mardi 10 mars 2009

Cuba :: Le président Castro remanie le gouvernement

Le président Raúl Castro a procédé à un remaniement de son gouvernement donnant libre cours à toutes sortes de spéculations. Katrien Demuynck, coordinatrice d’Initiative Cuba Socialista, réagit.

Valérie Van Camp
Parti du travail de Belgique

À quel point les modifications annoncées par Raoul Castro le 2 mars sont-elles radicales ?
Katrien Demuynck. Une dizaine de ministres ont été remplacés et plusieurs ministères ont fusionné. veut en arriver à un appareil d’État moins lourd et plus efficace, autrement dit, secouer la bureaucratie. Ce n’est pas une rupture avec le passé. La lutte contre le bureaucratisme et la corruption qui va de pair a déjà été lancée en novembre 2005 par Fidel. Ainsi, les ministères de l’Industrie alimentaire et des Pêcheries ont fusionné, tout comme ceux du Commerce extérieur et des Investissements à l’étranger.
Deux importants ministres relevés de leurs fonctions, ce n’est pourtant pas rien !
Katrien Demuynck. En effet. Et bien que, depuis l’arrivée de Raúl Castro, le gouvernement ait déjà connu cinq restructurations, cette fois, il s’agit néanmoins d’un remaniement radical. Il a défrayé la chronique parce que ces deux personnages importants sont assez bien connus. La presse étrangère les a régulièrement mis en épingle comme les successeurs éventuels de Fidel et Raúl. Il s’agit de Felipe Pérez Roque, qui était ministre des Affaires étrangères depuis bientôt dix ans. Il est remplacé par son ministre adjoint, Bruno Rodríguez. Ce dernier est également un cadre plus jeune. Il a accompagné entre autres l’importante et très longue mission médicale cubaine au Pakistan, suite au grave tremblement de terre. Un second changement surprenant, c’est le remplacement de Carlos Lage comme secrétaire du Conseil des ministres. Carlos Lage est connu comme l’architecte des réformes économiques des années 90 et, en compagnie de Pérez Roque, il était le visage connu du gouvernement cubain.
Après cette annonce, toutes sortes d’interprétations se sont succédé dans la presse.
Katrien Demuynck. Au départ, il y avait peu d’infos et cela a sans aucun doute alimenté ces rumeurs. Quand Fidel est brusquement tombé malade, on a prédit que la révolution allait vaciller sur ses bases. Rien n’a été moins vrai. Ici aussi, il y a eu les spéculations les plus folles. Il se serait agi d’un remplacement des « gens de Fidel » par les « créatures de Raúl », ce qui fait qu’on ne tient aucun compte des mérites des personnes en question. Des titres comme « Raúl nettoie le cabinet de Fidel et installe ses propres gens » donnent le ton.
Entre-temps, en sait-on plus ?
Katrien Demuynck. Dans un édito, Fidel écrit : « Je ne me suis jamais occupé de sélectionner des gens pour certains postes. » Il qualifie les changements de sains et insiste sur le fait qu’ils ont été faits en concertation avec lui « bien que rien ne rende la chose obligatoire ». À propos de Carlos Lage et de Felipe Pérez Roque, il donne le remarquable commentaire que voici : « La douceur du pouvoir, pour lequel ils n’ont pas dû faire le moindre sacrifice, avait suscité chez eux des ambitions les poussant à des comportements peu dignes. » Fidel insiste un peu plus loin pour dire que les deux hommes ont accepté les mesures sans protester. Le lendemain, la presse cubaine publiait deux lettres des deux hommes concernés, lettres dans lesquelles ils proposaient leur démission de leurs autres fonctions parlementaires et gouvernementales ainsi que du Comité central du Parti communiste cubain. En même temps, ils déclarent toujours soutenir le Parti communiste.
Quelles sont les réactions à tout cela ?
Katrien Demuynck. Pas mal de gens de notre mouvement sont venues exprimer chez moi leur incrédulité et leur dépit à propos du fait que des figures de proue comme le ministre des Affaires étrangères Pérez Roque et le chef de cabinet Carlos Lage n’ont manifestement pas répondu aux espoirs placés en eux. Mais je pense que nous devons surtout retenir que la révolution cubaine attache beaucoup d’importance aux valeurs morales. De la direction, on attend un comportement irréprochable. Je retiens aussi qu’à Cuba, il n’y a de droits acquis définitivement pour personne. La sclérose du pouvoir est impensable. Ceux qui ne s’acquittent pas parfaitement de leurs tâches peuvent très vite être remplacés.
Plus d’infos sur www.cubanismo.net

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