophobie, elle se légitime même dans le constat du statut inférieur des musulmans et de l’Islam par rapport à la vertu civilisatrice de l’action française et de la religion catholique. L’Église a joué dans ce sens un rôle de premier ordre à travers son action d’évangélisation des « indigènes » et le rôle de ses missionnaires plus particulièrement en Algérie, et au Maghreb. Particulièrement visée, la femme musulmane a fait l’objet de violents stéréotypes coloniaux et islamophobes. Ainsi la femme musulmane colonisée était victime d’un « oubli » dans lequel la plongeait l’islam, le voile, l’homme musulman et les traditions et la France dans son extrême générosité allait « l’émanciper ». Sur le voile, rien de nouveau, on voit donc une pérennisation du discours encore aujourd’hui avec le débat qui a précédé la loi du 15 mars contre le voile.

Par la suite et dans le contexte de décolonisation, le renouveau de la pensée religieuse impulsé dès la fin du XVIIIe siècle par la Nahda de Jamal Al Dîn Al Afghani et Mohamed Abdou en Egypte va avoir des effets politiques importants. Il va influencer les mouvements nationalistes comme le Néo-destour tunisien et plus encore l’Istiqlal marocain d’Allal El Fassi. Ainsi les mouvements de Libération Nationale dans les pays musulmans colonisés étaient très imprégnés idéologiquement de l’Islam. Or, beaucoup d’européens alors même qu’ils se définissaient comme anti colonialistes ont presque systématiquement eu du mépris à reconnaître ce rôle de l’islam dans le processus de libération. Par rejet du religieux en général mais qui cachait une sensibilité particulièrement pour l’islam, ils ont nié cette dimension alors qu’il est évident que beaucoup de résistants se battaient au nom de leur islamité. On le voit pour la Révolution Algérienne où ils se désignaient comme « moudjjahidine ».

L’islamophobie et l’impérialisme occidental contemporain

Cette trame de fond historique est très importante pour comprendre la période contemporaine et comment l’Occident utilise toujours les mêmes mécanismes pour déployer son impérialisme et mettre certains pays sous tutelle.Les stéréotypes islamophobes justifiant l’ingérence et l’expansionnisme occidental prennent aujourd’hui d’autres formes. Ils sont plus subtils, moins directs.

Ainsi, la théorie du « choc des civilisations » a t-elle nourri ce racisme envers les peuples musulmans et donné une légitimité politique aux guerres impérialistes de l’Occident. En 1996, Samuel Huntington écrit un ouvrage qui se propose de décrypter le fondement des nouvelles relations internationales après l’effondrement de l’Empire Soviétique. Selon lui, le clivage à l’avenir n’est désormais plus strictement politique ou idéologique, comme il l’était avant entre le bloc soviétique et le bloc de l’Ouest, mais aussi culturel et civilisationnel. Il existe notamment, selon lui, un conflit majeur entre la civilisation occidentale et l’Islam provoqué par ce dernier qui chercherait à dominer, à s’imposer, à se « totalitariser ».

Ces travaux peuvent être considérés comme une déclaration de guerre « idéologique » à l’islam qui se trouvait d’autant plus justifiée que, le 11 septembre, surviennent les attentats à New York. Une grosse propagande idéologique et politique s’est alors mis en marche. L’islam était le problème et il fallait s’en occuper car il en allait de la « survie » des valeurs démocratiques occidentales.

Cette propagande a redéployé tous les clichés islamophobes et racistes pour conquérir l’Afghanistan et l’Irak et introduire les concepts nouveaux de « « guerre préventive » ou de « guerre contre le terrorisme ». Cet impérialisme, qui s’inscrit dans la tradition coloniale européenne, ne fait que se draper d’un discours moins direct qui vise soi-disant une minorité, « les fous de Dieu », car on prend bien soin de ne pas généraliser. Il y a les « obscurantistes musulmans » d’un coté et les « modérés » de l’autre, les « fanatiques religieux » et les « progressistes ». Mais si on utilise tout ce vocable, c’est simplement pour adopter un racisme acceptable, légitimer un colonialisme et des invasions illégales pour assujettir des peuples et imposer une hégémonie occidentale (politique, économique, culturelle, militaire) aux derniers « indigènes ».

Cette criminalisation de l’islam pour justifier l’occupation trouve une illustration importante dans la question palestinienne. Ainsi pour masquer le problème de fond qui est, dès l’origine, une colonisation d’une Terre et d’un Peuple, on opère un glissement dans la contradiction fondamentale entre une colonisation illégitime et une résistance légitime à cette colonisation, et on crée de toute pièce une nouvelle opposition qui serait celle du combat de la démocratie (représentée évidemment par l’entité sioniste) contre les islamistes « intégristes » du hamas...

Ce qui est intéressant de constater, c’est comment on inscrit un conflit qui est politique dans cette théorie du choc des civilisation, ou on présente ce qu’on nomme « Israël » comme une sorte de « rempart civilisationnel » à l’Islam et à la culture arabe. D’ailleurs si l’occident soutient « Israël » d’une manière aussi indéfectible, c’est dans cette optique de soutenir une base avancée au Machrek pour mettre en pratique une politique hégémonique dans le monde arabe et musulman, et ce, dans la plus parfaite tradition coloniale.

Une autre dimension importante, c’est cette tendance en France à se servir de l’islamophobie pour criminaliser le soutien aux résistances populaires dans les pays soumis à l’impérialisme et au colonialisme. Par exemple, le refus de soutien à la résistance palestinienne se donne comme vitrine le refus de l’islamisme. Les Palestiniens qui résistent contre l’occupation sioniste sont dénoncés dans les médias occidentaux pour leur « fanatisme » religieux. En s’appuyant sur l’islamophobie, on absout le terrorisme véritable qui est celui de l’entité sioniste.

Surtout on ethnicise et on islamise le soutien à la résistance palestinienne, dans le but de se servir des clichés islamophobes. Le soutien à la Palestine et à la lutte du peuple palestinien est infantilisé et amputé de sa dimension politique. Il ne s’expliquerait plus que par des causes « religieuses ». Ce discours s’est notamment développé lors de la forte mobilisation en France pendant la guerre de Gaza ou on qualifiait les jeunes de banlieues, très impliqués, de « communautarisme », ou encore de « jeunes instrumentalisés », « d’intégristes ». On occulte sciemment que c’est parce que la colonisation est un vécu familial dans les familles maghrébines de l’immigration et parce que ces enfants d’immigrés subissent quotidiennement les discriminations racistes en France qu’ils développent une sensibilité particulière à la Palestine. En comparant les deux situations, ils constatent que la même idéologie coloniale est oeuvre. Le facteur culturel ou religieux expliquant le soutien massif des habitants de banlieue est également présent, mais pas du tout dans le sens où la propagande islamophobe souhaite le montrer, et il n’est surtout pas le seul.

En conclusion, il important de souligner qu’on ne peut pas lutter contre l’islamophobie en France si on ne donne pas de perspectives internationales à cette lutte, si on on ne lutte pas contre la fonction politique impérialiste de l’islamophobie pour l’Occident et la France. Si on ne fait pas ce lien, on ne luttera pas efficacement contre cette islamophobie et surtout on crée un problème théorique de taille dans l’analyse que l’on fait de ce racisme particulier. Les classes dominantes en France se servent de l’islamophobie par nécessité sociale, car on légitime moralement la relégation sociale et l’exploitation économique des musulmans en France. En même temps on criminalise le soutien que ces musulmans portent à la résistance des pays colonisés. Donc la question de la lutte contre l’islamophobie en France et de la cause anticolonialiste et anti-impérialiste sont intrinsèquement liées.

Lutter contre l’islamophobie, c’est aussi lutter pour la Palestine, contre l’occupation en Irak et en Afghanistan. C’est refuser tout impérialisme, tout colonialisme de l’Occident et de la France dans le monde arabe et musulman en particulier. C’est se donner une globalité nécessaire aux perspectives de lutte. Car il n’est certainement pas dans l’intérêt des dominants de nous voir faire des liens entre les luttes et de comprendre cette logique articulée dans les comportements de domination.

Source: Coordination contre le racisme et l'islamophobie

mardi 6 avril 2010

LOCKOUT AU JOURNAL DE MONTRÉAL: Résolution spéciale adoptée par le Comité central du Parti communiste du Canada les 27 et 28 mars 2010

À leur dernière réunion, les membres du Comité central du Parti communiste du Canada ont adopté une résolution de soutien à la lutte des 253 travailleuses et travailleurs du Journal de Montréal. Depuis le 24 janvier 2009, les personnels de bureau et de la rédaction, subissent un lockout décrété par leur employeur, Pierre-Karl Péladeau, grand patron de l’empire Québécor et propriétaire du Journal de Montréal.
L’objectif de Péladeau est de faire accepter de force à ses employés des reculs majeurs dans leurs conditions de travail, en éliminant entre autres une centaine de postes au département des petites annonces, majoritairement occupés par des femmes, pour les remplacer par de la sous-traitance, en imposant la mobilité dans les tâches, et en permettant à l’ensemble de ses entreprises de presse d’alimenter le contenu du Journal de Montréal, allant ainsi à l’encontre des règles d’éthiques journalistiques qui visent à assurer au public à une information de qualité aux sources variées. Depuis le début du conflit, Péladeau exige près de 233 demandes de reculs dans la convention collective et refuse toute véritable négociation.

Péladeau invoque « une crise des médias » pour justifier ses agissements, mais ce n’est qu’un prétexte car en réalité le Journal de Montréal avait réalisé des bénéfices de $50 millions en 2008 (sur un chiffre d’affaire de $200 millions). Péladeau ne se gène pas de faire état publiquement de ses positions antisyndicales. Il détient un record de lockouts dans les entreprises de son empire, toujours dans le but d’étrangler les syndicats dans d’interminables conflits.

Comme dans le conflit de Vidéotron en 2002 qui avait duré presqu’un an et celui du journal de Québec qui a duré 16 mois, Péladeau a préparé son coup en prévision d’un long conflit. Ainsi, durant les mois précédant son lock-out, il a doublé le nombre de cadres, il a agrandi la salle de nouvelles du quotidien gratuit 24 heures, et il a créé une nouvelle agence de presse de façon à pouvoir contourner la loi anti-scab du Québec. De plus, il a essayé d’imposer aux journalistes pigistes des contrats d’exclusivité par lesquels ceux-ci auraient abandonné leurs droits d’auteur à Québécor qui aurait pu ainsi utiliser leurs textes pour le Journal de Montréal en dépit du conflit.

Grâce à ces manœuvres, le Journal de Montréal est produit quotidiennement sans ses artisans, comme s’il n’y avait pas de conflit. Québécor se joue ainsi des règles et des lois du Québec avec le mépris le plus profond, alors que son entreprise a pourtant bénéficié largement du soutien de l’État, des fonds publics et de la Caisse de dépôt pour devenir le monopole qu’il est aujourd’hui dans les domaines de l’information et des communications. Québécor avait bien déjà été reconnu coupable d’avoir utilisé des briseurs de grève durant le conflit du Journal de Québec, mais ce jugement n’est survenu qu’une fois le conflit terminé.

Afin de résister à l’agression patronale et d’offrir une alternative au public, le syndicat produit un journal sur le web, Rue Frontenac. De son côté, la centrale syndicale à laquelle le syndicat est affilié, la CSN, lançait le 26 février dernier une importante campagne d’appui aux 253 lock-outés. En plus d’intervenir auprès des élu-es de tous les paliers, la CSN invite la population à signer une pétition qui demande au gouvernement de « mettre en branle tous les moyens dont il dispose afin de favoriser, dans les meilleurs délais, un règlement négocié et satisfaisant pour les parties (nomination d’un médiateur spécial, intervention législative en vue de rééquilibrer le rapport de force, etc.) ».

Le Parti communiste du Canada exige du Gouvernement du Québec qu’il renforce et fasse respecter l’esprit des dispositions anti-briseurs de grève du Code du travail du Québec.