mercredi 30 avril 2008

Contre la crise du capitalisme et la guerre, bâtissons une riposte unifiée!

Déclaration du Parti communiste du Canada à l’occasion du 1er mai


Nous célébrons aujourd'hui le 1er mai, Journée internationale de solidarité et de lutte de la classe ouvrière, dans un contexte où les travailleuses/eurs au Canada et partout dans le monde font face à d'immenses défis. Le capitalisme mondial a créé une crise systémique qui a atteint une phase nouvelle et menace chaque jour davantage l'avenir de l'humanité et la vie elle-même sur notre planète.

Dans sa course prédatrice aux profits, le capital financier international engendre des contradictions. Cherchant à amasser et à concentrer toutes les richesses, il intensifie l'instabilité économique et la précarité à l'échelle mondiale. Et aujourd'hui, les États-Unis sont frappés par une récession grandissante, qui se répand hors de tout contrôle partout dans le monde comme un feu de prairie. Des évaluations prudentes indiquent que la crise actuelle causée par la réduction du crédit hypothécaire a entraîné des pertes de plus d’un billion de dollars et que les dégâts ne font qu'augmenter. Ayant atteint son plus bas niveau depuis 16 ans au Canada, la croissance économique est au point mort dans de nombreux pays. Les prix de l'énergie et des produits alimentaires grimpent en flèche alors que s'effondrent l'infrastructure industrielle de l’économie, les programmes sociaux et le niveau de vie véritable de la plupart des travailleuses/eurs.

Dans le "tiers-monde", les conditions de vie de milliards de personnes sont devenues absolument insupportables. Les récentes émeutes provoquées par la crise alimentaire dans un certain nombre de pays prouvent indéniablement que ce système est incapable de subvenir de façon satisfaisante aux besoins essentiels de la majorité de l'humanité, que sont la nourriture, les vêtements et le logement.

De façon toujours plus désespérée, les cercles dirigeants des principaux pays impérialistes réagissent en appliquant des politiques catastrophiques de représailles sociales, d'attaques contre les droits démocratiques, de militarisme et de guerre pour essayer de maintenir et d'étendre leur domination.

Mais les défenseurs actuels du capitalisme ne réussiront pas éternellement à endiguer les vagues montantes de la résistance ouvrière et populaire. Les luttes historiques contre le néolibéralisme et le pillage impérialiste ont pris de l'ampleur à travers l'Amérique latine. Elles constituent un brillant exemple pour les travailleuses/eurs et pour les peuples opprimés partout dans le monde. En ce 1er Mai, nous exprimons notre solidarité à l'égard de toutes les forces progressistes et anti-impérialistes du monde, en particulier à Cuba et aux autres pays socialistes, ainsi qu’au mouvement communiste international, qui, face à de tels périls, luttent pour aider à forger un autre monde, meilleur et plus juste.

Dans notre pays aussi la classe ouvrière doit prendre l’initiative sociale et politique de contrecarrer l'effet dévastateur de l'offensive capitaliste. Nos luttes sont nombreuses : nous luttons pour sauver nos emplois, améliorer notre niveau de vie, sauvegarder nos programmes sociaux, arrêter le démantèlement de notre souveraineté, défendre et renforcer nos droits syndicaux, l'équité et les droits démocratiques, lutter comme l'exige notre devoir contre les agressions et les guerres perpétrées en Afghanistan, en Irak, en Haïti et ailleurs. Il est devenu crucial de joindre nos efforts pour construire un mouvement uni de riposte visant à expulser Harper et les conservateurs du gouvernement. Les prochains congrès du Congrès du Travail du Canada (CTC) et de la Confédération des syndicats nationaux (CSN) seront des occasions cruciales pour le mouvement ouvrier, allié aux mouvements populaires, de lancer une pareille contre-offensive.

Comité éxécutif central
Parti communiste du Canada
1er Mai 2008

jeudi 24 avril 2008

Abandon ou progrès du socialisme ? Changements à Cuba

Salim Lamrani
Les médias occidentaux triomphants ont présenté la levée de restrictions à la consommation à Cuba comme le signe d’un renversement du système économique, du socialisme vers le libéralisme, à la faveur de l’abandon du pouvoir par Fidel Castro. En réalité, observe Salim Lamrani, ces restrictions ont été abrogées parce qu’elles sont devenues inutiles, Cuba ayant trouvé de nouveaux partenaires pour redynamiser son économie malgré le blocus US. Loin de marquer une rupture politique, ces réformes —qui ont fait l’objet de vastes débats préalables— manifestent la volonté des Cubains de parvenir au développement en conservant leur approche économique.
La presse occidentale a été prolixe au sujet des changements survenus à Cuba suite à l’élection de Raúl Castro à la présidence de la République et s’est réjouie d’une éventuelle libéralisation de l’économie de l’île [1]. Mais cette réalité a été traitée, comme toujours dès lors qu’il s’agit de Cuba, de manière superficielle et erronée. Que ce soit au sujet de l’acquisition des appareils électriques, des hôtels, des téléphones portables, les restrictions qui étaient en vigueur il y a peu avaient des explications rationnelles, mais celles-ci n’ont pas été abordées par les transnationales de l’information. En réalité, un intense débat avait été lancé au début de l’année 2008, peu avant la décision de Fidel Castro de ne pas se représenter, dans le but d’améliorer le socialisme cubain. Il avait impliqué l’ensemble de la population et avait généré 1,3 millions de propositions.
Les appareils électriques

Les médias ont annoncé en fanfare que désormais les Cubains étaient libres d’acquérir des appareils électriques et électroménagers, sous-entendant qu’ils étaient complètement interdits à la vente auparavant [2]. Or la réalité est sensiblement différente. La vente de ces articles n’a jamais été prohibée à Cuba mis à part certains produits à forte consommation d’énergie tels que les cuisinières électriques et les micro-ondes, à une époque où la production énergétique de Cuba était insuffisante pour couvrir les besoins de la population.

En effet, pendant la période spéciale qui a débuté en 1991, suite à la désintégration du bloc soviétique, Cuba s’est retrouvée seule face au marché international et a dû faire face à la disparition de plus de 80 % de son marché extérieur, mais également à la recrudescence de l’implacable agression économique de la part des États-Unis. Dans ce contexte extrêmement difficile, l’île des Caraïbes a été frappée par de nombreuses pénuries, notamment au niveau de l’énergie, ce qui entraînait de longues coupures de courant. Par conséquent, les autorités avaient limité la vente des appareils électriques dévoreurs d’électricité. Ces restrictions étaient parfaitement justifiées. En effet, il aurait été irresponsable de procéder autrement car le système énergétique, fortement subventionné, aurait été en faillite.

Grâce à l’ingéniosité des Cubains, aux efforts consentis par la population et aux nouvelles relations commerciales avec des pays tels que le Venezuela et la Chine, Cuba dispose d’une économie plus forte et a réussi à résoudre son problème d’énergie. Grâce à la « Révolution énergétique » lancée en 2006 qui a consisté à remplacer les ampoules, les anciens appareils électroménagers tels que les télévisions, les réfrigérateurs, les ventilateurs et autres objets électriques, par des produits plus modernes et à moindre consommation, des millions de Cubains ont pu bénéficier de toute une gamme de produits électroménagers neufs à des prix subventionnés par l’État, donc en dessous du prix du marché.

Les économies d’énergie réalisées permettent désormais de faire face à la demande de la population, ce qui explique l’élimination progressive des restrictions au niveau de l’acquisition de nouveaux appareils électroménagers, d’ordinateurs et autres appareils vidéos. Les Cubains ont ainsi accès à un plus grand choix de biens de consommation. Ainsi, les limitations s’expliquaient uniquement par un facteur d’ordre économique, c’est-à-dire un manque de production énergétique. La presse occidentale n’a pas daigné mettre en avant ces éléments dans son traitement du sujet.

Les médias se sont empressés de souligner, à juste titre, que de nombreux Cubains ne pourraient pas avoir accès aux articles en vente au prix du marché, à cause de leur prix élevé par rapport au salaire relativement modeste en vigueur à Cuba. Néanmoins, cette réalité concerne une immense partie de la population mondiale qui vit dans la pauvreté et dont les principales préoccupations ne sont pas d’acquérir un lecteur Dvd ou un micro-ondes mais de manger trois fois par jour et d’avoir accès à la santé et à l’éducation, angoisses inexistantes à Cuba.

Ainsi, selon le dernier rapport de l’organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) sur l’insécurité alimentaire dans le monde, 854 millions de personnes à travers la planète dont 9 millions dans les pays industrialisés souffrent de malnutrition [3]. Sur le continent américain seuls trois pays ont déjà atteint les objectifs du Sommet mondial de l’alimentation (SMA) 2015 : Cuba, la Guyana et le Pérou [4]. Selon l’UNESCO, actuellement, un adulte sur cinq dans le monde n’est pas alphabétisé, soit 774 millions de personnes, et 74 millions d’enfants sont privés d’école [5]. D’après l’UNICEF, chaque jour, plus de 26 000 enfants de moins de cinq ans meurent de faim ou de maladie curable, soit 9,7 millions par an [6]. Aucun Cubain ne fait partie de ces listes.

La mise en perspective de la réalité cubaine avec la problématique latino-américaine et du tiers-monde est toujours éludée par les transnationales de l’information car elle est édifiante et conduit inévitablement à la nuance.
Les téléphones portables

L’accès au téléphone portable a également été élargi à Cuba pour diverses raisons [7]. La première est d’ordre économique et la seconde d’ordre technologique. L’accès au téléphone portable a été massifié à travers le monde occidental dans les années 1990.

À cette époque, Cuba avait d’autres priorités que de fournir un accès à la téléphonie mobile à la population. Les défis concernaient alors l’alimentation, le transport et le logement. Le problème alimentaire est désormais résolu à Cuba. Pour ce qui est du transport, il est en passe d’être solutionné, notamment grâce à l’importation de nombreux bus chinois. Quant au logement, il s’agit sans doute de la principale difficulté à laquelle est confrontée la population.

Là encore, il ne s’agit pas d’une spécificité cubaine. La réalité est la même dans une ville du monde développé telle que Paris, à une différence près : à Cuba, il s’agit d’un manque de logement dû aux sanctions économiques états-uniennes qui empêchent la construction de 100 000 logements de plus par an, alors que les Parisiens doivent faire face une absurde aberration. En effet, plus de 100 000 logements, propriété de classes aisées, sont vacants à Paris alors que 100 000 familles sont à la recherche d’un toit. Une loi de réquisition existe pourtant mais elle n’est jamais appliquée par les autorités. A Cuba, les citoyens n’accepteraient jamais un tel scandale [8].

En France, selon le Ministère du Logement, 1,6 millions de personnes vivent dans des logements sans douche ou sans toilettes. Plus d’un million de Français sont logés en « situation de surpeuplement accentué », 550 000 personnes vivent dans des hôtels dont 50 000 enfants, 146 000 dans des maisons mobiles et 86 000 sont sans domicile et vivent dans la rue [9]. Pourtant, près de deux millions de logements sont vacants en France, dont 136 554 à Paris. Autre aberration : seuls 32 000 logements à Paris payent la taxe pour le logement vacant alors que plus de 136 000 sont concernés. Mais les autorités préfèrent fermer les yeux [10].

Pour en revenir au téléphone portable, le second obstacle était d’ordre technologique (c’est toujours le cas pour l’accès à Internet car Washington empêche Cuba de se connecter au câble à fibre optique du Détroit de Floride qui lui appartient). Cuba dispose d’une connexion satellitaire limitée qui, de surcroît, est extrêmement coûteuse. C’est la raison pour laquelle l’accès au téléphone portable avait été restreint. Avec l’amélioration de la situation économique, l’offre est désormais étendue à toute la population, même si les tarifs restent très élevés. Là encore, si le téléphone portable est largement répandu en Occident, il reste un luxe pour de nombreux habitants du Tiers-monde.
L’accès aux hôtels

Pour ce qui concerne les hôtels, les médias ont également fait preuve de partialité. Jusqu’au 1er avril 2008, l’accès aux hôtels de luxe était, non pas interdit comme l’a affirmé la presse occidentale, mais restreint. Ici, l’explication est d’ordre social et économique.

Dans les années 1990, la résurgence d’un phénomène qui avait été éradiqué au triomphe de la Révolution en 1959 avait fortement préoccupé les autorités : la prostitution. Pour essayer d’endiguer ce problème qui a surgi des difficultés auxquelles ont dû faire face les Cubains, le gouvernement de La Havane avait décidé de limiter l’accès de la population aux infrastructures touristiques. Grâce au labeur des travailleurs sociaux et à l’amélioration de la situation économique, ce phénomène social, s’il n’a pas encore complètement disparu, a été fortement atténué.

La seconde explication est d’ordre économique. En effet, avec le développement vertigineux du tourisme à partir des années 1990, la capacité hôtelière cubaine s’est révélée insuffisante pour accueillir à la fois les étrangers et les Cubains. Les autorités ont privilégié l’accueil des étrangers, surtout en haute saison, en partant d’un raisonnement économique. Un touriste dont on ne pourrait satisfaire les demandes de villégiature irait dépenser son argent ailleurs, ce qui génèrerait un manque à gagner pour l’économie cubaine. Par contre, la petite catégorie de Cubains qui dispose des ressources nécessaires pour se payer un hôtel de luxe dépenserait son argent dans d’autres secteurs mais celui-ci resterait à Cuba.

La presse occidentale s’est également attardée sur les tarifs relativement prohibitifs pour le Cubain moyen. Selon l’Associated Press, très peu de Cubains peuvent se payer une chambre à 173 dollars la nuit dans l’hôtel Ambos Mundos (quatre étoiles) de La Vieille Havane, l’un des plus prestigieux établissements touristiques de la capitale qui était le favori d’Ernest Emingway [11]. Elle a raison. Mais elle oublie, encore une fois, de souligner que l’accès à une chambre d’hôtel de renom est un luxe pour tous les habitants du tiers-monde, mais également pour une large catégorie des citoyens vivant dans des pays développés. À titre de comparaison, combien de Français, par exemple, peuvent se payer une chambre à 730 euros (la moins chère) au Ritz (cinq étoiles) de Paris [12] ?
Libéralisation économique ?

Faut-il voir pour autant dans ces réformes une certaine libéralisation de l’économie cubaine [13] ? Ce serait une erreur que de penser cela. Il faut rappeler que dans les années 1980 les Cubains avaient abondamment accès aux biens de consommation. Il s’agit simplement de la suppression de restrictions qui n’avaient plus raison d’être. D’autres devraient rapidement suivre. Ainsi, le gouvernement a décidé de louer des terres non cultivées à des petits producteurs privés afin d’accroître la production agricole, à l’heure où les prix des matières premières ont atteint des sommets [14].

Les véritables changements à Cuba sont survenus en 1959 et l’île est en évolution perpétuelle depuis cette date. La critique y est constante et il suffit de lire la presse nationale pour s’en convaincre, notamment les quotidiens Juventud Rebelde et Trabajadores dont le ton est extrêmement incisif et sans concessions. Il y a indéniablement, parmi les hauts dirigeants, une volonté politique de susciter le débat. La fille de Raúl Castro, Mariela Castro, sexologue qui défend les droits des minorités gay et lesbienne, a plaidé en faveur du « socialisme, mais avec moins d’interdits [15] ». Mais les médias font semblant de ne pas s’apercevoir de cette réalité. Contrairement à ce que prétendent — et espèrent — les transnationales de l’information, Washington et l’Union européenne, les Cubains ne reviendront pas à une économie de marché mais poursuivront leurs efforts dans la construction d’un socialisme moderne, plus juste et plus rationnel.
Salim Lamrani
Enseignant, écrivain et journaliste français, spécialiste des relations entre Cuba et les États-Unis. Auteur de Cuba face à l’empire : Propagande, guerre économique et terrorisme d’État, dernier ouvrage publié en français : Double Morale. Cuba, l’Union européenne et les droits de l’homme.
Les articles de cet auteur
Envoyer un message



[1] Will Weissert, « Raul’s Reforms May Strengthen Communism », The Associated Press, 2 avril 2008.

[2] Will Weissert, « Castro Reforms : Dvd’s, Farms for Cubans », The Associated Press, 2 avril 2008.

[3] Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, L’état de l’insécurité alimentaire dans le monde 2006 (Rome : FAO, 2006), p. 8.

[4] Ibid., p. 17.

[5] Institut de statistique de l’UNESCO, « Alphabétisme », 9 octobre 2007 (site consulté le 15 avril 2008).

[6] UNICEF, La situation des enfants dans le monde 2008. La survie de l’enfant (New York, décembre 2007), p. 1.

[7] The Associated Press, « Cuban Restrictions Eased By Raul Castro », 2 avril 2008, Will Weissert, « Cubanos hacen largas filas para comprar celulares », The Associated Press/El Nuevo Herald, 15 avril 2008.

[8] Droit au Logement, « Le logement en chiffres : exclusions et inégalités », 2002. (site consulté le 15 avril 2008).

[9] Ministère du Logement, de l’Équipement et des Transports, Questionnaire de la Commission de la Production et des Échanges. Projet de LFI pour 2001 & INSEE, Enquête 2001 sur la population « fréquentant les services d’hébergement et les distributions de repas chauds », in Droit au Logement, op. cit.

[10] Droit au Logement, op. cit.

[11] Will Weissert, « Thanks Raul : Cubans Can Stay in Hotels », The Associated Press, 1er avril 2008.

[12] Hôtel Ritz Paris, « Tarifs ». (site consulté le 15 avril 2008).

[13] Reuters, « Les téléphones portables désormais autorisés à Cuba », 14 avril 2008.

[14] The Associated Press, « Cuba Lends private Farmers Unused Land », 1er avril 2008 ; Andrea Rodriguez & Will Weissert, « Communiste Cuban Solution : Private Farms », 5 avril 2008.

[15] Alessandra Coppola, « Socialismo, ma con meno proibizioni », Corriere della Sera, 27 mars 2008.

Révoltes internationales contre la vie chère

22 avril 2008
Solidaire, Belgique

Le coût élevé de la vie et de l’alimentation provoque depuis plusieurs mois des luttes un peu partout dans le monde.

François Ferrara

« L’augmentation du nombre de pauvres Philippins est de la faute de Gloria ». Le très militant Kilusang Magbubukid ng Pilipina (KPM) pointe du doigt la politique antipauvre et antipopulaire de la présidente philippines Gloria Arroyo. (Photo www.arkibongbayan.org)

Au Mexique, début 2007, de nombreuses émeutes contre le prix de la galette de maïs, plat de base de la cuisine mexicaine, avaient été réprimées dans la violence. Depuis les accords de libre-échange, ce pays a connu un exode massif des paysans vers la ville. 30% d’entre eux ont fait faillite car leur exploitation agricole n’étant plus rentable par rapport aux prix des importations venant des USA. Le Mexique est passé du statut de pays exportateur au statut de pays importateur. Il a perdu sa souveraineté alimentaire.
Au Burkina-Faso, pendant une semaine en février 2008, le coût élevé de la vie a provoqué des émeutes dans trois grandes villes du pays. La hausse des produits de base est de 65%. Ces émeutes ont éclaté 15 jours après que le gouvernement eut annoncé des mesures « fermes » pour contrôler le prix des produits de base. On s’attendait à cette réaction a expliqué Laurent Ouédraogo, secrétaire général de la Confédération nationale des travailleurs : « La misère n’attend pas ; les gens voient les prix augmenter chaque jour et ne savent pas quoi faire. C’est comme si on avait des allumettes près d’un morceau de coton, susceptible de prendre feu à tout moment ».
La Côte d’Ivoire a aussi connu ce 31 mars 2008 une manifestation à Abidjan, la capitale, contre la vie chère fortement réprimée dans la violence. Les manifestants ont scandé « Nous avons faim, mettez un terme à nos souffrances », ou encore « La vie est trop chère, vous allez nous tuer », avant que la police anti-émeute ne balance des grenades lacrymogènes. Pour certains produits, les prix ont grimpé de pas moins de 30 ou 60 pour cent d’une semaine à l’autre. Malgré les appels à l’aide de la population, le gouvernement ne promet aucune mesure pour lutter contre la hausse des prix.
En Haïti, des foules de manifestants affamés ont pris d’assaut le palais présidentiel à Port-au-Prince, la capitale, lors de manifestations relatives aux prix des denrées alimentaires. Ces émeutes ont provoqué la mort d’au moins 4 personnes.
Au Yémen, les enfants ont défilé pour attirer l’attention sur leur faim.
Des protestations ont aussi lieu depuis le début de l’année en Bolivie, Ouzbékistan, Indonésie. Le Pakistan doit se résoudre au rationnement alimentaire dans plusieurs villes et le gouvernement a interdit l’exportation de riz. Cela a entraîné de nombreuses protestations de la part de la population.
En Argentine, les collectifs de citoyens se mobilisent pour réclamer que le gouvernement prennent des mesures contre la hausse des produits de base.
L’impact commence aussi à se faire sentir dans les pays riches. Un blé plus cher a causé de grosses augmentations du prix des pâtes et du pain, en Italie, où les associations de consommateurs ont organisé une grève d’une journée qui a réduit la consommation de pâtes de 5% le 13 septembre 2007. En Grande-Bretagne, le prix du pain augmente parallèlement à celui du blé. Outre l’Italie, la vague de grève et de manifestations a balayé la Belgique, la France, l’Allemagne, le Portugal. Aux USA, la distribution des bons alimentaires aux plus pauvres a doublé depuis début janvier.

vendredi 11 avril 2008

Réflexions de Fidel Casto

LA VICTOIRE CHINOISE

(Première partie)

Sans des rudiments de connaissances historiques, on ne comprendrait pas le thème que j’aborde.

En Europe, on avait entendu parler de la Chine. A l’automne 1298, Marco Polo raconta des choses merveilleuses d’un pays singulier appelé Catay. Christophe Colomb, un navigateur intelligent et audacieux, était au courant des connaissances que possédaient les Grecs au sujet de la rotondité de la Terre, et ses propres observations le faisaient coïncider avec ces théories-là. Il eut l’idée d’atteindre l’Extrême-Orient en naviguant vers l’Ouest depuis l’Europe. Il fut excessivement optimiste dans ses calculs des distances, plusieurs fois supérieures. Sans le savoir, ce continent-ci se mit en travers de sa route entre l’océan Atlantique et l’océan Pacifique. Magellan, lui, fit le voyage qu’il avait conçu, mais il mourut avant de pouvoir regagner l’Europe. Grâce à la valeur des épices qu’il avait recueillies, il put payer l’expédition de plusieurs navires, dont un seul rentra. C’était le préambule de futurs profits colossaux.

Dès lors, le monde commença à changer à toute allure. On vit reparaître de vieilles formes d’exploitation, depuis l’esclavage jusqu’à la servitude féodale ; des vieilles ou de nouvelles convictions religieuses s’étendirent à travers la planète.

C’est de ce brassage de cultures et de faits, accompagné des avancées de la technique et des découvertes de la science, que naquit le monde actuel, que l’on ne saurait comprendre sans un minimum d’antécédents réels.

Le commerce international, avec ses avantages et ses inconvénients, était imposé par les puissances coloniales comme l’Espagne, l’Angleterre et d’autres nations européennes qui, mais en particulier la seconde, eurent tôt fait de dominer le Sud-Ouest, le Sud et le Sud-Est de l’Asie, ainsi que l’Indonésie, l’Australie et la Nouvelle-Zélande, étendant partout leur domination par la force. Il ne restait plus aux colonisateurs qu’à soumettre le gigantesque pays chinois, à la culture plusieurs fois millénaire et aux ressources naturelles et humaines fabuleuses.

Le commerce direct entre l’Europe et la Chine démarra au XVIe siècle, après que les Portugais eurent établi les enclaves commerciales de Goa, en Inde, et de Macao, au sud de la Chine.

La domination des Philippine par l’Espagne facilita et accéléra les échanges avec le grand pays asiatique. La dynastie Qing, qui gouvernait la Chine, tenta de limiter dans toute la mesure du possible ce genre d’opérations commerciales avec l’extérieur qui ne lui étaient pas favorables. Elle ne le permit qu’à travers le port de Canton, aujourd’hui Guangzhou. La Grande-Bretagne et l’Espagne accusaient de gros déficits dans ce commerce, compte tenu de la faible demande de l’énorme pays asiatique, car tant les marchandises anglaises fabriquées dans la métropole que les produits espagnols provenant du Nouveau Monde ne lui était pas essentiels.

Les deux pays avaient toutefois commencé à lui vendre de l’opium. Le commerce à grande échelle de ce produit avait été dominé au départ par les Hollandais à partir de Jakarta, en Indonésie. Les Anglais, qui avaient constaté les profits qu’il rapportait – environ 400 p. 100 – firent passer leurs ventes d’opium de quinze tonnes en 1730 à soixante-quinze en 1773, le produit étant embarqué dans des caisses de soixante-dix kilos chacun, ce qui leur permettait d’acheter en retour de la porcelaine, de la soie, des condiments et du thé. Ce n’était pas l’or, mais l’opium qui servait de monnaie à l’Europe pour acheter des marchandises chinoises.

Au printemps 1838, constatant les terribles ravages que provoquait le commerce de l’opium, l’empereur Daoguang ordonna à Lin Zexu, un fonctionnaire impérial, de combattre ce fléau. Ce dernier fit donc détruire vingt mille caisses d’opium et adressa une lettre à la reine Victoria pour lui demander de respecter les normes internationales et d’interdire le commerce de drogues toxiques.

La réponse britannique fut les Guerres de l’opium, connues aussi comme les Guerres anglo-chinoises. La première dura trois ans, de 1839 à 1842 ; la seconde, à laquelle se joignit la France, quatre ans, de 1856 à 1860.

Le Royaume-Uni obligea la Chine à signer des traités inégaux par lesquels elle s’engageait à ouvrir plusieurs ports au commerce extérieur et à lui livrer Hong Kong. D’autres pays, suivant l’exemple anglais, imposèrent de termes d’échange inégaux.

Cette humiliation contribua à la rébellion des Taiping (1850-1864), à la révolte des Boxers (1899-1901) et finalement à la chute, en 1911, de la dynastie Qing qui, pour diverses raisons – entre autres sa faiblesse face aux puissances étrangères – était devenue extrêmement impopulaire en Chine.

Que se passait-il du côté du Japon ?

Ce pays, à la vieille culture et à la population très laborieuse – comme d’autres de la région – résistait à la « civilisation occidentale » et s’était maintenu hermétiquement fermé au commerce extérieur pendant plus de deux cents ans, entre autres motifs pour le chaos de son administration intérieure.

En 1854, au terme d’un voyage d’exploration antérieur mené par quatre canonnières, le commodore Matthew Perry, à la tête d’une force navale des Etats-Unis, menaça de bombarder la population japonaise, sans protection face à la moderne technologie de ces bâtiments, et obligea le shogun à signer, au nom de l’empereur, le traité de Kanagawa, le 31 mars 1854. C’est ainsi que débuta la greffe au Japon du commerce capitaliste et de la technologie de l’Occident. Les Européens ignoraient alors la capacité des Japonais à se débrouiller dans ce domaine.

Après les Yankees, arrivèrent, depuis l’Extrême-Orient, les représentants de l’empire russe qui redoutait que les Etats-Unis, auxquels il vendit ensuite l’Alaska (18 octobre 1867), ne prennent les devants dans les échanges commerciaux avec le Japon. La Grande-Bretagne et les autres nations colonisatrices européennes arrivèrent rapidement dans le même but.

Durant l’intervention des Etats-Unis au Mexique en 1862, ce même Perry occupa plusieurs parties de ce pays qui perdit finalement, au terme de la guerre, plus de la moitié de son territoire, justement les régions où s’accumulaient les plus grosses réserves de pétrole et de gaz, même si l’objectif principal des conquérants n’était pas alors les hydrocarbures, mais l’or et des territoires où s’étendre.

La première guerre sino-japonaise éclata officiellement le 1er août 1894. Le Japon souhaitait s’emparer de la Corée, un Etat tributaire de la Chine à laquelle il était subordonné. Doté d’armements et de techniques plus développés, il vainquit les forces chinoises au cours de plusieurs batailles proches de Séoul et de Pyongyang, puis de nouvelles victoires militaires lui ouvrirent la route vers le territoire chinois.

En novembre 1894, le Japon s’empara de Port-Arthur, aujourd’hui Lüshun. Son artillerie lourde détruisit la flotte du pays agressé qui fut surprise dans la base navale de Weihaiwei, à l’embouchure du Yalu, par une attaque terrestre depuis la péninsule du Liaodong.

La dynastie chinoise dut demander la paix et signer en avril 1895 le traité de Shimonoseki, qui mit fin à la guerre et par lequel la Chine fut contrainte de céder au Japon « à perpétuité » Formose, la péninsule du Liaodong et l’archipel des îles Pescadores, de lui payer une indemnisation de guerre de deux cent millions de taëls d’argent et d’ouvrir quatre ports à l’étranger. La Russie, la France et l’Allemagne, défendant leurs intérêts, obligèrent le Japon à restituer la péninsule du Liaodong, payant en échange trente autres millions de taëls d’argent .

Avant de passer à la seconde guerre sino-japonaise, je ne peux oublier un autre épisode militaire à double importance historique entre 1904 et 1905.

Une fois inséré dans la civilisation armée et les guerres pour le partage du monde imposées par l’Occident, le Japon, qui avait déjà livré sa première guerre contre la Chine, développa assez son pouvoir naval pour assener un coup dur à l’empire russe qui faillit provoquer prématurément la révolution prévue par Lénine quand il avait fondé, dix ans avant, le parti qui déclencherait plus tard la Révolution d’Octobre.

Le 10 août 1904, sans préavis, le Japon attaqua et détruisit la flotte russe du Pacifique à Shandong. Le tsar Nicolas II de Russie, furieux, ordonna à sa flotte de la Baltique de se mobiliser et d’appareiller vers l’Extrême-Orient. Des convois de bâtiments charbonniers furent engagés pour amener à temps les cargaisons dont avait besoin cette flotte tandis qu’elle naviguait vers sa lointaine destination. Une des opérations de transbordement de charbon dut se faire en haute mer à la suite de pressions diplomatiques.

Entrant dans la mer du sud de la Chine, les Russes se dirigèrent vers le port de Vladivostok, le seul disponible pour leurs opérations maritimes. Pour l’atteindre, trois routes se présentaient à la flotte : celle de Tsushima, qui était la meilleure variante, car les deux autres l’obligeaient de naviguer à l’est du Japon, ce qui aggravait les risques compte tenu de l’usure énorme des bâtiments et des équipages. C’est exactement ce que pensa l’amiral japonais qui, se préparant pour cette variante, situa ses navires, pour la plupart des croiseurs, de sorte qu’en faisant un virage en U, ils puissent défiler à environ six kilomètres des bâtiments russes, pour la plupart des cuirassés, dès lors à la portée de leurs canons servis par un personnel rigoureusement entraîné, d’autant que la flotte russe, à la suite de la longue route entreprise, ne naviguait qu’à huit nœuds contre seize la flotte japonaise.

On connaît cette bataille navale, qui se déroula les 27 et 28 mai 1905, comme la bataille de Tsushima.

Onze cuirassés et huit croiseurs y participèrent pour l’empire russe ; le chef de la flotte était l’amiral Zinovy Rodjestvensky ; bilan : 4 380 morts ; 5 917 blessés ; 21 bâtiments coulés, 7 capturés et 6 endommagés. L’amiral russe fut blessé au crâne par un fragment de projectile.

Quatre cuirassés et vingt-sept croiseurs y participèrent pour l’empire japonais ; le chef de la flotte était l’amiral Heichachiro Togo ; bilan : 117 morts ; 583 blessés ; 3 torpilleurs coulés.

La flotte de la Baltique fut détruite. Napoléon l’aurait qualifié d’Austerlitz maritime. On peut aisément supposer quelle profonde blessure ce fait dramatique a pu causer à la fierté et au patriotisme russes.

Après cette bataille, le Japon devint une puissance navale redoutée, à la hauteur de la Grande-Bretagne et de l’Allemagne, et rivalisant avec les Etats-Unis.

Le Japon revendiqua les années suivantes le concept de cuirassé comme arme principale. Il s’attacha à consolider la flotte impériale ; il commanda à des chantiers navals britanniques un croiseur spécial afin de le reproduire ensuite dans le pays, puis il fabriqua des cuirassés qui dépassèrent leurs homologues en blindage et en pouvoir de feu.

Dans les années 30, aucune autre nation n’était plus en mesure de faire concurrence au génie naval japonais dans la conception de bâtiments de guerre.

Ce qui explique la témérité avec laquelle le Japon attaqua un jour son maître et rival, les USA, dont le commodore Perry lui avait montré le chemin de la guerre.
Je continuerai demain.


Fidel Castro Ruz
30 mars 2008
19 h 35

LA VICTOIRE CHINOISE

(Deuxième partie)

En 1914, quand éclata la Première guerre mondiale, la Chine s’unit aux Alliés. En guise de compensation, ceux-ci offrirent de lui rendre à la fin du conflit les concessions allemandes dans la province de Shandong. Mais, une fois signé le Traité de Versailles que le président des Etats-Unis, Woodrow Wilson, imposa aussi bien aux ennemis qu’aux amis, les colonies allemandes furent cédées au Japon, un allié bien plus puissant que la Chine.

Devant une telle félonie, des milliers d’étudiants protestèrent sur la place Tienanmen le 4 mai 1919. C’est là que débuta le premier mouvement nationaliste à triompher en Chine, qui prit le nom du 4-Mai et réunit petite bourgeoise et bourgeoisie nationaliste, ouvriers et paysans.

Le courant nationaliste, qui avait surgi fin XIXe-début XXe siècles, se consolida avec la fondation du Kuomintang, autrement dit le Parti national du peuple dirigé par le docteur Sun Yat-sen, un intellectuel et révolutionnaire progressiste très influencé par la Révolution d’Octobre avec laquelle il resserra ses relations.

Le Parti communiste chinois vit le jour à un congrès qui se tint du 23 juillet au 5 août 1921 et auquel Lénine envoya des représentants de l’Internationale.

Le mouvement communiste s’attacha à réunifier la Chine. Parmi ses fondateurs, on trouvait le jeune Mao Zedong. C’est en 1923-1924 que se constitua le Front unique anti-impérialiste entre le PCC et le Kuomintang.

Sun Yat-sen étant décédé en mars 1925, son successeur Tchiang Kai-chek s’attacha à contrôler rigidement le Sud de la Chine, en particulier la région de Shanghai.

Tchiang Kai-chek, qui ne sympathisait pas avec la doctrine communiste, lança en 1927 une répression à grande échelle contre les communistes au sein de l’Armée nationale révolutionnaire, des syndicats et d’autres secteurs sociaux du pays, en particulier à Shanghai. Il réprima aussi fortement l’aile gauche du Kuomintang.

Après avoir occupé la Mandchourie pendant cinq ans, le Japon créa en 1932 l’Etat du Manzhouguo, ce qui constitua une grave menace pour la Chine. Cependant, Tchiang Kai-chek organisa cinq campagnes d’encerclement et d’extermination contre les communistes, qui se fortifièrent dans leurs bases du Sud du pays.

Réunissant ceux qui avaient réussi à échapper à la trahison de Tchiang Kai-chek en 1927, Mao Zedong se replia dans les montagnes des provinces du Jiangsu et du Fujian et y établit sur un vaste territoire le centre de sa résistance armée, à partir d’un puissant noyau de communistes conséquents et bien organisés : ce fut la République soviétique chinoise.

Faisant face aux forces nationalistes très supérieures de Tchiang Kai-chek, environ cent mille combattants chinois conduits par Mao entreprirent en 1934 ce qui fut connu comme la Longue Marche vers le Nord-Ouest en longeant le Centre, soit un trajet de six mille kilomètres qui dura une année et durant lequel ils durent constamment se battre. Cet exploit inouï fit de Mao le leader incontesté du Parti et de la Révolution en Chine. Son application des idées de Marx et de Lénine aux circonstances politiques, économiques, naturelles, géographiques, sociales et culturelles de la Chine le consacra comme un stratège politique et militaire de génie et fit énormément pour la libération d’un pays dont nul ne peut sous-estimer aujourd’hui le poids dans le monde.

La seconde Guerre sino-japonaise éclata le 7 juillet 1937, après que les Japonais eurent provoqué à dessein l’incident de départ : un soldat japonais ayant disparu quand son unité défilait sur le pont Marco Polo, qui traverse un fleuve situé à seize kilomètres à l’ouest de Pékin, ils en accusèrent l’armée chinoise qui se trouvait sur l’autre rive. L’affrontement qui s’ensuivit dura plusieurs heures. Presque aussitôt, le soldat reparut. Malgré la fausseté de l’accusation, le commandant japonais avait déjà donné l’ordre d’attaque. Faisant preuve de son arrogance coutumière, Tokyo exigea des conditions inacceptables pour la Chine puis dépêcha trois divisions équipées de leurs meilleures armes. En quelques semaines, l’armée japonaise contrôla le pas Est-Ouest depuis le golfe de Chihli – aujourd’hui Bo Hai – jusqu’à Pékin.

De Pékin, elle marcha sur Nankin (Nanjing), siège du gouvernement de Tchiang Kai-chek, déclenchant une des campagnes terroristes les plus horribles des guerres modernes : Nanjing et d’autres villes furent rasées ; des dizaines de milliers de femmes furent violées ; des centaines de milliers de personnes furent brutalement assassinées.

Le Parti communiste chinois avait donné la priorité à la lutte pour l’unité nationale face au plan du Japon de s’emparer de cet énorme pays et de ses ressources naturelles et de soumettre plus de cinq cent millions de Chinois à une servitude impitoyable. Le Japon était en quête d’espace vital. Sa conduite fut un mélange de capitalisme et de racisme, la version japonaise du fascisme.

Le Front uni antijaponais était déjà constitué en 1937. Les nationalistes eux aussi étaient conscients du danger. Le Japon occupa la plupart des villes côtières. A la fin de la Deuxième Guerre mondiale, les pertes chinoises se chiffreraient par millions.

Durant cette guerre épique, les communistes intensifièrent leur lutte contre les envahisseurs, leur causant des pertes sensibles.

Les Etats-Unis aidèrent les communistes et les nationalistes. Sur le point d’entrer à leur tour en guerre, ils demandèrent au gouvernement chinois l’autorisation de dépêcher une escadrille de volontaires. C’est ainsi que les Tigres volants virent le jour. Roosevelt envoya à leur tête le capitaine à la retraite Claire Lee Chennault, qui exprima son admiration devant la discipline, les tactiques et l’efficacité des combattants communistes.

Les Etats-Unis entrèrent finalement en guerre en décembre 1941, après l’attaque de Pearl Harbor. Toutefois, le Japon ne put déplacer à aucun moment de Chine ses troupes d’élite qui se montaient à un million de soldats en 1945.

Tchiang Kai-chek, que l’administration Truman – laquelle, en un acte de terreur, utilisa des armes atomiques sur la population civile du Japon – avait converti en l’homme fort des Etats-Unis, reprit sa guerre civile anticommuniste, mais ses troupes démoralisées ne purent résister à la vague irrépressible de l’Armée populaire chinoise.

Quand cette guerre-ci prit fin, en octobre 1949, les troupes de Tchiang Kai-chek, soutenues par les Etats-Unis et voyageant à bord de leur Septième Flotte, s’enfuirent à Taiwan où elles établirent un gouvernement anticommuniste pleinement soutenu par Washington.
La Chine serait-elle donc un « sombre recoin du monde » ?

Bien avant que Troie n’ait vu le jour et que L’Illiade et L’Odyssée, des créations assurément merveilleuses de l’intelligence humaine, ne circulent dans les villes-Etats grecques, une civilisation touchant des millions de personnes se développait déjà sur les vastes rives du Fleuve jaune.

La culture chinoise plonge ses racines dans la dynastie Zhou, qui remonte à deux mille ans avant notre ère. Son écriture particulière se base sur plusieurs milliers de signes graphiques représentant généralement des mots ou des morphèmes, un terme de la linguistique moderne peu connu du public non familiarisé avec ce thème. Nous sommes loin de comprendre la magie mystérieuse de cette langue dont l’apprentissage développe l’intelligence naturelle des enfants chinois.

De nombreux produits ayant vu le jour en Chine, comme la poudre, la boussole et d’autres, étaient absolument inconnus dans le Vieux Monde. Si les vents soufflaient en sens inverse de la route suivie par Colomb, les Chinois auraient peut-être pu découvrir l’Europe.

Taiwan est gouverné depuis 2000 par un parti dont la politique néolibérale et pro-impérialiste était encore pire que la politique traditionnelle du Kuomintang, farouchement opposé au principe d’une seule Chine proclamé historiquement par le Parti communiste. Cette question épineuse risquait de faire éclater une guerre aux conséquences imprévisibles, tel un moderne épée de Damoclès suspendue sur la tête de plus de 1,3 milliard de Chinois.

L’élection à Taiwan, le 23 mars dernier, du candidat de l’ancien parti qui fut la base politique de Tchiang Kai-chek, a constitué sans aucun doute, dans les faits, une victoire politique et morale de la Chine, car elle y écarte du pouvoir un parti qui, ayant gouverné presque huit années, était sur le point de faire de nouveaux pas funestes.

Selon les informations d’agences, sa défaite a été écrasante : seulement 4,4 millions de voix sur les 17 millions de personnes ayant le droit de vote.

Le nouveau président prendra possession le 20 mai. « Nous signeront un traité de paix avec la Chine », a-t-il déclaré.

Les dépêches annoncent que « Ma Ying-jeou est partisan de la création d’un marché commun avec la Chine, le principal partenaire commercial de l’île ».

La République populaire de Chine fait preuve de dignité et de prudence sur cette question épineuse. Le porte-parole du Bureau de Taiwan au Conseil d’Etat de Pékin a déclaré que la victoire de Ma Ying-jeou prouvait que « l’indépendance n’était pas populaire parmi les Taiwanais ».

Ce message laconique est éloquent.

Des ouvrages rédigés par des prestigieux chercheurs étasuniens ont révélé ce qui s’est passé sur le territoire chinois du Tibet.

Kenneth Conboy décrit dans La guerre secrète de la CIA au Tibet (Etienne Dubuis éditeur, 1999) tout le sordide de la conspiration, William Leary qualifiant cet ouvrage d’« étude excellente et impressionnante sur l’une des plus importantes opérations secrètes de la CIA durant la Guerre froide ».

En deux siècles, aucun pays au monde n’a reconnu le Tibet comme une nation indépendante, tous le considérant comme partie intégrante de la Chine. En 1950, après la victoire de la Révolution communiste, l’Inde le qualifiait de la sorte. L’Angleterre, aussi. Les Etats-Unis, jusqu’à la Deuxième Guerre mondiale, pensaient pareil et exerçaient même des pressions sur l’Angleterre dans ce sens ; après la guerre, ils y virent toutefois un bastion religieux contre le communisme.

Quand la République populaire de Chine instaura la réforme agraire dans le territoire tibétain, les élites sociales refusèrent que l’on touche à leurs biens et intérêts, ce qui conduisit à un soulèvement armé en 1959. Selon les recherches susmentionnées, cette révolte au Tibet fut préparée pendant des années par les services secrets étasuniens, à la différence des opérations préparées contre le Guatemala, Cuba et d’autres pays où ils agirent en toute hâte.

Un autre ouvrage – en fait, une apologie de la CIA – Les guerriers de Bouddha, de Mikel Dunham (Actes Sud, 2007), raconte comme celle-ci fit venir des centaines de Tibétains aux USA pour leur apprendre le maniement des armes, conduisit la rébellion, l’équipa, lui parachuta des armements, tandis que les insurgés se déplaçaient en cheval, à la manière des guérilleros arabes. Le prologue de l’ouvrage fut rédigé par le dalaï-lama en personne, qui affirme : « Bien que profondément convaincu que la lutte des Tibétains ne pourra vaincre que selon une approche à long terme utilisant des moyens pacifiques, j’ai toujours admiré ces combattants de la liberté pour leur courage et leur détermination inébranlables. »

Le dalaï-lama, décoré de la Médaille d’or du Congrès des USA, a loué Bush pour ses efforts en faveur de la liberté, de la démocratie et des droits de l’homme.

Il a par ailleurs qualifié la guerre en Afghanistan de « libération », celle de Corée de « quasi-libération » et celle du Vietnam d' « échec ».

J’ai résumé des données tirées d’Internet, en particulier du site Rebelión. Faute d’espace et de temps, je n’ai pas mentionné les pages de chaque ouvrage où apparaissent textuellement les citations que je leur ai empruntées.

Il existe un mal appelé sinophobie, assez généralisé dans les milieux occidentaux accoutumés du fait de leur éducation et de leur culture différentes à mépriser tout ce qui vient de Chine.

J’étais encore un enfant qu’on parlait déjà du « péril jaune ». La Révolution chinoise semblait alors impossible. En fait, les causes profondes de cette sinophobie sont le racisme.

Pourquoi l’impérialisme s’entête-t-il donc tant à clouer la Chine, directement ou indirectement, au pilori international ?

Jadis, je veux dire voilà cinquante ans, ce fut pour lui refuser ses droits, héroïquement gagnées, de membre permanent du Conseil de sécurité ; ensuite, ce fut pour les erreurs qui conduisirent aux protestations de Tienanmen où l’on déifiait la Statue de la liberté, symbole d’un Empire qui est aujourd’hui le déni même de toutes les libertés.

La législation de la République populaire de Chine s’est attachée à proclamer et à défendre le respect des droits et de la culture de cinquante-cinq minorités ethniques.

La République populaire de Chine est par ailleurs extrêmement sensible à tout ce qui touche à l’intégrité de son territoire.

La campagne orchestrée contre la Chine est comme un appel à la curée pour discréditer d’avance le succès du pays et de son peuple comme organisateurs des prochains Jeux olympiques.

Le gouvernement cubain a émis une déclaration de soutien catégorique à la Chine face à la campagne orchestrée contre elle au sujet du Tibet. Position correcte. La Chine respecte le droit des citoyens à croire ou à ne pas croire. Elle compte des musulmans, des chrétiens, catholiques ou non, et des fidèles d’autres religions, et des dizaines de minorités ethniques dont les droits sont protégés par la Constitution.

La religion n’est pas un obstacle à l’entrée dans notre Parti communiste.

Je respecte le droit du dalaï-lama à croire, mais je ne suis pas obligé de croire en lui.
J’ai bien des raisons de croire à la victoire chinoise.


Fidel Castro Ruz
Le 31 mars 2008
17 h 15

Tibet, un autre son de cloche !

mardi 8 avril 2008 (20h13) :

JE NE SUIS PAS D'ACCORD AVEC LE BOYCOTT DES JEUX DE PEKIN ET LA PROPAGANDE ANTI CHINOISE

par Jean Luc Mélenchon

mardi 8 avril 2008

Je ne suis pas communiste chinois. Je ne le serai jamais. Mais je ne suis pas d'accord avec les manifestations en faveur du boycott des jeux olympiques. Je ne suis pas d'accord avec l'opération de Robert Menard contre les jeux olympique de Pékin. Je ne suis pas d'accord avec la réécriture de l'histoire de la Chine à laquelle toute cette opération donne lieu.

Je ne partage pas du tout l'enthousiasme béat pour le Dalaï Lama ni pour le régime qu'il incarne. Pour moi, le boycott des jeux est une agression injustifiée et insultante contre le peuple chinois. Si l'on voulait mettre en cause le régime de Pékin il fallait le faire au moment du choix de Pékin pour les jeux. Il ne fallait pas permettre à la Chine d'être candidate. Il fallait le dire en Chine. Ce qui se fait est une insulte gratuite et injustifiée contre les millions de Chinois qui ont voulu et préparent activement les jeux. Pour moi il flotte un relent nauséabond de racisme sur cette marmite !

UN PRETEXTE

Si un boycott devait être organisé, dans une logique agressive conséquente, ce n'est pas celui du sport qui est un moment d'ouverture et de fraternisation. Pourquoi pas plutôt celui des affaires et de la finance ? Naturellement aucun des activistes mondains actuels ne le propose ni n'entreprend quoi que ce soit dans ce sens. Si l'on devait vraiment se fâcher avec le gouvernement chinois, pourquoi le minimum de ce qui se fait dans les relations normales entre les nations ne se fait-il pas à cette occasion ? Le président de la République chinoise (combien de protestataires se soucient de savoir comment il s'appelle ?) a-t-il été approché ? Lui a -ton demandé quelque chose ? Quoi ? Qu'a-t-il répondu ? Le premier ministre (combien se sont préoccupés de connaitre son nom ?) a-t-il été interpellé ? L'ambassadeur de Chine en France a-t-il été reçu et a-t-on eu un échange avec lui ? Qui s'en soucie ? Avec une morgue ressemblant a du racisme, on proteste contre un gouvernement dont on ne cite pas le nom des dirigeants, et dont on fait comme s'il n'existait pas ? Pourquoi sinon parce qu'on pense par devers soi qu'il n'en est pas vraiment un. La superbe occidentale nie jusqu'au nom des gouvernants qui dirigent un peuple de un milliard quatre cents millions de personnes que l'on croit assez veules pour être maîtrisées par une simple police politique !

D'une façon générale je ressens, en voyant tout cela, l'écho du mépris des colons qui ont imposé en leur temps les armes à la main l'obligation pour les Chinois de faire le commerce de l'opium ! Si la volonté est d'affronter le régime politique de Pékin, aucun des moyens employés n'est de nature à modifier quoi que ce soit d'autre que l'opinion occidentale déjà totalement formatée sur le sujet.

Donc les évènements du Tibet sont un prétexte. Un prétexte entièrement construit à l'usage d'un public conditionné par la répétition d'images qui visent à créer de l'évidence davantage que de la réflexion. Exemple : seule l'enquête « d'arrêt sur image» rapporte que les « évènements du Tibet » ont commencé par un pogrom de commerçants chinois par des « tibétains ». Dans quel pays au monde de tels évènements restent-ils sans suite répressive ? La vie d'un commerçant chinois a-t-elle moins de valeur que celle du manifestant « tibétain » qui l'assassine à coups de bâton dans la rue ? Bien de l'amitié pour les Tibétains n'est qu'une variante nauséabonde du racisme contre les chinois. Elle se nourrit de tous les fantasmes que l'ignorance favorise. Que la répression ait été lourde est peut-être avéré. Comment l'apprécier ? Les seuls chiffres rabachés sont ceux du «gouvernement tibétain en exil ». Pourtant le gouvernement chinois, si j'ai bien entendu, annonce lui-même un nombre de blessés et de morts qui permet de comprendre qu'il y a eu une situation grave et sérieuse que les autorités admettent. Dans n'importe quelles circonstances on essaierait de comparer les informations. On essaierait de comprendre l'enchaînement des faits. Sinon autant dire que le gouvernement français de l'époque a ordonné de pousser deux jeunes dans un transformateur électrique à Clichy Sous Bois au motif qu'il avait alors une politique de main dure face aux banlieues. Personne n'oserait avancer une bêtise aussi infâme. Dans les émeutes urbaines américaines la répression a aussi la main lourde. Tout cela n'excuse rien. Mais cela permet de mettre des évènements en relation de comparaison.

UN PERSONNAGE SUSPECT

J'’exprime les plus nettes réserve à propos de l'action politique de monsieur Robert Ménard, principal organisateur des manifestations anti-chinoises. A présent, à propos du Tibet et des jeux olympiques, on ne voit que Robert Ménard. Il parle, parait-il, au nom de « Reporters sans frontière ». Cette association est réduite à la personne de Robert Ménard. Bien des anciens membres du conseil d'administration pourraient en dire long au sujet des conceptions démocratiques de monsieur Ménard dans sa propre association. Quand je me suis trouvé sur le plateau de radio à France Culture où l'on m'interrogeait sur le sujet du Tibet et des Jeux Olympiques, messieurs Marc Kravetz et Alexandre Adler sont restés silencieux quand j'en suis venu au rôle de monsieur Menard. Ils ne peuvent être soupçonnés de chercher à me complaire... Hors micro, les deux, exprimaient des réserves marquées sur les méthodes du personnage de Robert Ménard. Maxime Vivas a établi une analyse documentée extrêmement inquiétante sur ce personnage et ses sources de financements. Quoi qu'il en soit, il semble qu'il remplace aussi dorénavant les syndicats de journalistes, l'association internationale des droits de l'homme, Amnesty et ainsi de suite. Parfois même il remplace le Dalaï Lama. Robert Menard milite pour le boycott des jeux et ce que ne fait pas le Dalaï Lama. Celui-ci dit au contraire que le peuple chinois mérite les jeux. Robert Ménard est un défenseur des droits de l'homme à géométrie variable. A-t-il mené une seule action, même ultra symbolique, quand les Etats-Unis d'Amérique ont légalisé la torture ? A-t-il mené une seule action pour que les détenus de Guantanamo soient assistés d'avocat ? Robert Menard a un comportement qui soulève des questions sérieuses au sujet des motivations de son action.

LE REGIME THEOCRATIQUE EST INDEFENDABLE

A propos du Tibet. Le Tibet est chinois depuis le quatorzième siècle. Lhassa était sous autorité chinoise puis mandchoue avant que Besançon ou Dôle soient sous l'autorité des rois de France. Parler « d'invasion » en 1959 pour qualifier un évènement à l'intérieur de la révolution chinoise est aberrant. Dit-on que la France a « envahi » la Vendée quand les armées de notre République y sont entrées contre les insurgés royalistes du cru ? Le Dalaï Lama et les autres seigneurs tibétains ont accepté tout ce que la Chine communiste leur proposait et offrait, comme par exemple le poste de vice-président de l'assemblée populaire que « sa sainteté » a occupé sans rechigner. Cela jusqu'au jour de 1956 où le régime communiste a décidé d'abolir le servage au Tibet et régions limitrophes.

Dans une négation des traditions, que j'approuve entièrement, les communistes ont abrogé les codes qui classaient la population en trois catégories et neuf classes dont le prix de la vie était précisé, codes qui donnaient aux propriétaires de serfs et d'esclaves le droit de vie, de mort et de tortures sur eux. On n'évoque pas le satut des femmes sous ce régime-là. Mais il est possible de se renseigner si l'on a le coeur bien accroché. L'autorité communiste a mis fin aux luttes violentes entre chefs locaux du prétendu paradis de la non-violence ainsi qu'aux divers châtiments sanglants que les moines infligeaient à ceux qui contrevenaient aux règles religieuses dont ils étaient les gardiens. La version tibétaine de la Charria a pris fin avec les communistes. La révolte de 1959 fut préparée, armée, entretenue et financée par les USA dans le cadre de la guerre froide. Voila ce qu'il en est des traditions charmantes du régime du Dalaï Lama avant les communistes et de l'horrible « invasion » qui y a mis fin. Depuis, la scolarisation des enfants du Tibet concerne 81% d'entre eux là où il n'y en avait que 2% au temps béni des traditions. Et l'espérance de vie dans l'enfer chinois contemporain prolonge la vie des esclaves de cette vallée de larmes de 35, 5 à 67 ans. En foi de quoi, l'anéantissement des Tibétains se manifeste par le doublement de la population tibétaine depuis 1959, faisant passer celle-ci de un million à deux millions et demi. Pour tout cela, la situation mérite mieux, davantage de circonspection, plus de respect pour les Chinois que les clichés ridicules que colportent des gens qui ne voudraient ni pour eux, ni pour leur compagne ni pour leurs enfants d'un régime aussi lamentable que celui du roi des moines bouddhistes du Tibet.

A l'heure actuelle, je n'éprouve aucune sympathie pour « le gouvernement en exil du Tibet » dont sa sainteté est le décideur ultime sur pratiquement toutes les questions, où siège un nombre de membres de sa famille qu'il est tout à fait inhabituel de trouver dans un gouvernement, même en exil, sans parler de leur présence aux postes-clefs de la finance et des affaires de cet exil. Je respecte le droit de sa sainteté de croire ce qu'elle veut et à ses partisans de même. Mais je m'accorde le droit d'être en désaccord total avec l'idée de leur régime théocratique.

Je suis également hostile à l'embrigadement d'enfants dans les monastères. Je suis opposé à l'existence du servage. Je suis laïque partout et pour tous et donc totalement opposé à l'autorité politique des religieux, même de ceux que l'album "Tintin au Tibet" a rendu attendrissants et qui ne l'ont pourtant jamais été. Je désapprouve aussi les prises de position du "roi des moines" contre l'avortement et les homosexuels. Même non violentes et entourées de sourires assez séducteurs, ses déclarations sur ces deux sujets sont à mes yeux aussi archaïques que son projet politique théocratique. Je n'ai jamais soutenu l'Ayatollah Khomeiny, même quand j'étais contre le Shah d'Iran. Je ne soutiens pas davantage ni n'encourage le Dalaï Lama, ni dans sa religion qui ne me concerne pas, ni dans ses prétentions politiques que je désapprouve ni dans ses tentatives sécessionistes que je condamne. Je demande : pourquoi pour exercer sa religion et la diriger, le Dalaï Lama aurait-il besoin d'un Etat ? Un Etat qui pour être constitué demanderait d'amputer la Chine du quart de sa surface ! Son magistère moral et religieux actuel souffre-t-il de n'être assis sur aucune royauté ?

FAUTEUR DE GUERRE

En ce qui concerne le droit international et la géopolitique, le dossier du Tibet tel que présenté par ses partisans est un facteur de violences, de guerres et de déstabilisation aussi considérable que celui des Balkans. Quel genre de Tibet est défendu ? Le "grand Tibet" incluant des régions comme le Yunnan et le Sichuan, sur les territoires des anciens seigneurs de la terre où sont organisés des troubles en même temps qu'à Lhassa ? Bien sûr, aucun de ceux qui s'agitent en ce moment ne se préoccupe de savoir de quoi il retourne à ce propos. Rien n'indique mieux le paternalisme néo-colonial ni le racisme sous-jacent à l'enthousiasme pro-tibétain que l'indifférence à ces questions qui mettent en cause la vie de millions de personnes et des siècles d'histoire et de culture chinoise.

J'ai lu que les athlètes français porteraient un maillot avec une déclaration un peu passe-partout qui est présentée comme une protestation politique. Je sais très bien que l'inscription "pour un monde meilleur" ne mange pas plus de pain là-bas qu'ici. Mais elle sera certainement vécue par les Chinois du commun comme un acte injurieux si son motif pro-Dalai Lama est connu. Peut-être est-il cependant aussi un peu hors limite des règles du sport international. Souvenons nous que la ligue européenne de natation a exclu des championnats d'Europe de natation le nageur serbe Milorad Cavic parce qu'il portait lors des remises de médailles un tee-shirt sur lequel était écrit : "le Kosovo est serbe". Cela fera-t-il jurisprudence ? Les champions français qui porteront un slogan annoncé comme politique seront-ils interdits de jeux ? Bien sûr que non !

Puisque le but c'est justement que le Tibet soit aux Chinois ce que le Kosovo a été aux serbes. Mais comme cela n'a rien de comparable, à part la volonté de dépeçage de l'ennemi et la mise en scène médiatique, il est fort probable que cela finisse à la confusion des agresseurs. Je le souhaite.

Je suis un ami de la Chine. Et je sais que l'intéret de mon pays et ses valeurs ne sont pas du côté où l'on voudrait les entrainer.

samedi 5 avril 2008

Les USA, la Chine et l'inde : aperçu sur la géopolitique de l'Himalaya

Comaguer

Dans le discours politique contemporain, la coutume s’est établie de citer ensemble les deux géants asiatiques : la Chine et l’Inde. Les deux pays les plus peuplés du monde – 40 % de la population mondiale à eux deux - ont ceci de commun qu’après avoir été colonisés par les Européens ils comptent au nombre des grandes puissances émergentes, encore qu’une comparaison plus détaillée montre que la Chine est sensiblement plus avancée que l’Inde dans sa grande transformation économique.

CONTRE LA GUERRE, COMPRENDRE ET AGIR Bulletin n°188– semaine 13 – 2008
De la colonisation qu’ils ont subie diversément : l’Inde fut colonisée totalement par les britanniques pendant plus d’un siècle, la Chine ne fut occupée que très partiellement par les puissances européennes auxquelles le Japon tenta, sans succès mais à un prix humain énorme, de se substituer, les deux pays ont hérité d’une longue frontière commune qui s’étend sur des milliers de kilomètres le long de la chaîne himalayenne.
Cette frontière, tracée par le seul colonisateur britannique, n’a jamais été reconnue par la Chine ni avant ni après la prise du pouvoir par le Parti Communiste Chinois en Octobre 1949.
Située dans des zones très peu peuplées, à des altitudes inhospitalières elle pourrait n’être qu’un objet de tractations diplomatiques aptes à faire les délices des experts en droit international et des géographes si elle n’était le lieu d’un face à face entre deux puissances qui ont des rapports complexes, un lieu qui depuis la deuxième guerre mondiale est un des points chauds de la géopolitique mondiale.
En effet, cette frontière est discontinue et d’autres pays y sont présents qui viennent encore compliquer les rapports entre les deux grands.
A l’Ouest, l’Inde est au contact avec la Chine au Nord de la province du Cachemire, c’est à dire dans la zone d’un conflit jamais réglé entre l’Inde et le Pakistan depuis leur accession simultanée à l’indépendance en Août 1947. La Chine populaire s’est refusée depuis 1949 à délimiter officiellement cette frontière considérant que le règlement de la question du Cachemire était un préalable indispensable à un accord et a établi une frontière de facto. Signer avec l’Inde reviendrait à nier la revendication pakistanaise d’un référendum d’autodétermination de cette province, revendication ignorée par l’Inde avec constance.
Un peu plus loin vers l’Est se trouve le Népal. La géographie fait de cet Etat tampon un Etat plus proche de l’Inde que de la Chine. L’accès au pays est en effet beaucoup plus facile depuis l’Inde et il se trouve au contraire séparé de la Chine et du plateau du Tibet par les plus hauts sommets de la chaîne himalayenne. L’influence de l’Inde y est donc considérable à tous points de vue : politique, économique et culturel. L’hindouisme y est la religion dominante et la monarchie népalaise (qui vient de tomber – voir plus loin) était une monarchie hindouiste. Passé le Népal, l’Inde et la Chine se retrouvent directement face à face sur une centaine de kilomètres au Nord de la province du Sikkim où s’est déroulée entre eux en 1962 un sévère affrontement militaire. L’armée chinoise victorieuse avança largement sur le sol indien puis se retira sur la ligne de crêtes, mais l’avertissement avait porté.
Vient ensuite un autre petit Etat-tampon le Bhoutan, lui aussi sous l’influence de l’Inde mais très replié sur lui-même. Le Bhoutan est un tout petit royaume où le bouddhisme est religion d’Etat et qui vient de se transformer en monarchie constitutionnelle pour éviter une modernisation trop brutale qui échapperait au souverain.
Plus à l’Est, Chine et Inde se retrouvent face à face de part et d’autre d’une frontière toujours aussi escarpée - les sommets atteignent des altitudes entre 5000 et 6000 mètres – taillée en de rares endroits par de profondes vallées comme celle du Brahmapoutre, né sur le plateau tibétain, et qui, mélangé aux Gange, ira irriguer l’immense delta du Bengale partagé entre l’Inde (Etat du Bengale occidental) et le Bangla Desh.
Il est à noter que les guérillas maoïstes les plus actives en Inde aujourd’hui le sont dans les Etats de l’Est les plus proches de la frontière sino-indienne mais que le gouvernement chinois, fidèle à sa politique de non-ingérence, ne leur accorde aucun soutien.
Que le tracé de la frontière entre la Chine et l’Inde n’ait pas pu être normalisé depuis plus de 50 ans ne tient pas seulement au fait que plusieurs Etats tiers et en particulier le Pakistan sont impliqués mais surtout au fait historique que les deux pays ont été, depuis l’indépendance de l’Inde et à la prise du pouvoir des communistes en Chine au cœur des tensions politiques asiatiques et mondiales et n’ont jamais été alliés.
Quelques rappels historiques :
Quand est fondée la République Populaire de Chine (RPC – 01.10.1949) elle devient aussitôt le deuxième état socialiste du monde et dans la guerre froide commençante prend sa place dans le camp socialiste. L’Inde indépendante fait partie du Commonwealth mais va tenter d’échapper à la coupure du monde en deux blocs en s’affirmant comme un des leaders du mouvement des non-alignés. Quand survient la brouille puis la rupture entre la Chine et l’URSS, l’Inde, craignant l’influence du maoïsme chinois chez elle, se rapproche de l’URSS.
En bref, l’Inde et la Chine ne sont jamais dans le même camp et si la RPC a pu régler par la négociation tous les problèmes frontaliers qu’elle avait avec ses autres voisins elle n’a jamais voulu le faire avec l’Inde.
Aujourd’hui dans une configuration géopolitique mondiale mouvante, l’Inde est courtisée et incertaine. Elle a conservé des liens avec la Russie qui, du temps de ses amitiés soviétiques, lui a formé de nombreux cadres, lui a fourni du matériel militaire qu’il faut entretenir et moderniser voire renouveler.
Elle a des relations suivies avec Israël qui lui a fourni le matériel militaire que les Etats-Unis ne voulaient pas fournir eux-mêmes, l’Inde n’étant membre d’aucune des alliances militaires mises en place par les Etats-Unis.
Elle entretient désormais des liens plus intenses et plus confiants avec la Chine dont le dynamisme industriel et commercial fait un partenaire économique incontournable. En outre, les deux pays ont effectué en 2007 leurs premières manoeuvres militaires communes et l’Organisation de Coopération de Shanghai a accueilli l’Inde comme observateur.
Pas surprenant que dans ce contexte les Etats-Unis aient entrepris auprès de l’Inde les grandes manœuvres de la séduction nucléaire. Il s’agit de lui fournir les nouveaux réacteurs nucléaires dont elle va avoir besoin tant est forte sa dépendance au pétrole dont les importations représentent 70% de la consommation nationale.
Cette opération séduction, montée par l’équipe BUSH, a de la peine à se mettre en place. Aux Etats-Unis une partie du Congrès est réticente à accorder ainsi l’absolution à un pays qui maîtrise toutes les techniques nucléaires, n’a pas signé le Traité de non prolifération nucléaire et n’a pas l’intention de le faire. En Inde, les communistes modérés qui font partie de la majorité parlementaire actuelle s’opposent à cet accord qui peut conduire à un alignement stratégique sur les Etats-Unis .Les maoïstes et les guérillas qu’ils animent dans plusieurs états de l’Est du pays sont farouchement anti-impérialistes et ont la même position.
L’Inde nucléaire – rappel de quelques faits
La question du nucléaire n’a pas cessé de compliquer les relations entre l’iNde et les Etats-Unis. Dès l’indépendance l’Inde s’intéresse au nucléaire civil. Elle achète sa première centrale au Canada, façon hypocrite pour les Etats-Unis de laisser faire. Il s’agit d’une centrale à eau lourde, comme les premières centrales françaises, et donc productrice de plutonium à usage militaire. L’eau lourde sera fournie directement par les Etats-Unis. La brouille sino-soviétique, la bombe française (1959) et la bombe chinoise en préparation (le premier essai aura lieu en 1964) renforcent la conviction des dirigeants indiens qu’ils doivent eux aussi posséder l’arme nucléaire qui n’est plus réservée aux deux superpuissances. Pour y parvenir ils auront habilement utilisé les Etats-Unis en jouant sur la question tibétaine.
En 1951 la RPC nouvelle accorde au Tibet un statut de région autonomie. Le Dalai lama reste au pouvoir mais différentes réformes, à commencer par l’abolition de l’esclavage, lui sont imposées. Mais les Etats-Unis mettront longtemps à admettre que le PCC est au pouvoir, maintiendront la fiction de TAIWAN représentant de la Chine sur la scène diplomatique internationale et tenteront diverses actions pour faire tomber le nouveau régime. L’affrontement est évidemment au comble sur le front coréen mais d’autres actions sont menées que ce soit en Birmanie où des généraux du KMT s’installent et vont tenter mais en vain de ré envahir les provinces du Sud-ouest chinois ou au Tibet où la CIA va prendre en main le Dalai Lama, former et armer les opposants à la RPC qu’il est facile de recruter chez les religieux anti-communistes qui ont été dépouillés d’une partie de leur pouvoir. C’est pour couper court à cette menace de sécession organisée par Washington que Pékin occupe militairement la province du Tibet en 1959 et chasse le Dalai Lama. Les Etats-Unis souhaitent le Dalai Lama et son entourage en Inde à proximité du Tibet et dans un pays où le bouddhisme, bien que très minoritaire est vivant. Ils pensent aussi que le ressentiment anti-chinois de cette petite diaspora pourra peut-être un jour ou l’autre être utilisée contre la RPC. C’est en effet à partir de la ville indienne de DHARAMSALAM, où s’installe le Dalai Lama que vont s’organiser les réseaux du « Tibet Libre » soutenus sans discontinuer par les dollars de la CIA. Plus de 40 ans ont passé et ces réseaux qui ont essaimé dans le monde entier sous le couvert d’une religion fonctionnent bien.
De ce point de vue ce qu’on pourrait appeler le TIBETISME, qui n’est pas le Bouddhisme tibétain, mais l’usage militant et politique de cette religion, a des ressemblances avec le SIONISME en tant qu’il est l’instrumentalisation à des fins impérialistes dans le cadre d’une lutte contre le communisme athée d’une religion hyperminoritaire dont les Etats-Unis flattent et soutiennent l’appétit bien réel et bien matériel de pouvoir séculier. Le TIBETISME est un SIONISME ASIATIQUE.
Selon les révélations récentes du Major WILLIAM CORSON, ancien collaborateur du Président Eisenhower, l’Inde va négocier l’installation du « gouvernement tibétain en exil » sur son territoire en échange de la formation aux Etats-Unis de 400 ingénieurs nucléaires.
Disposant ainsi progressivement des compétences nécessaires, d’uranium sur son sol, et la volonté politique aidant, l’Inde qui ne signe pas le Traité de non prolifération nucléaire, ratifié en 1970, fait exploser sa première bombe dans le désert du Rajasthan en 1974. Pour rétablir l’équilibre stratégique, le Pakistan va alors se lancer à corps perdu dans son propre programme nucléaire. La non prolifération apparaît alors pour ce qu’elle est : un double langage permettant aux puissants d’interdire à certains Etats l’accès à l’arme nucléaire et de fermer les yeux sur les programmes des autres.
Cette Inde, tiraillée entre des intérêts contraires, est évidemment très attentive à ce qui se passe sur sa frontière Nord.
Elle a soutenu autant qu’elle a pu la monarchie hindouiste népalaise dans sa lutte contre la guérilla maoïste entamée en 1994. Encadrement militaire, fourniture d’armes, rien n’a manqué pour tenter d’éviter ce qui, à Delhi, était considéré comme le pire : l’installation d’un régime prochinois à Katmandou.
A cet égard, la situation au Népal n’est pas encore clarifiée. Au terme de 12 ans de guerre, le Parti Communiste Népalais Maoïste (PCNm) qui, dans ce conflit, n’a reçu aucune aide de la RPC, a accepté, alors qu’il contrôlait très largement la campagne népalaise, de déposer les armes en échange de sa participation à un gouvernement provisoire, de la mise à l’écart au roi et de l’élection d’une assemblée constituante devant instaurer la République du Népal.
A quelques semaines de l’élection de cette assemblée, la situation est encore instable. La république est installée dans les faits et le roi n’exerce plus aucun pouvoir, mais les forces conservatrices qui lui sont fidèles, soutenues par l’Inde et les Etats-Unis, fomentent des révoltes anti-communistes dans certaines régions du pays et assassinent des militants maoïstes. Le PCN maoïste tente, de son côté, de rassembler autour de lui une majorité parlementaire et politique et dans le pays. S’il y parvient, l’assemblée constituante devrait confirmer la fondation définitive et la consécration internationale de la République du Népal.
Cette nouvelle république devra trouver sa place entre ses deux énormes voisins et ne pas se fâcher avec l’Inde avec laquelle elle est très imbriquée économiquement tout en intensifiant ses relations avec la Chine voisine via le Tibet. Il est dans les plans de la Chine d’améliorer les relations routières avec le Népal et même de prolonger jusqu’à Katmandou le chemin de fer de Lhassa et donc d’entretenir avec la république nouvelle des rapports économiques de plus en plus étroits.
Les Etats-Unis surveillent le processus comme le lait sur le feu mais savent très bien que la nouvelle république népalaise laissera les coudées moins franches à leurs espions, à leurs forces spéciales chargées de déstabiliser le Tibet et aux activistes du « TIBET LIBRE » et ils n’ont de ce point de vue guère de solution de rechange. L’Inde qui, tout en hébergeant le Dalai Lama n’a jamais reconnu le « gouvernement tibétain en exil », a toujours considéré la question tibétaine comme une affaire intérieure chinoise et l’a clairement réaffirmé ces derniers jours. Quant au Pakistan, il ne fera rien, lui non plus, pour remettre en cause son alliance historique avec la RPC et d’autant moins qu’il refuse de plus en plus d’être réduit par les Etats-Unis au rôle de simple supplétif dans le conflit afghan.
Les archives de Comaguer : http://comaguermarseille.free.fr

mardi 1 avril 2008

Le plus grand pays du monde face à d’énormes défis

mardi, 23 octobre 2007, 17h55

Le président du Parti, Hu Jintao, a ouvert le 17e congrès du Parti communiste par un discours étonnamment critique.


Tony Busselen
Solidaire

14-10-2007

La Chine envisage de procéder ces prochaines années à une redistribution des revenus. Tout le monde pourra accéder aux soins de santé et à la sécurité sociale. (Photo Solidaire, Boudewijn Deckers)

- Cliquez sur la photo pour l'agrandir -



Le congrès du PCC a débuté le16 octobre et s’est clôturé sept jours plus tard. Il s’est déroulé dans un contexte de forte croissance économique mais aussi de forte hausse de l’insécurité sociale, pollution de l’environnement et corruption

Hu Jintao s’est adressé aux 2 237 participants sur un ton vif : « Le fossé entre ce que nous avons réalisé et ce que le peuple attend de nous est grand. Les problèmes et les difficultés sont nombreux ». Ou encore : « Nous sommes au stade du socialisme primaire avec des conditions de vie relativement bonnes pour la population en général. Cependant le fossé entre les revenus continue de se creuser et les pauvres et personnes à faible revenu dans les villes et les campagnes sont toujours trop nombreux. (…)L’infrastructure agricole est encore trop faible, quant au développement des campagnes il est loin derrière celui des villes. (…) L’ouverture de la Chine s’accompagne d’une pression permanente du fait que les pays industrialisés ont une forte avance sur le plan économique et en matière de développement scientifique et technologique. »

La Chine envisage de procéder ces prochaines années à une redistribution des revenus. Tout le monde pourra accéder aux soins de santé et à la sécurité sociale. D’ici 2010, l’objectif est que chaque Chinois possède une assurance maladie et les prévisions pour 2020 prévoient que le Produit National Brut par habitant quadruple par rapport à 2000. « Mais tous ces progrès rapides devront être accompagnés d’une forte diminution de la consommation d’énergie et d’un plus grand intérêt pour l’environnement. »

Il n’y a pas si longtemps le peuple chinois connaissait la faim et ne pouvait se vêtir correctement. Aux cours des 50 dernières années, le pays est devenu l’une des plus grande économie mondiale. Au cours de la dernière décennie, le nombre de pauvres est passé de 250 millions à 20 millions. Et l’économie chinoise continue de croître avec une moyenne de 10% l’an.

La population est indignée par la corruption

Selon le journal du Parti communiste chinois, ce qui préoccupe et exaspère le plus la population aujourd’hui, c’est la corruption. Hu Jintao dit à ce propos : « La corruption est incompatible avec les objectifs et la nature de notre parti ». Et « la lutte contre la corruption est une lutte de longue haleine, difficile et complexe ».

En effet, ces deux dernières années, 200 000 membres du parti, dont des cadres, ont été sanctionnés. Hu veut redoubler les efforts pour contrecarrer et empêcher les décisions arbitraires prises par des individus ou petits groupes du parti. « Nous devons harmoniser davantage la direction collective et la responsabilité individuelle. »

Combattre la corruption signifie également que le parti doit fonctionner plus démocratiquement : « Le contrôle démocratique exercé sur les cadres est le moyen le plus efficace pour permettre au peuple de remplir son rôle de maître du pays. » Et « lors de l’élection des responsables du parti, il conviendra d’accorder une plus grande attention aux candidats présentés et au mode d’élection. Les organisations de base du parti doivent être plus démocratiques et, progressivement, elles devraient pouvoir élire directement les hauts cadres du parti ».

Les défis sont énormes pour ce pays qui regroupe près d’un quart de la population mondiale et est le premier pays du Tiers Monde à évoluer vers une économie développée. L’avenir nous dira si les solutions formulées par Hu Jintao sont suffisantes et si elles ont été réalisées.

Les Chinois ont-ils liquidé les Tibétains ?

mercredi, 31 mai 2006, 15h44

Patrick French, alors qu'il était directeur de la « Free Tibet Campaign » (Campagne pour l'indépendance du Tibet) en Angleterre, a été le premier à pouvoir consulter les archives du gouvernement du Dalaï-Lama en exil. Il en a tiré des conclusions étonnantes.

Jean-Paul Desimpelaere

Solidaire
31-05-2006

Il en est arrivé à la conclusion dégrisante que les preuves du génocide tibétain par les Chinois avaient été falsifiées et il a aussitôt donné sa démission en tant que directeur de la campagne pour l'indépendance du Tibet1.

Dans les années soixante, sous la direction du frère du Dalaï-Lama, Gyalo Thondrup, des témoignages furent collectés parmi les réfugiés tibétains en Inde. French constata que les chiffres des morts avaient été ajoutés en marge par après. Autre exemple, le même affrontement armé, narrée par cinq réfugiés différents, avait été comptabilisée cinq fois. Entre-temps, le chiffre de 1,2 million de tués par la faute des Chinois allait faire le tour du monde.

French affirme que ce n'est tout bonnement pas possible : tous les chiffres concernent des hommes. Et il n'y avait que 1,5 million de Tibétains mâles, à l'époque. Il n'y en aurait donc quasiment plus aujourd'hui. Depuis, la population a augmenté pour atteindre presque 6 millions d'habitants actuellement, soit presque deux fois plus qu'en 1954. Chiffre donnée et par le Dalaï-Lama et les autorités chinoises, étonnamment d'accord pour une fois.

Des observateurs internationaux (la Banque mondiale, l'Organisation mondiale de la santé) se rangent d'ailleurs derrière ces chiffres. N'empêche qu'aujourd'hui encore, le Dalaï-Lama continue à prétendre que 1,2 million de Tibétains sont morts de la faute des Chinois.

Le dalaï-lama est-il une sorte de pape du bouddhisme mondial ?

Ici, il convient de relativiser les choses. 6 % de la population mondiale est bouddhiste. C'est peu. En outre, le dalaï-lama n'est en aucun cas le représentant du bouddhisme zen (Japon), ni du bouddhisme de l'Asie du Sud-Est (Thaïlande), ni non plus du bouddhisme chinois. Le bouddhisme tibétain représente seulement 1/60e de ces 6 %. Et, enfin, il existe de plus au Tibet quatre écoles séparées. Le Dalaï-Lama appartient à l'une d'elles : la « gelugpa » (les bonnets jaunes). Bref, un pape suivi par peu de fidèles religieux, mais par beaucoup d'adeptes politiques…

Qui sont ses sponsors ?

De 1959 à 1972 :

- 180.000 dollars par an pour lui personnellement, sur les fiches de paie de la CIA (documents libérés par le gouvernement américain ; le dalaï-lama a nié la chose jusqu'en 1980)

- 1,7 million de dollars par an pour la mise en place de son réseau international.

Ensuite le même montant a été versé via une dotation du NED, une organisation non gouvernementale américaine dont le budget est alimenté par le Congrès. Le Dalaï-Lama dit que ses deux frères gèrent « les affaires ». Ses deux frères, Thubten Norbu (un lama de rang supérieur) et Gyalo Thondrup avaient été embauchés par la CIA dès 1951, le premier pour collecter des fonds et diriger la propagande et le second pour organiser la résistance armée.

La bombe atomique indienne : le bouddha souriant

Dès le début, c'est-à-dire quand il est devenu manifeste que la révolution chinoise allait se solder par un succès en 1949, les EU ont essayé de convaincre le dalaï-lama de gagner l'exil. Ils mirent de l'argent, toute une logistique et leur propagande à sa disposition. Mais le dalaï-lama et son gouvernement voulaient que les États-Unis envoient une armée sur place comme ils l'avaient fait en Corée et ils trouvèrent donc la proposition américaine trop faible. (Modern War Studies, Kansas University, USA, 2002). En 1959, les EU parvenaient quand même à convaincre le dalaï-lama de quitter le Tibet, mais il fallait encore convaincre l'Inde de lui accorder l'asile. Eisenhower proposait un « marché » à Nehru : l'Inde acceptait le dalaï-lama sur son territoire et les EU octroyaient à 400 ingénieurs indiens une bourse d'études afin qu'ils s'initient à la « technologie nucléaire » aux États-Unis. Le marché fut accepté2. En 1974, la première bombe A indienne fut affublée du surnom cynique de… « bouddha souriant »3.

1 « Tibet, Tibet », P. French, Albin Michel, 2005.

2 Le major américain William Corson, responsable des négociations de l'époque, Press Trust of India, 10/8/1999.

3 Raj Ramanna, ancien directeur du programme nucléaire de l'Inde, 10/10/1997, Press Trust of India.