samedi 31 mai 2008

Manifestation du 15 mars 2008 contre la brutalité policière

Et ce qu’ils avaient à dire ?
Par Marianne Breton Fontaine
En collaboration avec Edwin Mayen

Cette année, la manifestation contre la brutalité policière qui a lieu tous les 15 mars se faisait sous plusieurs thèmes : contre l’impunité des policiers et policières, contre le profilage racial, contre le nettoyage social et la répression politique. Le rendez-vous se faisait en face du métro Berri-UQAM et les participants étaient nombreux, environ 600 personnes. Il y avait alors deux fois plus de policiers et policières que de manifestants et manifestantes. Tout autour de la foule, les journalistes se promenaient. Malheureusement, aucun d’entre eux n’était venus pour poser des questions. Ils et elles étaient à la recherche de sensationnel car tous se doutaient qu’aussitôt que la marche allait commencer, il y aurait une confrontation violente. Mais qu’est-ce que tout ce monde venu manifester avait à dire?

«Aujourd’hui, nous organisons pour une 12ième année consécutive une manifestation contre la brutalité policière. En fait, cette action à commencé en 1996 suite au tabassage à mort de deux enfants en Suisse. Au Québec et en Suisse, il a été décidé de commémorer cet événement en organisant une manifestation contre la brutalité policière. Mais c’est aussi commémoré au Mexique, en Colombie et dans d‘autres pays du monde. »

C’est ce que nous a expliqué Sophie Sénéchal, une militante du Collectif opposé à la brutalité policière (COBP). Dans la foule qui se rassemblait, les gens ne semblaient pas nerveux et chaque personne savait pourquoi elle était présente. Mais du côté des policiers et policières, l’offensive était déjà commencée. Les activistes furent filmés, photographiés et tous bien encerclés. Sous la musique d’un groupe invité pour égayer la marche, l’interview continue :

«Nous dénonçons entre autre le nettoyage social. Ce n’est pas normal qu’à Montréal, les personnes les plus démunies s’accumulent des «bills» judiciaires de 20 ou 30 000$ à force de vivre dans l’espace public. Nous savons très bien que ces dettes judiciaires ont pour conséquence l’emprisonnement. Ces personnes sont fragilisées et les coût sociaux ne font qu‘augmenter. Actuellement les prisons sont pleines. Nous dénonçons aussi le profilage racial. Ce n’est pas plus normal de ce faire intercepter à chaque fois qu’on se promène en voiture pour le simple fait d’être noir, ou immigrant, immigrante.

Il y a aussi plusieurs groupes cette année qui ont demandé un moratoire sur l’utilisation du pistolet taser. C’est bien, mais nous considérons nécessaire l’arrêt complet et immédiat de l’utilisation du taser. Nous en avons aussi assez de l’hypocrisie du gouvernement dans ce dossier. Ce qui n’est pas surprenant puisqu’un membre du gouvernement Harper est conseiller de la compagnie Taser International. Nous savons aussi que des policiers du SPVM travaillent pour cette compagnie. Nous comprenons donc très bien où est la collusion.

De plus, nous dénonçons l’impunité policière. Même si nous ne sommes pas pour un système punitif, dans le système où nous vivons, n’importe quel citoyen ou citoyenne qui commet un meurtre ira en prison. Mais dans le cas des policiers et policières, de par leur fraternité, sont constamment protégés. À Montréal, il y a eu 42 personnes tuées en 21 ans par des agents et jamais il n’y a eu d’accusation portées contre eux. »

Ce n’est pas ce genre de discours que les médias de masse rapportent dans les journaux et à la télévision. On décrit les manifestants et manifestantes comme une bande de jeunes énervés se révoltants contre l’autorité, des voyous et des casseurs. Il est vrai que depuis quelques années, cette manifestation ne se termine pas dans la paix. Loin de là. Mais tous les propos et les raisons qui poussent ces centaines de personnes à se réunir dans la rue sont noyées par des images montrées en boucles de vitres cassées et d’altercations entre activistes et agents de la police. Et si la violence existe des deux côtés dans ces manifestations, seule les méfaits des «agités» qui revendiquent deviendra publique. Les médias se gardent bien de montrer les abus en provenance des forces de l’ordre.

Mais le fond de cette démonstration populaire reste politique. Comme à chaque fois où les gens prennent la rue. Et cette année, les étudiants et étudiantes étaient plus nombreux qu’à l’habitude. La lutte contre le dégel des frais de scolarité était encore chaude et la répression policière contre ce mouvement avait été et continue d’être immense comme le disait cette militante :

« Durant la dernière année, il y a eu beaucoup de répression politique et policière dans le mouvement étudiant. Entre autre, des arrestations de masse, du poivre de Cayenne et des coups de matraque à profusion utilisés contre nous. Nous sommes donc ici pour nous opposer à ça et dire que nous en avons assez de nous faire taper dessus à chaque fois que nous sortons dans la rue. »

Les revendications ne s’arrêtent pas à dénoncer cette répression ouverte qui grandit contre tout mouvement de protestation. Il y a toute une problématique sociale qui est en jeux. La pauvreté n’est jamais belle et à Montréal, le mot d’ordre est de la faire disparaître pour la saison des festivals. On la cache derrière des barreaux de métal froid. En effet, les itinérants et itinérantes sont la cible des force de police. La façon de procéder est simple. La police utilise les règlements municipaux pour donner aux itinérants et itinérantes des contraventions à outrance. Un exemple : avoir jeté une cigarette sur le sol vaut une amende de 82$. Les « tickets » s’accumulant, les victimes de ces abus d’autorité finissent par devoir à la ville des sommes astronomiques.

«Pour vous donner une petite idée, en janvier 2005 on comptait 600 itinérants qui devaient plus de 3 millions en dette de contravention. Un itinérant peut recevoir parfois jusqu’à 25 « tickets », ce qui vaut beaucoup d’argent. Des montant autour de 6 000$ et même jusqu’à 20000$ par personne même plus quelques fois. Si ces personnes ne peuvent pas payer ces montants, ils doivent aller en prison. Une journée d’emprisonnement équivaut à 15$ de remboursement. Faites le calcul, c’est beaucoup de temps avant de retrouver sa liberté. » Du moins, en voilà assez pour les faire disparaître une bonne partie de l’année. C’est ce que nous dit une des représentantes du groupe STELLA, un groupe de défense des travailleuses du sexe.

Et voilà, le tour est joué. La ville maintenant propre peut laisser place à l’arrivée massive des touristes qui ne seront pas importunés par la vue de la misère…celle qui existe dans toutes les villes du monde capitaliste, aussi riches soient-elles.

Au lieu d’investir dans les organismes communautaires qui pourraient aider ces gens, on préfère augmenter les effectifs de la police. Les gouvernements de tous les paliers ont pris la même tangente: la répression. Et toutes personnes qui ne «fitt pas dans le décor», soit les itinérants et itinérantes, les travailleuses du sexe, les « squidjis », les jeunes au look rebelle, les immigrants et immigrantes qui s’affichent trop et tous les autres qui peuvent se dire appartenant à une population marginalisée en subissent les conséquences. Répression et discrimination, voilà une bonne façon de décrire la police et ses actions.

jeudi 29 mai 2008

Justice pour les peuples autochtones! Appuyez les manifestations de protestations du 29 mai!

Déclaration du Comité exécutif central et de la Commission des peuples autochtones du Parti communiste du Canada

Dans le contexte du renforcement des mouvements autochtones de base, l'Assemblée des Premières Nations (APN) a convoqué une deuxième "Journée nationale d'action" annuelle pour le 29 mai. Cet appel de l'APN reflète les justes revendications des nations ayant le statut d'autochtones relativement aux réserves. Cette Journée représente pour nous l'occasion très attendue de soutenir l'appel de l'APN et de soulever un débat plus profond et plus large au sujet de tous les peuples dont le statut d'autochtones est reconnu ou non de ce pays appelé "Canada".

La Journée nationale d'action survient à un moment critique de croissance des luttes des peuples autochtones pour défendre leurs territoires traditionnels et mettre fin à la pauvreté et au racisme. Le Parti communiste du Canada demande instamment au mouvement syndical et aux mouvements démocratiques de participer massivement à la Journée nationale d'action et à toutes les luttes des Autochtones. Nous nous engageons à intensifier notre appel en faveur d'une véritable égalité de toutes les nations à l'intérieur du Canada, et du règlement adéquat des justes revendications des peuples autochtones, y compris un règlement rapide des revendications territoriales fondée sur la pleine reconnaissance des droits ancestraux inhérents. Nous exigeons que les peuples autochtones puissent faire appliquer les mesures judiciaires nécessaires pour faire cesser l'exploration des ressources et de tous les autres projets réalisés sur leurs terres traditionnelles en attendant le règlement des réclamations, s'ils le souhaitent.

Plus de 500 ans après le début, par un véritable génocide, de la colonisation impérialiste, les peuples autochtones des Amériques intensifient toujours davantage leur résistance en développant leur force et leur unité. Nous saluons les progrès politiques historiques réalisés par la classe ouvrière en Amérique latine, tels que l'élection d'Evo Morales en Bolivie, en grande partie fondée sur les luttes des puissants mouvements indigènes contre l'impérialisme états-unien et ses alliés locaux.

Le Canada n'est pas isolé de ce processus puisque les peuples autochtones de ce pays souffrent du même type d'oppression que ceux du reste de l'hémisphère. L'honteuse réalité est que les taux de chômage et de pauvreté sont beaucoup plus élevés chez les peuples autochtones qu'au sein de n'importe quel autre groupe du Canada. Le taux de suicide des jeunes autochtones est d'environ dix fois supérieur à celui de l'ensemble de la population. 43 % des enfants des Premières Nations ne reçoivent pas de soins dentaires de base. Depuis des années, plus de 100 collectivités autochtones sont placés sous la consigne de faire bouillir l'eau, fait qui ne serait toléré dans aucune autre région. Le taux de surpeuplement des familles autochtones est le double de celui de toutes les autres familles canadiennes. Presque la moitié des foyers autochtones sont contaminés par la moisissure. L'amiante, les pesticides et les résidus miniers constituent un problème particulièrement mortel au sein des communautés autochtones.

Les décennies passent mais ces chiffres effroyables ne changent que rarement. Or le gouvernement Harper, au lieu de prendre des mesures décisives pour améliorer les conditions de vie, est même allé jusqu'à abolir l'aide fiscale limitée accordé par l'Accord de Kelowna et à rejeter la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.

Forcé par l'opinion publique de faire au moins un geste symbolique vers l'égalité, le premier ministre Stephen Harper a annoncé des plans pour la présentation d'"excuses" pour l'affaire des pensionnats, qui a été un véritable génocide culturel. En fait un plus grand nombre d'enfants autochtones sont aujourd'hui séparés de leurs familles que jamais auparavant, et les meurtres de centaines de femmes autochtones n'ont toujours pas été élucidés et ne sont toujours pas reconnus.

En même temps les conservateurs et les organismes de police sont en train de criminaliser les jeunes autochtones en affirmant, par exemple, que l'opposition aux Jeux olympiques d'hiver de 2010 à Vancouver est dirigée par des "terroristes autochtones". Ce mensonge survient après que l'on ait révélé l'année dernière qu'un manuel des Forces armées canadiennes contient une liste de mouvements de résistance autochtone incluant des groupes soi-disant «terroristes» et considère clairement ceux-ci comme étant des cibles d'attaques militaires. En Ontario, les Six membres de la nation KI (Kitchenuhmaykoosib Inninuwug), et Robert Lovelace, porte-parole des Algonquins Ardoch sont encore en prison pour avoir commis le "crime" de s'opposer à l'exploitation des territoires traditionnels par les grandes entreprises. Les politiques racistes des conservateurs de Harper et des gouvernements provinciaux ouvrent la voie à de nouvelles attaques de la police contre les peuples autochtones et peuvent entraîner de nouveaux incidents tragiques tel que celui d'Ipperwash.

Les personnes qui refusent d'accepter l'injustice et l'oppression ne sont pas des "terroristes" ou des "criminels". Les vrais criminels sont les grandes entreprises et les gouvernements qui tirent profit du vol des terres autochtones alors que les familles vivent dans un état désespérant de pauvreté.

La vérité est que l'État canadien a été fondé sur le vol de territoires autochtones. La plupart des terres occupées par le Canada ont tout simplement été volées à la population autochtone pour qu'elles soient utilisées par les colons. Tous les traités signés de nation à nation ont été violés presque immédiatement par les autorités colonisatrices pour empiéter davantage sur les terres autochtones. Bien que ces terres et ces ressources aient été exploitées et aient enrichi les grandes entreprises locales et les transnationales étrangères qui dominent l'économie canadienne, les peuples autochtones continuent de souffrir des taux intolérables de pauvreté, de chômage, d'analphabétisme et de maladie.

Le moment est venu de payer le loyer. Les Premières nations, les Métis et les Inuits exigent que l'on mette fin à des décennies et à des siècles de souffrances et d'humiliations nationales innombrables. Les revendications territoriales des Six Nations de Caledonia, la lutte des Mohawks de Tyendinaga, la résistance de la nation KI contre l'exploration minière sur leurs territoires traditionnels, le blocus de Grassy Narrows dans le nord-ouest de l'Ontario, les protestations croissantes contre la constructions d'installations liées aux Jeux olympiques sur des territoires autochtones non cédés de la Colombie britannique sont quelques-unes des mises en garde que la violation raciste et criminel des droits autochtones ne seront pas acceptées. Malgré les revers judiciaires, les Métis du Manitoba continuent leur lutte pour renverser la situation quant au vol de leurs terres perpétré au moment de la Confédération.

Le Parti communiste condamne les politiques racistes des conservateurs de Harper et exprime sa pleine solidarité avec la Journée nationale d'action du 29 mai et avec toutes les luttes autochtones menées à travers le Canada. Nous continuerons à faire notre part pour aider à mobiliser la population en vue d'un plein appui à toutes ces actions.

Nous voulons des relations égalitaires et justes entre toutes les nations du Canada. Nous voulons une nouvelle constitution démocratique basée sur l'égalité et sur le partenariat volontaire des peuples autochtones, du Québec et du Canada anglais, qui reconnaisse les droits nationaux des peuples autochtones et ceux du Québec à l'autodétermination, jusqu'à et y compris la sécession. Nous voulons un règlement juste et rapide des revendications territoriales autochtones, y compris celles concernant les ressources naturelles, et, de toute urgence, la mise en oeuvre de mesures pour améliorer les conditions de vie, l'emploi, la santé et le logement des peuples autochtones.

Aucun processus visant la réalisation de ces objectifs ne peut fonctionner sans le plein respect des droits nationaux des nations autochtones, et, en particulier, du droit à l'autodétermination ainsi que des droits issus des traités et des droits constitutionnels.

Nous sommes fiers de la vision de notre Parti pour le Canada. L'intérêt croissant que les peuples autochtones manifestent envers le Parti communiste du Canada est le résultat de nombreuses décennies de lutte pour une égalité nationale authentique et pour atteindre l'objectif d'un Canada socialiste, qui fera en sorte que ces politiques, depuis longtemps désirées, deviennent une réalité. Rien de moins ne peut faire cesser les conséquences tragiques de cinq cents ans d'oppression coloniale raciste. Nous lutterons inlassablement pour ces objectifs jusqu'à ce que ce terrible héritage soit effacé!

mercredi 21 mai 2008

Statistique Canada confirme que les écarts de revenu croissent de plus en plus rapidement

(Traduction d’un article provenant de l’édition du 16-31 Mai 2008 du People's Voice, le principal journal communiste au Canada. Ses articles peuvent être reproduits gratuitement si la source est citée. Abonnement au Canada: $ 25/année, ou $ 12 pour les faibles revenus; abonnement pour les États-Unis - 25 $ US par année; abonnement d'outre-mer - $ 25 US ou 35 $ CAN par année. Envoyer à: People's Voice, c / o PV Business Manager, 133 Herkimer St., Unit 502, Hamilton, ON, L8P 2H3.)

Par Kimball Cariou

Au cours de la longue période de soi-disant «croissance » précédant le présent ralentissement économique, la plupart des travailleuses-eurs au Canada se sont appauvris, et l'écart entre les riches et les pauvres continue de se creuser. C'est la conclusion que tire Statistique Canada des chiffres du recensement de 2006 qu’elle vient de publier.


Selon Armine Yalnizyan, économiste principal au Centre canadien de politiques alternatives (CCPA), «Les Canadiennes-iens ont eu à pédaler aussi vite qu'ils pouvaient mais ils ne sont pas rendus beaucoup plus loin qu'ils ne l'étaient lorsqu’ils étaient moins nombreux à travailler, qu’ils travaillaient moins d'heures et qu’ils étaient moins instruits. "

Statistique Canada rapporte que le revenu médian de tous les Canadiennes-iens qui travaillent à plein temps a augmenté d’un infime 0,1 % à 41 401 $ en 2005, contre 41 348 $ en 1980 (en tenant compte de l’inflation, un gain réel d’un dollar par semaine en dollars de 2005).

Pendant ce temps, la tranche supérieure de 20 % des salariées-és ont vu leurs revenus bondir de 16,4 %, y compris un gain de 6,2 % depuis 2000. La proportion de Canadiennes-iens gagnant plus de 100 000 $ est passé de 3,4 % en 1980 à 6,5 % en 2005. La tranche de 20 % des plus pauvres a vu ses revenus diminuer de 20,6 % depuis 1980.

Un Canadiennes-iens sur neuf (11,4 % de la population, soit 3,5 millions de personnes, dont près de 900 000 de moins de 18 ans) peut être considéré ayant un faible revenu en 2005, c’est-à-dire qu’il dépense au moins un cinquième de son revenu de plus que les familles moyennes pour les premières nécessités comme la nourriture, le logement et l'habillement.

Les taux de pauvreté sont plus élevés chez les enfants et les jeunes. En 2005, 14,5 pour cent des enfants âgés de 5 ans et moins faisaient partie d'une famille à faible revenu, de même que 13 pour cent des enfants âgés de 6 à 14 ans.

Certains économistes s'étonnent que les revenus aient baissé pour de nombreux Canadiennes-iens, tandis que l'économie a progressé de 2,4 pour cent entre 2000 et 2005.

Le président d’Informetrica Mike McCracken, par exemple, a déclaré: «Vous pourriez vous attendre qu’une économie qui a été plus performante contribue à élever aussi la couche inférieure comme partie du tout étant donné qu’une marée montante soulève tous les navires ". Bien sûr, les cyniques diront, «elle ne soulève seulement que les yachts, et nous constatons cela."

Le rapport de Statistique Canada a également constaté ce qui suit:

* Le revenu médian des mères monoparentales en 2005 était de $ 36 765, soit plus élevé qu'en 1980 mais demeurait le plus faible de tous les principaux types de famille économique.

* Les immigrants ont perdu beaucoup de terrain par rapport à leurs homologues canadiens. En 1980, les immigrants récemment arrivés au pays ayant un revenu d’emploi gagnaient 85 cents pour chaque dollar reçu par les employés nés au Canada. En 2005, le rapport était tombé à 63 cents pour les hommes, et seulement 56 cents pour les femmes. (Statistique Canada suggère comme explication que de nombreux nouveaux arrivants sont arrivés avec une formation dans le secteur de l'information et de la technologie au moment où ce secteur est en déclin; cette explication semble toutefois insuffisante, considérant l’agrandissement catastrophique des écarts de rémunération.)

* L'écart salarial entre les jeunes hommes et les jeunes femmes est demeuré stable après avoir connu une réduction pendant des années. L'écart de salaire entre les sexes, inchangé depuis le dernier recensement, fait que les femmes gagnent en moyenne 85 cents pour chaque dollar gagné par un homme.

Le CCPA dans son dernier rapport sur cette question (Un quart de siècle de l'inégalité économique au Canada) contient des données fascinantes sur les tendances à long terme que dévoilent les chiffres de Statistique Canada.

Par exemple, une analyse détaillée de la rémunération des salariés révèle que sa valeur totale était d'environ 51% du total du produit intérieur brut en 1961. Cette proportion est passée à 54% vers le milieu des années 1970, lorsque le gouvernement libéral de Trudeau a imposé le contrôle des salaires et des prix», un moyen de limiter la hausse des salaires et pour augmenter le transfert de plus de richesse vers les riches et les entreprises. Après quelques hauts et quelques bas, la rémunération des employés qui avait connu un forte hausse à partir de la fin des années 1980, est passé à un peu moins de 50% du PIB en 2005. Cette tendance est un facteur déterminant dans l'accroissement des écarts de revenu signalé par Statistique Canada.

Un autre élément d'information important du CCPA est un graphique montrant l'histoire des salaires au Canada. Exprimé en dollars de 2006, le véritable salaire horaire moyen était environ de 5 $ durant la Première Guerre mondiale. Au cours des décennies suivantes, conséquemment aux luttes nombreuses de la classe ouvrière et au développement de la syndicalisation, le salaire horaire moyen a grimpé à environ 23 $ (en dollars de 2006) en 1975. Par la suite à cause des attaques « néolibérales » contre la classe ouvrière, puis de la profonde récession du début des années 1980, les taux horaires réels ont diminué, mais ont légèrement augmenté à nouveau vers la fin des années 1990. Au cours de cette même période, bien sûr, les bénéfices des sociétés ont commencé une ascension les menant aujourd'hui à une hauteur vertigineuse.

Finalement, les conclusions du CCPA concernant valeur nette des familles canadiennes sont également importantes. Le cinquième des familles les plus pauvres représentaient -0,5% de la richesse nette totale de toutes les familles en 1977, un chiffre qui n’a changé que légèrement à

-0,6% en 2005. Ces familles ont plus de dettes que la valeur totale de leurs actifs.

Pendant ce temps, le dix pour cent des familles les plus riches ont vu une forte augmentation de leur part, passant de 50,6% en 1977 à 58,2% en 2005.

Entre ces deux extrêmes, les 70% des familles qui restent ont vu leur part totale passer de 50% en 1977 à environ 43% en 2005, le plus gros du déclin s’étant produit depuis 1999.

La lutte des classes est une réalité quotidienne sous le capitalisme. Depuis les trente dernières années, la classe dirigeante canadienne a mené une lutte déterminée pour diminuer les revenus et récupérer la richesse conquise par la classe ouvrière au cours des décennies qui avaient précédé. Pour renverser cette attaque, il faudra une puissante mobilisation à plusieurs niveaux du mouvement ouvrier et de ses alliés, non seulement dans le cadre des négociations collectives, mais aussi pour mener des batailles sur le terrain politique et idéologique, dans la vaste arène extra-parlementaire.

dimanche 18 mai 2008

Toute personne assez bonne pour travailler est assez bonne pour rester au pays!

Déclaration du Parti communiste du Canada :
Non au projet de loi C-50!
Non à ce projet de loi anti-ouvrier, anti-démocratique et inhumain!
Votez pour défaire les conservateurs de Harper!


Non aux attaques des conservateurs contre les droits des immigrants/antes!

Votez pour défaire les conservateurs de Harper!

Message du Parti communiste du Canada

Le gouvernement Harper propose l’adoption d’une série de changements dangereux et réactionnaires au système d’immigration du Canada. Entre autres la ministre de l’Immigration aurait de nouveaux pouvoirs, étendus et arbitraires, lui permettant d’imposer des quotas, de rejeter des demandes d'immigration et de donner la priorité à certaines demandes plutôt qu'à d'autres. Ces changements réduiraient également les possibilités des Canadiennes/iens de la classe ouvrière de parrainer des membres de leur famille se trouvant à l'étranger pour des motifs d'ordre humanitaire et de compassion.

Ces changements constituent des amendements à la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés (LIPR). Ils sont inclus pêle-mêle dans le projet de loi C-50, projet de loi omnibus, que le gouvernement Harper compte faire adopter par le Parlement bientôt.

En résumé, les changements proposés par le projet de loi C-50 serviraient les intérêts des employeurs et les grandes entreprises nationales et transnationales en accroissant le gigantesque bassin de main-d'oeuvre constitué par les travailleuses/eurs étrangères/ers et en éliminant certaines protections des lois du travail pour une plus grande partie de la classe ouvrière.

Ces changements visent à faire reculer les droits de toutes/tous les autres travailleuses/eurs, forçant ainsi ces dernières/iers à concurrencer avec des travailleuses/eurs temporaires étrangères/ers soumis par les lois et les patrons racistes à de bas salaires, à de longues heures et à des conditions effarantes par rapport aux autres travailleuses/eurs.

Ils visent à remplacer l'immigration par le séjour de travailleuses/eurs temporaires, super-exploitées/és et à nuire aux travailleuses/eurs immigrantes/ants ou nées/nés au Canada. Ils visent à créer des divisions racistes.

Ils visent le nivellement vers le bas, une exploitation encore plus intense et plus vaste, de super-profits pour les grandes entreprises et un retour en arrière de 100 ans en ce qui concerne les droits du travail et les droits démocratiques au Canada.

Le projet de loi C-50 est anti-ouvrier, anti-démocratique et inhumain

Les conservateurs de Harper ont essayé de cacher cette monstrueuse attaque en mêlant celle-ci à un projet de loi portant sur le budget car ils savaient que la grande majorité des travailleuses/eurs du Canada rejetteraient tout projet de loi portant uniquement sur la main-d'oeuvre et qui serait tellement anti-démocratique, anti-ouvrière et anti-humaine.

Les conservateurs savent que des audiences publiques sur le projet de loi C-50 révéleraient clairement l'agenda raciste, xénophobe et favorable aux grandes entreprises de ce dernier, et aurait pour conséquence une défaite retentissantes aux élections.

Le projet de loi C-50 ne pourrait survivre à un débat public, pas plus que le gouvernement aux révélations politiques qui seraient faites à des audiences publiques. C'est pour cela que le gouvernement a voulu que le projet de loi C-50 soit l'objet d'un vote de confiance. Ils comptent sur les libéraux pour faire adopter le projet de loi.

Pour que le projet de loi C-50 soit rejeté, il faut que le gouvernement soit l'objet de très fortes pressions de la part de l'opposition publique et parlementaire. Mais si le gouvernement refuse de le rejeter, les partis de l'opposition doivent s'unir afin de voter contre le projet de loi, se tourner vers le peuple et demander la tenue d'élections générales; aucun autre choix n'est acceptable.

Le Parti communiste est uni dans l'action avec le mouvement ouvrier, avec les mouvements démocratiques et avec toutes/tous les immigrantes/ants avec ou sans statut, pour défaire cet odieux projet de loi et ce gouvernement réactionnaire et raciste.

Le Canada a besoin d'un nouveau gouvernement et de nouvelles politiques qui mettent le peuple avant les profits. Une coalition populaire vaste, unissant des forces ouvrières, progressistes et démocratiques ayant pour base un programme populaire pour le Canada pourrait défaire l'agenda néo-libéral des grandes entreprises et ouvrir la porte à des changements sociaux fondamentaux.

Telles sont les mesures nécessaires pour assurer que l'agenda d'extrême droite et réactionnaire que promeuvent les conservateurs et les autres partis des grandes entreprises se trouvant au Parlement soit, de façon permanente, ralentie et bloquée.

Le rejet du projet de loi C-50 et la défaite des conservateurs aux élections générales constituent une partie importante des luttes que nous devons mener aujourd'hui.

Le Parti communiste du Canada lance un appel exigeant :

· Le rejet du projet de loi C-50;

· Des audiences publiques portant sur tous les projets de loi sur l'immigration et sur les réfugiées/iés;

· L'engagement de nouveaux employées/és pour mettre fin à l'arriéré de 925 000 demandes, dont certaines remontent à 7 ans;

· L'expansion de l'immigration dans toutes les catégories, y compris des demandes de réunification de la famille et des demandes de réfugiées/iés; l'élimination de règlements racistes et discriminatoires; et la réduction des tarifs;

· L'octroi à toutes/tous les travailleuses/eurs, indépendamment de leur statut, des protections prévues par l'Organisation internationale du travail (OIT) et par la Charte canadienne des droits et libertés, ainsi que l'application des lois du travail fédérales et provinciales à toutes/tous les travailleuses/eurs également, indépendamment de leur statut;

· La poursuite judiciaire des employeurs qui violent ces lois;

· La possibilité aux résidentes/ants sans statuts d'obtenir le statut canadien; la fin des déportations; l'élimination des certificats de sécurité et la restauration de l'habeas corpus;

· La reconnaissance des compétences et des titres des spécialistes et des travailleurs qualifiées/iés formées/és dans les autres pays;

Participez à la lutte contre le projet de loi C-50! Écrivez ou téléphonez au députée/é de votre circonscription; passez une résolution contre le projet de loi C-50 au sein de votre syndicat ou de votre organisation; faites connaître cette question à vos voisins, à vos confrères de travail, à vos connaissances au sujet de cette question. Commencez à agir aujourd'hui!

Oui aux besoins du peuple!

Non à la rapacité des grandes entreprises!

Parti communiste du Canada

290A Danforth Avenue, Toronto, M4K 1N6

Téléphone : 416-469-2446

Internet : www.communist-party.ca

* Ce texte a été produit grâce à du travail volontaire

samedi 17 mai 2008

Les coupables de ce génocide, au poteau, ils sont connus!

Esteban Lazo Hernández

Les propos qu'aucun de nos chers médias n'osera publier. Merci de faire suivre.


INTERVENTION D’ESTEBAN LAZO HERNÁNDEZ, VICE-PRÉSIDENT DU CONSEIL D’ETAT DE LA RÉPUBLIQUE DE CUBA, AU SOMMET PRÉSIDENTIEL « SOUVERAINETÉ ET SÉCURITÉ ALIMENTAIRE. ALIMENTS POUR LA VIE », TENU LE MERCREDI 7 MAI 2008 À MANAGUA (NICARAGUA)

Cher comandante Daniel Ortega, président du Nicaragua ;

Honorables présidents et hauts représentants,

Les chiffres parlent d’eux mêmes. En 2005, nous payions la tonne de riz 250 dollars ; aujourd’hui, nous la payons 1 050, le quadruple. Nous payions la tonne de blé 132 dollars ; aujourd’hui, nous la payons 330, deux fois et demie plus. Nous payions la tonne de maïs 82 dollars ; aujourd’hui, nous la payons 230, quasiment le triple. Nous payions la tonne de lait en poudre 2 200 dollars ; aujourd’hui, nous la payons 4 800, presque le double. C’est là une situation perverse et intenable.

Cette réalité a des retombées internes sur les marchés de la plupart des pays de notre région et du monde, touchant directement la population, en particulier les plus pauvres, et poussant à l’indigence des millions de personnes. Certains pays, voilà à peine quelques décennies, se suffisaient à eux-mêmes en riz et en maïs, mais les recettes néolibérales du FMI les ont incités à libéraliser leur marché et à importer des USA et d’Europe des céréales subventionnées, ce qui a abouti à la suppression de la production nationale. Compte tenu de la flambée des cours susmentionnée, toujours plus de personne ne peuvent plus se nourrir de ces aliments de base. Il n’est donc pas surprenant qu’elles protestent, qu’elles descendent dans la rue afin de trouver le moyen de donner à manger à leurs enfants.

Dès 1996, au Sommet mondial de l’alimentation, Fidel avait lancé un cri d’alerte : « La faim, compagne inséparable des pauvres, est la fille de la distribution inégale des richesses et des injustices dans le monde. Les riches ne connaissent pas la faim. […] Des millions de personnes sont mortes dans le monde en luttant contre la faim et l’injustice. » La crise alimentaire qui nous convoque aujourd’hui est aggravée par les cours élevés du pétrole sur lesquels influe l’aventure militaire en Iraq et par leurs retombées sur la production et le transport des aliments; par les changements climatiques; par le fait que les USA et l’Union européenne consacrent toujours plus de grains et de céréales à la production de biocarburants; et par les pratiques spéculatives du grand capital international qui mise sur les stocks d’aliments sans s’inquiéter de la faim des pauvres. Mais l’essence même de cette crise ne gît pas dans ces phénomènes récents : elle se trouve dans la distribution inégale et injuste des richesses mondiales et dans le modèle économique néolibéral insoutenable imposé ces vingt dernières années au monde avec un fanatisme irresponsable.

Les pays pauvres qui dépendent des importations d’aliments ne sont pas en mesure de supporter ce coup. Leurs populations n’ont aucune protection. Et le fameux marché n’a, bien entendu, ni la capacité ni le sens des responsabilités nécessaires pour la leur procurer. Nous ne sommes pas face à un problème de nature économique, mais devant un drame humanitaire aux conséquences incalculables qui met même en danger la sécurité nationale de nos pays.

Faire retomber la crise sur une consommation accrue d’importants secteurs de la population dans des pays en développement à croissance économique accélérée, telles la Chine et l’Inde, constitue non seulement une prise de position insuffisamment fondée, mais encore une vision raciste et discriminatoire dans la mesure où elle considère comme un problème que des millions de personnes puissent accéder pour la première fois à une alimentation décente et saine !

Le problème, tel qu’il se traduit dans notre région, est lié essentiellement à la situation précaire des petits agriculteurs et de la population rurale dans les pays sous-développés, ainsi qu’au rôle oligopolistique des grandes sociétés transnationales de l’industrie agroalimentaire. Celles-ci contrôlent les cours, les technologies, les normes, les certifications, les réseaux de distribution et les sources de financement de la production alimentaire dans le monde. Elles contrôlent aussi le transport, la recherche scientifique, les fonds génétiques, l’industrie de fertilisants et de pesticides. Leurs gouvernements, en Europe, en Amérique du Nord et ailleurs, imposent les règles internationales qui régissent le commerce des aliments, ainsi que celui des technologies et des intrants permettant de les produire. Les subventions agricoles aux USA et en Union européenne ne font pas qu’enchérir les aliments que vendent ces pays ; elles imposent en plus un obstacle infranchissable à la vente sur leurs marchés des produits des pays en développement, ce qui a une incidence directe sur la situation de l’agriculture et des producteurs du Sud.

Il s’agit bel et bien d’un problème structurel de l’0rdre économique international en place, non d’une crise conjoncturelle qui peut se régler par des palliatifs ou des mesures d’urgence. La récente promesse de la Banque mondiale d’allouer 500 millions de dollars dévalués pour faire face à cette situation n’est pas seulement ridicule : c’est une plaisanterie de mauvais goût.

Pour s’attaquer à ce problème dans son essence et ses causes mêmes, il faut analyser et transformer les règles écrites et non écrites, les règles accordées et les règles imposées qui régissent aujourd’hui l’ordre économique mondial, ainsi que la création et la distribution des richesses, notamment en ce qui concerne la production et la distribution d’aliments. Ce qui est décisif aujourd’hui, c’est envisager un changement profond et structurel de l’0rdre économique et politique international en vigueur, parce qu’antidémocratique, injuste, exclusif et intenable. Un ordre prédateur, responsable de situations telles que celles que Fidel dénonçait voilà douze ans : « Les eaux se polluent, l’atmosphère s’empoisonne, la nature se détruit. Ce n’est pas seulement la rareté des investissements, le manque d’éducation et de technologies, la croissance démographique accélérée, c’est aussi que l’environnement se dégrade et que l’avenir est toujours plus hypothéqué. »

Par ailleurs, la coopération internationale nécessaire pour faire face à ce moment de crise s’avère indispensable. Des mesures d’urgence doivent permettre d’alléger rapidement la situation des pays où des émeutes sociales ont déjà éclaté. Il faut aussi promouvoir sur le moyen terme des plans de coopération et d’échanges, accompagnés d’investissements conjoints qui accéléreront dans notre région la production agricole et la distribution d’aliments, et assortis d’un engagement résolu et d’une forte participation de l’Etat. Cuba est disposée à contribuer modestement à un effort de ce genre.

Le Programme que nous propose aujourd’hui le compañero Daniel en vue de concerter les efforts, les volontés et les ressources des membres de l’Alternative bolivarienne pour les Amériques (ALBA) et des pays centraméricains et caribéens mérite tout notre appui. Il présuppose que nous comprenions clairement que la situation alimentaire mondiale n’est pas une opportunité, comme le pensent certains, mais une crise très dangereuse. Il implique que nous reconnaissions expressément que nous devons orienter nos efforts à la défense du droit à l’alimentation pour tous et à une vie digne pour les millions de familles paysannes jusqu’ici spoliées, et non que nous saisissions l’occasion pour favoriser des intérêts corporatifs ou de mesquines opportunités commerciales. Nous avons longuement discuté ce point. Il nous faut maintenant agir unis, avec audace, en faisant preuve de solidarité et d’esprit pratique.

Si tel est l’objectif commun, alors on peut compter sur Cuba. Je conclus en rappelant les paroles prévoyantes de Fidel en 1996, toujours aussi actuelles par leur profondeur : « Les cloches qui sonnent aujourd’hui le glas pour ceux qui meurent de faim tous les jours sonneront demain pour l’humanité entière si celle-ci ne veut pas, ou ne sait pas ou ne peut pas être assez sage pour se sauver elle-même. »

Je vous remercie.

La famine mondiale

Michel Chossudovsky

4 mai 2008
Global Research / Alter Info

globalresearch.ca
Traduit par Dany Quirion pour Alter Info


En cette époque d'après-guerre froide, l'humanité est confrontée à une crise économique et sociale d'une ampleur sans précédent et qui entraîne un appauvrissement rapide de larges secteurs de la population mondiale. Les économies nationales s'effondrent, le chômage est endémique. Des famines se déclarent en Afrique subsaharienne, en Asie du Sud et dans certaines parties de l'Amérique latine. Cette « mondialisation de la pauvreté, » qui a annulé bon nombre des progrès de la décolonisation d'après-guerre, a commencé dans le tiers-monde avec la crise de la dette du début des années 1980 et l'imposition des réformes économiques meurtrières du Fonds monétaires international (FMI).

Ce Nouvel Ordre Mondial se nourrit de la pauvreté humaine et de la destruction de l'environnement. Il engendre la ségrégation sociale, il encourage le racisme et les conflits ethniques et s'attaque aux droits des femmes et il précipite souvent les pays dans des affrontements destructeurs entre les nationalités. Depuis les années 1990, il s'étend, par l'entremise du « libre marché », dans toutes les régions du monde y compris l'Amérique du Nord, l'Europe occidentale, les pays de l'ex-bloc soviétique et les « nouveaux pays industriels » (NPI) de l'Asie du Sud-est et de l'Extrême-Orient.

Cette crise planétaire est encore plus dévastatrice que la Grande Dépression des années 1930. Elle a de lourdes conséquences géopolitiques; le démembrement économique donne lieu à des guerres régionales, à la fracture des sociétés nationales et, dans certains cas, à l'anéantissement de pays. Elle constitue de loin la plus grave crise économique des temps modernes. (Livre de Michel Chossudovsky intitulé : Mondialisation de la pauvreté et le nouvel ordre mondial)


Introduction

La famine est le résultat d'un processus de restructuration en « marché libre » de l'économie mondiale qui prend ses assises dans la crise de la dette du début des années 1980. Ce n'est pas un phénomène récent, tel qu'il a été suggéré par plusieurs reportages des médias occidentaux, en se concentrant strictement sur l'offre et la demande à court terme des produits agricoles de base.

La pauvreté et la sous-alimentation chronique sont des conditions qui préexistaient avant les récentes hausses des prix des produits alimentaires. Ces derniers frappent de plein fouet une population appauvrie, qui a à peine les moyens de survivre.

Des émeutes de la faim ont éclaté presque simultanément dans toutes les grandes régions du monde:

« Les prix des denrées alimentaires en Haïti a augmenté en moyenne de 40 % en moins d'un an, avec le coût des produits de première nécessitée tels que le riz qui a doublé... Au Bangladesh, [à la fin avril 2008] quelques 20,000 travailleurs du textile sont descendus dans la rue pour dénoncer l'augmentation vertigineuse des prix des produits alimentaires et aussi pour demander des salaires plus élevés. Le prix du riz dans le pays a doublé au cours de la dernière année, menaçant les travailleurs qui gagnent un salaire mensuel de seulement 25 $ et qui ont faim. En Égypte, des protestations de travailleurs concernant les prix des produits alimentaires a secoué le centre industriel du textile de Mahalla al-Kobra, au nord du Caire, pendant deux jours la semaine dernière, où deux personnes ont été abattues par les forces de sécurité. Des centaines de personnes ont été arrêtées et le gouvernement a envoyé des policiers en civil dans les usines pour forcer les travailleurs à travailler. Les prix des denrées alimentaires ont augmenté de 40% en Égypte au cours de la dernière année... Plus tôt ce mois-ci, en Côte d'Ivoire, des milliers de personnes ont marché vers la maison du président Laurent Gbagbo, scandant "nous sommes affamés" et "a vie est trop chère, vous allez nous tuer".

Des manifestations de même nature ainsi que des grèves et des affrontements sont survenus en Bolivie, au Pérou, au Mexique, en Indonésie, aux Philippines, au Pakistan, en Ouzbékistan, en Thaïlande, au Yémen, en Éthiopie et à travers la majeure partie de l'Afrique subsaharienne
. » (Bill Van Auken, Amid mounting food crisis, governments fear revolution of the hungry, Global Research, April 2008)

Avec de grands pans de la population mondiale déjà bien en dessous du seuil de pauvreté, la hausse des prix des denrées alimentaires de base qui se produit sur une courte période est dévastatrice. Des millions de personnes dans le monde sont dans l'incapacité d'acheter de la nourriture pour leur survie

Ces augmentations contribuent d'une manière très réelle à « éliminer les pauvres » à travers « la mort par la famine. » Dit dans les mots de Henry Kissinger: « Contrôlez le pétrole et vous contrôlerez les nations, contrôlez la nourriture et vous contrôlerez la population. »

À cet égard, Kissinger a fait savoir à travers le « Mémorandum d'études sur la sécurité nationale de 1974: Les implications de la croissance de la population mondiale sur la sécurité et les intérêts étrangers des États-Unis, » que des famines récurrentes pourraient constituer de facto un instrument de contrôle de la population.

Selon l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture, le prix des céréales a augmenté de 88% depuis mars 2007. Le prix du blé a augmenté de 181% sur une période de trois ans. Le prix du riz a augmenté de 50% dans les trois derniers mois (Voir Ian Angus, Food Crisis: "The greatest demonstration of the historical failure of the capitalist model", Global Research, April 2008):

« La plus populaire variété de riz de la Thaïlande se vendait il y a 5 ans 198 $ US et à 323 $ la tonne l'an dernier. En avril 2008, le prix a atteint 1000 $. Les augmentations sont encore plus élevées sur les marchés locaux; en Haïti, le prix d'un sac de 50 kilos de riz a doublé en une semaine à la fin mars 2008. Ces augmentations sont catastrophiques pour les 2,6 milliards de personnes dans le monde qui vivent avec moins de 2 $ US par jour et qui consacrent de 60% à 80% de leurs revenus à l'alimentation. Des centaines de millions de personnes n'ont pas les moyens de manger » (Ibid)

Deux dimensions interdépendantes

Il y a deux dimensions interdépendantes dans la crise alimentaire mondiale en cours, qui plonge des millions de personnes à travers le monde dans la famine et la privation chronique, une situation où des pans entier de la population n'ont plus les moyens d'acheter de la nourriture.

Tout d'abord, il y a un processus historique à long terme de politiques de réforme macroéconomiques et de restructuration économique mondiale, qui a contribué à baisser le niveau de vie partout dans le monde, autant dans les pays développés que dans les pays en développement.

Deuxièmement, ces conditions historiques préexistantes de pauvreté de masse ont été exacerbées et aggravées par la récente flambée des prix des céréales, qui a entraîné dans certains cas, le doublement du prix de détail des denrées alimentaires de base. Ces hausses de prix sont en grande partie le résultat de la spéculation boursière sur les denrées alimentaires de base.

La soudaine augmentation spéculative sur le prix des céréales

Les médias ont induit en erreur l'opinion publique sur les causes de ces hausses de prix, en se concentrant presque exclusivement sur la question des coûts de production, le climat et d'autres facteurs qui ont pour effet de réduire l'offre et qui pourraient contribuer à gonfler les prix des aliments de base. Bien que ces facteurs puissent entrer en jeu, ils ont un lien limité pour expliquer l'impressionnante et spectaculaire hausse des prix des produits de base.

L'escalade des prix des produits alimentaires est en grande partie le résultat d'une manipulation du marché. Elle est en grande partie attribuable à la spéculation boursière sur les marchés des matières premières. Les prix des céréales sont artificiellement gonflés par la spéculation à grande échelle sur les opérations des marchés boursiers de New York et de Chicago. Il est intéressant de noter qu'en 2007, le Chicago Board of Trade (CBOT), a fusionné avec le Chicago Mercantile Exchange, formant la plus importante entité au monde traitant dans le commerce des produits de base et comptant un large éventail d'instruments spéculatifs (les options, les options sur contrat à terme, les fonds indiciels, etc.)

Des transactions spéculatives sur le blé, le riz ou le maïs, peuvent se produire sans qu'il y ait de transactions réelles de ces produits.

Les institutions qui actuellement spéculent sur le marché des céréales ne sont pas nécessairement impliquées dans la vente ou la livraison des grains. Les transactions peuvent se faire par fonds indiciels qui permettent de parier sur la hausse ou la baisse en général de la variation des prix des marchandises.

Une « option de vente » est un pari que les prix vont baisser, une « option d'achat » est un pari que les prix vont augmenter. Grâce à la manipulation concertée, les opérateurs institutionnels et les institutions financières font augmenter les prix, et alors ils placent leurs paris sur la hausse du prix d'un produit en particulier. La spéculation génère la volatilité du marché. À son tour, l'instabilité qui en résulte encourage la poursuite de l'activité spéculative.

Les bénéfices sont réalisés lorsque le prix monte. En revanche, si le spéculateur est un short-selling 1, le bénéfice sera réalisé lorsque le prix diminuera.

Cette récente flambée spéculative des prix des denrées alimentaires a engendré un processus mondial de création de la famine à une échelle sans précédent.

Ces opérations spéculatives ne devraient pas pouvoir engendrer délibérément la famine. Ce qui cause la famine est l'absence de procédures réglementaires relatives au commerce spéculatif (les options, les options sur contrat à terme, les fonds indiciels). Dans le contexte actuel, un gel des transactions spéculatives sur les produits alimentaires de base, décrété par décision politique, contribuerait immédiatement à faire baisser les prix des produits alimentaires.

Rien n'empêche que ces opérations soient neutralisées et désamorcées par un ensemble soigneusement élaboré de mesures réglementaires.

Visiblement, ce n'est pas ce qui est proposé par la Banque mondiale et le Fonds monétaire international (FMI).

Le rôle du FMI et de la Banque mondiale

La Banque mondiale et le FMI ont présenté un plan d'urgence, afin d'accroître l'agriculture en réponse à la « crise alimentaire. » Cependant, les causes de cette crise ne sont pas prises en compte.

Robert B. Zoellick, le président de la Banque mondiale décrit cette initiative comme un « new deal, » un plan d'action « pour un accroissement à long terme de la production agricole, » qui consiste entre autres à doubler les prêts agricoles pour les agriculteurs africains.

« Nous devons mettre de la nourriture dans des bouches qui ont faim. C'est aussi abrupt que cela. » (Robert Zoellick, président de la Banque mondiale, citée par Le Figaro, le 14 avril 2008)

La « médecine économique » du FMI et de la Banque mondiale n'est pas la « solution, » elle est plutôt en grande partie la « cause » de la famine dans les pays en développement. Plus le FMI et la Banque mondiale prêtent « pour accroître l'agriculture » et plus ils augmenteront les niveaux d'endettement.

La « politique de prêts » de la Banque mondiale consiste à accorder des prêts à la condition que les pays se conforment à l'agenda politique néolibérale qui, depuis le début des années 1980, a été propice à l'effondrement de l'agriculture alimentaire locale.

La « stabilisation macro-économique » et les programmes d'ajustement structurel imposés par le FMI et la Banque mondiale aux pays en développement (comme condition de renégociation de leur dette extérieure) ont conduit à l'appauvrissement de centaines de millions de personnes.

Les dures réalités économiques et sociale derrières les interventions du FMI sont les causes à l'augmentation démesurée des prix des produits alimentaires, des famines au niveau local, des licenciements massifs de travailleurs urbains et de fonctionnaires et de la destruction des programmes sociaux. Le pouvoir d'achat interne s'est effondré, les cliniques de santé contre la famine et les écoles ont été fermées, des centaines de millions d'enfants ont été privés du droit à l'enseignement primaire.

La déréglementation des marchés céréaliers

Depuis les années 1980, les marchés céréaliers ont été déréglementés sous la supervision de la Banque mondiale et des surplus céréaliers des États-Unis et de l'Union européenne ont systématiquement été utilisés pour détruire la paysannerie et pour déstabiliser l'agriculture alimentaire nationale. À cet égard, les prêts de la Banque mondiale exigent la levée des barrières commerciales sur les importations de produits agricoles de base, conduisant au dumping des surplus céréaliers des États-Unis et de l'Union européenne sur le marché local. Ces mesures et d'autres ont mené les producteurs agricoles locaux à la faillite.

Un « marché céréalier libre, » imposé par le FMI et la Banque mondiale, détruit l'économie paysanne et affaibli la « sécurité alimentaire. » Le Malawi et le Zimbabwe étaient auparavant des pays prospères en excédent céréalier, le Rwanda était pratiquement autosuffisant en matière alimentaire jusqu'à 1990, date à laquelle le FMI a ordonné le dumping des excédents céréaliers de l'Union européenne et des États-Unis sur le marché intérieur, précipitant ainsi les petits agriculteurs en faillite. En 1991-1992, la famine a frappé le Kenya, un pays qui connaissait un succès pour ses surplus céréaliers. Le gouvernement de Nairobi avait précédemment été mis sur une liste noire pour ne pas avoir obéi à des recommandations du FMI. La déréglementation du marché des céréales a été exigée comme une des conditions pour le rééchelonnement de la dette extérieure de Nairobi avec les créanciers officiels du Club de Paris. (Livre de Michel Chossudovsky, Mondialisation de la pauvreté et le nouvel ordre mondial)

Dans toute l'Afrique, ainsi qu'en Asie du Sud-est et en Amérique latine, le modèle des « ajustement structurel » dans l'agriculture sous la tutelle des institutions de Bretton Woods a servi de manière sans équivoque à la disparition de la sécurité alimentaire. La dépendance vis-à-vis du marché mondial a été renforcée entraînant une augmentation des importations de céréales commerciales, ainsi qu'une augmentation de l'afflux « d'aide alimentaire. »

Les producteurs agricoles ont été encouragés à abandonner l'agriculture alimentaire et à se convertir dans des cultures de « haute valeur » à des fins d'exportation, souvent au détriment de l'autosuffisance alimentaire. Les produits de grande valeur ainsi que les cultures à des fins d'exportation ont été soutenus par des prêts de la Banque mondiale.

Les famines à l'ère de la mondialisation sont le résultat de politique. La famine n'est pas la conséquence d'un manque de nourriture, c'est en fait tout le contraire: les surplus alimentaires mondiaux sont utilisés pour déstabiliser la production agricole dans les pays en développement.

Strictement réglementée et contrôlée par l'industrie agroalimentaire internationale, cette offre excédentaire est finalement propice à la stagnation de la production et de la consommation des produits alimentaires de base essentiels et à l'appauvrissement des agriculteurs dans le monde. En outre, en cette époque de mondialisation, les programmes d'ajustement structurel du FMI et de la Banque mondiale ont un lien direct sur le processus de développement de la famine, car ils affaiblissent systématiquement toutes les catégories d'activités économiques urbaines ou rurales, qui ne servent pas directement les intérêts du marché mondial.

Les revenus des agriculteurs dans les pays riches et dans les pays pauvres sont réduits par une poignée d'industriels du secteur de l'agroalimentaire mondial qui en même temps contrôlent les marchés des céréales, les intrants agricoles, les semences et la transformation des aliments. La géante société Cargill Inc avec plus de 140 filiales et sociétés affiliées à travers le monde contrôle une part importante du commerce international des céréales. Depuis les années 1950, Cargill est devenue le principal contractant pour « l'aide alimentaire » des États-Unis financée par la Loi Publique 480 (1954).

L'agriculture mondiale a pour la première fois de l'histoire, la capacité de satisfaire les besoins alimentaires de toute la planète, mais la nature même du marché mondial de ce système ne permet pas que ça se réalise. La capacité de produire de la nourriture est immense mais les niveaux de consommation alimentaire reste extrêmement faibles, car une grande partie de la population mondiale vit dans des conditions d'extrême pauvreté et de privation. En outre, le processus de « modernisation » de l'agriculture a conduit à la dépossession des paysans et à l'augmentation du niveau de dégradation des terres et de l'environnement. Autrement dit, les forces mêmes qui encouragent la production alimentaire mondiale à se développer favorisent également une diminution du niveau de vie et une baisse de la demande de nourriture.

Le traitement choc du FMI

Historiquement, les escalades de prix des produits alimentaires au niveau du commerce en détail ont été déclenchées par la dévaluation des monnaies, qui ont toujours été le résultat invariable d'une situation hyper inflationniste. Par exemple, en août 1990 au Pérou, sur les ordres du FMI, du jour au lendemain le prix du carburant a été multiplié par 30 et le prix du pain a été multiplié par 12 :

« Partout dans le tiers-monde, la situation est celle du désespoir social et de la désolation d'une population appauvrie par l'interaction des forces du marché. Les émeutes contre les programmes d'ajustement structurel et les soulèvements populaires sont sauvagement réprimées: À Caracas, en 1989, le président Carlos Andres Perez qui après avoir dénoncé avec éloquence le FMI d'exercer "un totalitarisme économique qui ne tue pas par des balles mais par la famine", a déclaré un état d'urgence et a régulièrement envoyé des unités d'infanterie et des commandos de la marine dans les quartiers pauvres (barrios de ranchos) sur les collines surplombant la capitale. Les émeutes anti-FMI de Caracas ont été déclenchées à la suite d'une augmentation de 200 % du prix du pain. Hommes, femmes et enfants ont essuyé des tirs sans discernement: "Il a été rapporté que la morgue de Caracas comptait jusqu'à 200 cadavres de personnes tuées dans les trois premiers jours ... et elle a avisé qu'elle était à court de cercueils." Officieusement plus d'un millier de personnes ont été tuées. Tunis, en janvier 1984: les émeutes du pain instiguées en grande partie par de jeunes chômeurs pour protester contre la hausse des prix alimentaires. Au Nigeria en 1989: les émeutes des étudiants contre les programmes d'ajustement structurel ont entraîné la fermeture de six universités du pays par les Forces armées. Au Maroc, en 1990: une grève générale et un soulèvement populaire contre les réformes du gouvernement parrainées par le FMI. » (Michel Chossudovsky, op cit.)

Les semences génétiquement modifiées
La famine mondiale


Coïncidant avec la création de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) en 1995, un autre important changement historique a eu lieu dans la structure de l'agriculture mondiale.

Dans le cadre du contrat de l'Organisation mondiale du commerce (OMC)), les géants de l'agroalimentaire ont une entière liberté d'entrer dans les marchés céréaliers des pays en développement. L'acquisition de « droits de propriété intellectuelle » exclusifs sur les variétés végétales par des intérêts agroindustriels favorise aussi la destruction de la biodiversité.

Agissant au nom d'une poignée de conglomérats de biotechnologie, des semences OGM ont été imposées aux agriculteurs, souvent dans le cadre de « programmes d'aide alimentaire. » Par exemple, en Éthiopie des trousses de semences OGM ont été remis aux agriculteurs pauvres afin de rétablir la production agricole à la suite d'une grande sécheresse. Les semences OGM ont été plantées, ce qui donne une récolte. Mais après, les agriculteurs ont réalisé que les semences OGM ne pourraient pas être replantées sans payer de redevances à Monsanto, Arch Daniel Midland et al. Ensuite, les agriculteurs ont découvert que les graines ne pousseraient que s'ils utilisaient les intrants agricoles soit, les engrais, les insecticides et les herbicides qui sont produits et distribués par les entreprises agroalimentaires de biotechnologie. Toute l'économie paysanne est dorénavant enfermée entre les mains des conglomérats de l'agro-industrie.

Avec l'adoption généralisée de semences OGM, une transition majeure a eu lieu dans la structure et dans l'histoire de l'agriculture depuis sa création il y a 10,000 ans.

La reproduction de semences au niveau des villages et chez les producteurs de semences a été perturbée par l'utilisation de semences génétiquement modifiées. Le cycle agricole, qui permet aux agriculteurs de stocker leurs semences biologiques et de les semer pour en tirer la prochaine récolte a été brisé. Ce concept destructeur, produisant invariablement la famine, est reproduit partout, pays après pays, conduisant à la disparition de l'économie paysanne mondiale.

Michel Chossudovsky est l'auteur du best-seller international "Mondialisation de la pauvreté et le nouvel ordre mondial," qui a été publié en 11 langues. Il est professeur d'économie à l'Université d'Ottawa, Canada, et directeur du Centre de recherche sur la mondialisation Global Research. Il collabore également à l'Encyclopaedia Britannica. Son dernier ouvrage est intitulé ``America`s War on terrorism``, Global Research, 2005. Il est l'auteur de Guerre et mondialisation, La vérité derrière le 11 septembre.

NDT :
1 Short-selling est une technique qui consiste à vendre à découvert ou à crédit. C'est-à-dire qu'une personne vend des actions qu'elle n'a pas à un investisseur. Cette stratégie permet d'anticiper sur un retournement du marché qui permettra alors d'acheter les actions au client qui voudra les revendre à un prix inférieur.


jeudi 8 mai 2008

Les contradictions d’Amnesty International

Salim Lamrani

Amnesty International (AI) est sans aucun doute la plus célèbre organisation de défense des droits de l’homme à travers le monde. Créée en 1961 par l’avocat britannique Peter Benenson, cette organisation non gouvernementale dispose de sections dans plus de cinquante pays et de plus de deux millions d’adhérents à travers la planète. Son travail remarquable en faveur de l’abolition de la peine de mort et de la torture, contre les crimes politiques et pour la libération des prisonniers d’opinion lui a permis de bénéficier du statut d’organisme à caractère consultatif auprès du Conseil économique et social des Nations unies, de l’UNESCO, du Conseil de l’Europe et de l’Organisation des Etats américains, entre autres1.

Les « prisonniers d’opinion »

AI publie chaque année un rapport sur la situation des droits de l’homme dans le monde. Presque aucun pays n’échappe à son regard vigilant. Concernant Cuba, l’organisation internationale fait état de « 69 prisonniers d’opinion » dans son rapport 2007 et explique que ces derniers sont incarcérés pour « leurs positions ou activités politiques non violentes ». Le gouvernement cubain récuse cette charge et accuse AI de partialité. Les relations ont été rompues entre l’organisation et les autorités du pays depuis 1988, date de la dernière visite de AI à Cuba2.

Dans une déclaration du 18 mars 2008, AI a cette fois-ci dénombré « 58 dissidents toujours emprisonnés à travers le pays ». L’organisation souligne que « le seul crime commis par ces 58 personnes est d’avoir exercé de manière pacifique leurs libertés fondamentales ». Kerry Howard, directrice adjointe du programme Amériques d’Amnesty International, note qu’elle « les considère comme des prisonniers d’opinion. Ces personnes doivent être remises en liberté sans délai et sans condition3 ».

Dans son communiqué, l’organisation internationale reconnaît que « la plupart ont été inculpés d’‘actes contre l’indépendance de l’Etat’ ». Amnesty International reconnaît également que ces personnes ont été condamnées « pour avoir reçu des fonds ou du matériel du gouvernement américain pour des activités perçues par les autorités comme subversives ou faisant du tort à Cuba4 ».

Pour se convaincre d’une telle réalité, en vigueur depuis 1959, il suffit de consulter, en plus des archives étasuniennes partiellement déclassifiées, la section 1705 de la loi Torriccelli de 1992, la section 109 de la loi Helms-Burton de 1996 et les deux rapports de la Commission d’Assistance à une Cuba libre de mai 2004 et juillet 2006. Tous ces documents révèlent que le président des Etats-Unis finance l’opposition interne à Cuba dans le but de renverser le gouvernement de La Havane. Il s’agit là du principal pilier de la politique étrangère de Washington à l’égard Cuba5.

Ainsi, la section 1705 de la loi Torricelli stipule que « les Etats-Unis fourniront une assistance, à des organisations non gouvernementales appropriées, pour soutenir des individus et des organisations qui promeuvent un changement démocratique non violent à Cuba6 ».

La section 109 de la loi Helms-Burton est également très claire : « Le Président [des Etats-Unis] est autorisé à fournir une assistance et offrir tout type de soutien à des individus et des organisations non gouvernementales indépendantes pour soutenir des efforts en vue de construire la démocratie à Cuba7 ».

Le premier rapport de la Commission d’assistance à une Cuba libre prévoit la mise en place d’un « solide programme de soutien favorisant la société civile cubaine ». Parmi les mesures préconisées, un financement à hauteur de 36 millions de dollars est destiné au « soutien de l’opposition démocratique et au renforcement de la société civile émergeante8 ».

Le 3 mars 2005, M. Roger Noriega, secrétaire assistant pour les Affaires de l’hémisphère occidental de l’administration Bush, a signalé que 14,4 millions de dollars avaient été ajoutés au budget de 36 millions de dollars prévu dans le rapport de 2004. M. Noriega a même poussé la sincérité jusqu’à dévoiler l’identité de certaines personnes travaillant à l’élaboration de la politique étrangère étasunienne contre Cuba9.

Enfin, le second rapport de la Commission d’assistance à une Cuba libre prévoit un budget de 31 millions de dollars pour financer davantage l’opposition interne. De plus, un financement d’au moins 20 millions de dollars annuels est alloué à ce même effet pour les années suivantes « jusqu’à ce que la dictature cesse d’exister10 ».

Ainsi, aucun doute n’est possible à ce sujet.

Contradictions

AI admet désormais que les personnes qu’elle considère comme des « prisonniers d’opinion » ont « reçu des fonds ou du matériel du gouvernement américain pour des activités perçues par les autorités comme subversives ou faisant du tort à Cuba ». C’est ici que l’organisation internationale entre en pleine contradiction.

En effet, le droit international considère comme illégal le financement d’une opposition interne dans une autre nation souveraine. Une telle politique viole de manière flagrante les principes et les normes qui régissent les relations entre les Etats. Tous les pays du monde disposent d’un arsenal juridique leur permettant de défendre l’indépendance nationale contre ce type d’agression étrangère, en codifiant comme délits les conduites qui favorisent l’application de telles dispositions menant à la subversion. Il s’agit là d’un devoir primordial de tout Etat.

La législation cubaine

La législation cubaine punit de sanctions très sévères toute association avec une puissance étrangère dans le but de subvertir l’ordre établi et de détruire son système politique, économique et social. La loi n° 88 de protection de l’indépendance nationale et de l’économie de Cuba a été adoptée le 15 mars 1999, suite à la décision prise par les Etats-Unis d’accroître les sanctions économiques et le financement de l’opposition interne à Cuba.

Cette législation a pour but, comme le stipule l’Article 1, de « typifier et sanctionner les actes destinés à soutenir, faciliter ou collaborer avec les objectifs de la loi ‘Helms-Burton’, le blocus et la guerre économique contre [le] peuple [cubain], destinés à briser l’ordre interne, déstabiliser le pays et liquider l’Etat socialiste et l’indépendance de Cuba11 ».

La loi prévoit des sanctions de sept à quinze ans de privation de liberté pour toute personne qui « fournirait, directement ou par le biais d’un tiers, au gouvernement des Etats-Unis d’Amérique, ses agences, dépendances, représentants ou fonctionnaires, des informations pour faciliter les objectifs de la loi ‘Helms-Burton’. Cette sanction sera de huit à vingt ans de prison si le délit est commis conjointement par plusieurs personnes ou s’il est stipendié d’une manière ou d’une autre12.

La législation n° 88 sanctionne d’une peine de trois à huit ans de prison le fait d’accumuler, reproduire ou diffuser du matériel à caractère subversif du « gouvernement des Etats-Unis, ses agences, dépendances, représentants, fonctionnaires ou de toute entité étrangère » dans le but de soutenir les objectifs des sanctions économiques et déstabiliser la nation. Les peines seront de quatre à dix ans d’emprisonnement si le délit est réalisé avec le concours d’autres personnes ou s’il est financé13.

Enfin, l’Article 11 stipule que « celui qui […] directement ou par le biais d’un tiers, reçoit, distribue ou participe à la distribution de ressources financières, matérielles ou autre, en provenance du gouvernement des Etats-Unis d’Amérique, ses agences, dépendances, représentants, fonctionnaires ou d’entités privées, est passible d’une privation de liberté de trois à huit ans14 ».

Ainsi, comme l’admet explicitement Amnesty International, les personnes qu’elle considère comme étant des « prisonniers d’opinion » ont en réalité commis un grave délit sévèrement sanctionné par la loi cubaine. Ce faisant, ils sont passés du statut d’opposants à celui d’agents stipendiés par une puissance étrangère et sont donc condamnables au regard de la justice cubaine. Les « prisonniers d’opinion » sont en réalité des mercenaires au service d’une puissance étrangère hostile et belliqueuse.

Spécificité pénale cubaine ?

Il convient également de souligner que les Etats-Unis ont été historiquement l’ennemi acharné de l’indépendance et de la souveraineté de Cuba. En 1898, Washington est intervenu dans la guerre anticoloniale cubaine pour empêcher les Cubains d’accéder pleinement à l’autodétermination et a occupé le pays jusqu’en 1902. Par la suite, Cuba est devenue une espèce de protectorat dominé politiquement et économiquement jusqu’en 1958. A partir de 1959, les Etats-Unis ont tout tenté pour détruire la Révolution cubaine : attentats terroristes, invasion armée, menace de désintégration nucléaire, sanctions économiques, guerre politique, médiatique et diplomatique et subversion interne.

Comme tout Etat responsable, le gouvernement révolutionnaire a adopté des mesures légales pour sa survie contre de tels agissements. Cependant, la législation pénale cubaine dispose-t-elle d’un caractère particulier ? Est-elle unique ? Voyons ce que prévoient les législations occidentales – qui, pourtant, ne font pas face aux mêmes menaces que Cuba – pour les individus qui se mettraient au service d’une puissance étrangère.

Le Code pénal étasunien

Aux Etats-Unis, de tels agissements sont fortement sanctionnés. Selon le paragraphe 951 du Code pénal, « quiconque, autre qu’un fonctionnaire diplomatique ou consulaire ou attaché, agit aux Etats-Unis en tant agent d’un gouvernement étranger sans notification préalable au Ministre de la Justice […] est passible à ce titre d’une peine pouvant atteindre dix ans de prison ». Le point e/2/A du paragraphe précise que « toute personne engagée dans une transaction commerciale légale doit être considérée comme un agent d’un gouvernement étranger […] s’il s’agit d’un agent de Cuba ». Ainsi, un Cubain qui achèterait un appareil médical aux Etats-Unis pour un hôpital de La Havane est légalement passible d’une peine pouvant atteindre dix ans de prison15.

Le paragraphe 953, connu sous le nom de loi Logan, stipule que « tout citoyen des Etats-Unis, quel qu’il soit, qui, sans autorisation des Etats-Unis, entreprend ou maintient, directement ou indirectement, une correspondance ou une relation avec un gouvernement étranger ou tout fonctionnaire ou agent de celui-ci, dans l’intention d’influencer les mesures ou la conduite d’un gouvernement étranger ou de tout fonctionnaire ou agent de celui-ci, par rapport à un conflit ou une controverse avec les Etats-Unis » est passible d’une peine pouvant aller jusqu’à trois ans de prison16.

Si une telle loi était appliquée à Cuba, l’immense majorité de ce que la presse occidentale considère comme étant la « dissidence cubaine » se trouverait sous les verrous. En effet, les opposants cubains se réunissent régulièrement avec le représentant des Etats-Unis à La Havane, Michael Parmly, dans les bureaux de la Section d’intérêts nord-américains (SINA) ou même dans la résidence personnelle de celui-ci.

Le paragraphe 954 prévoit une peine de dix ans de prison pour toute personne qui émettrait de « fausses déclarations » dans le but de porter atteinte aux intérêts des Etats-Unis dans ses relations avec une autre nation17. Là encore, si l’opposant Oswaldo Payá – qui accuse le gouvernement cubain d’être responsable de disparitions et d’avoir assassiné plus de « vingt enfants » – était soumis à une législation aussi sévère que celle des Etats-Unis, il serait actuellement en prison, sans susciter aucun émoi auprès des âmes bien-pensantes occidentales. Pourtant le plus célèbre des dissidents cubains n’a jamais été inquiété par la justice cubaine, car celle-ci n’a pas de preuves qu’il reçoit de l’argent d’une puissance étrangère. A titre de comparaison, Raúl Rivero, qui était un opposant relativement modéré et frileux par rapport à Payá, avait été condamné à vingt ans de prison (et libéré un an plus tard) car il avait accepté les généreux émoluments offerts Washington18.

Le paragraphe 2 381 stipule que « quiconque, devant allégeance aux Etats-Unis, mène une guerre contre le pays ou s’associe à ses ennemis, en leur fournissant une aide et un soutien aux Etats-Unis ou ailleurs, est coupable de trahison et est passible de la peine de mort, ou d’une peine de prison supérieure à cinq ans19 ».

Ainsi, si des citoyens étasuniens avaient eu les mêmes agissements que les individus reconnus coupables d’association avec une puissance étrangère par la justice cubaine, ils risqueraient la peine capitale. Le paragraphe 2 385 prévoit une peine de vingt ans de prison pour toute personne prônant le renversement du gouvernement ou de l’ordre établi20.

Comme cela est aisément constatable, le code pénal étasunien est, à maints égards, bien plus sévère que la législation cubaine.

La legislation pénale française

Le Code pénal français prévoit également des sanctions extrêmement sévères en cas d’association avérée avec une puissance étrangère. Selon l’article 411-4,

« Le fait d’entretenir des intelligences avec une puissance étrangère, avec une entreprise ou une organisation étrangère ou sous contrôle étranger ou avec leurs agents, en vue de susciter des hostilités ou des actes d’agression contre la France, est puni de trente ans de détention criminelle et de 450 000 euros d’amende.

Est puni des mêmes peines le fait de fournir à une puissance étrangère, à une entreprise ou une organisation étrangère ou sous contrôle étranger ou à leurs agents les moyens d’entreprendre des hostilités ou d’accomplir des actes d’agression contre la France21 ».

La loi française est, à cet égard, plus sévère que la législation cubaine.

La loi espagnole

Le Code pénal espagnol de 1995 prévoit des sanctions sévères pour ces mêmes délits. Selon l’Article 592, « les personnes maintenant des intelligences ou des relations de tout type avec des gouvernements étrangers, avec leurs agents ou avec des groupes, organismes ou associations internationales ou étrangères, dans le but de porter préjudice à l’autorité de l’Etat ou de compromettre la dignité ou les intérêts vitaux de l’Espagne, seront punis d’une peine de prison de quatre à huit ans22 ».

L’Article 589 prévoit une peine de un à trois ans de prison pour « toute personne qui publierait ou exécuterait en Espagne n’importe quel ordre, disposition ou document d’un gouvernement étranger qui porte atteinte à l’indépendance ou à la sécurité de l’Etat, s’oppose au respect de ses lois ou provoque leur violation23 ». Si les fameuses Dames en Blanc cubaines avaient eu le même comportement en Espagne, elles seraient privées de liberté.

Le Code pénal belge

Le Chapitre II de la législation belge qui traite « des crimes et des délits contre la sûreté extérieure de l’Etat » et plus précisément l’Article 114, stipule que « quiconque aura pratiqué des machinations ou entretenu des intelligences avec une puissance étrangère ou avec toute personne agissant dans l'intérêt d'une puissance étrangère, pour engager cette puissance à entreprendre la guerre contre la Belgique, ou pour lui en procurer les moyens, sera puni de la détention de vingt ans à trente ans. Si des hostilités s'en sont suivies il sera puni de détention à perpétuité24 ».

La législation italienne

Selon l’Article 243 du Code pénal italien, « quiconque entretient des intelligences avec l’étranger dans le but qu’un Etat étranger déclare la guerre ou réalise des actes d’hostilité contre l’Etat italien, ou bien commette d’autres faits dans le même but, est puni à une réclusion non inférieure à dix ans. Si la guerre s’ensuit, la peine de mort est appliquée [1] ; si les hostilités se vérifient, la réclusion criminelle à perpétuité est appliquée. [1] La peine de mort est supprimée et substituée par la réclusion à perpétuité25 ».

L’Article 246 traite du financement du citoyen par une puissance étrangère : « Le citoyen, qui, même indirectement, reçoit ou se fait promettre de l’étranger, pour lui-même ou pour autrui, de l’argent ou n’importe quel article, ou en accepte seulement la promesse, afin de commettre des actes contraires aux intérêts nationaux, est sanctionné, si le fait ne constitue pas l’acte le plus grave, de la réclusion de trois à dix ans ». La peine est augmentée si « l’argent ou l’article sont remis ou promis par le biais d’une propagande avec le moyen de la presse26 ».

Ainsi, la législation italienne est bien plus sévère que la loi cubaine. Si les célébrissimes dissidents tels que Payá, Marta Beatriz Roque ou Elizardo Sánchez se trouvaient en Italie, ils seraient en prison et non pas en liberté.

La loi suisse

Même la pacifique Suisse prévoit des sanctions pour délit d’association avec une puissance étrangère. L’Article 266 du Code pénal stipule que :

« 1. Celui qui aura commis un acte tendant à porter atteinte à l’indépendance de la Confédération ou à mettre en danger cette indépendance, ou à provoquer de la part d’une puissance étrangère, dans les affaires de la Confédération, une immixtion de nature à mettre en danger l’indépendance de la Confédération, sera puni d’une peine privative de liberté d’un an au moins.

2. Celui qui aura noué des intelligences avec le gouvernement d’un Etat étranger ou avec un de ses agents dans le dessein de provoquer une guerre contre la Confédération sera puni d’une peine privative de liberté de trois ans au moins.

Dans les cas graves, le juge pourra prononcer une peine privative de liberté à vie ».

L’Article 266 bis est également très clair :

« 1 Celui qui, à l’effet de provoquer ou de soutenir des entreprises ou menées de l’étranger contre la sécurité de la Suisse, sera entré en rapport avec un Etat étranger, ou avec des partis étrangers, ou avec d’autres organisations à l’étranger, ou avec leurs agents, ou aura lancé ou propagé des informations inexactes ou tendancieuses, sera puni d’une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d’une peine pécuniaire.

2 Dans les cas graves, le juge pourra prononcer une peine privative de liberté d’un an au moins27 ».

La législation suédoise

En Suède, le Code Pénal prévoit une peine de deux ans d’emprisonnement pour « celui qui perçoit de l’argent ou d’autres dons d’une puissance étrangère ou de quiconque agit dans l’intérêt de celle-ci, afin de publier ou diffuser des écrits, ou d’influencer de quelque façon que ce soit l’opinion publique en ce qui concerne l’organisation interne de l’Etat28 ».

Cette démocratie scandinave sanctionne également « celui qui propage ou transmet à des puissances étrangères ou à leurs agents des informations inexactes ou tendancieuses, dans le but de créer des menaces pour la Sécurité de l’Etat ». Enfin, une peine allant de dix ans à la réclusion criminelle à perpétuité est appliquée à « celui qui constitue une menace contre la sécurité de l’Etat pour avoir utilisé des moyens illégaux avec l’appui d’une puissance étrangère29 ».

Agents au service d’une puissance étrangère et non « prisonniers d’opinion »

Les exemples pourraient être multipliés à l’infini. Dans n’importe quel pays du monde, l’association avec une puissance étrangère est sévèrement sanctionnée par la loi et il n’est donc point possible d’accorder le qualificatif de « prisonniers d’opinion » aux individus stipendiés par un gouvernement étranger, comme cela est le cas pour les détenus cubains, ce que reconnaît d’ailleurs très honnêtement Amnesty International.

Amnesty International est une organisation réputée pour son sérieux, son professionnalisme et son impartialité. Mais le traitement qu’elle réserve à Cuba est sujet à caution. Afin de continuer à jouir du même prestige et de la même objectivité, AI serait avisée de reconsidérer, sans plus attendre, son jugement à l’égard de ceux qu’elle considère comme étant des « prisonniers d’opinion » à Cuba, car la double mesure n’est pas acceptable.

Notes

1 Amnesty International, « L’histoire d’Amnesty International », pas de date. http://www.amnesty.org/fr/who-we-are/history (site consulté le 23 avril 2008).

2 Amnesty International, « Cuba. Rapport 2007 », avril 2007. http://www.amnesty.org/fr/region/americas/caribbean/cuba#report (site consulté le 23 avril 2008).

3 Amnesty International, « Cuba. Cinq années de trop, le nouveau gouvernement doit libérer les dissidents emprisonnés », 18 mars 2008. http://www.amnesty.org/fr/for-media/press-releases/cuba-cinq-ann%C3%A9es-de-trop-le-nouveau-gouvernement-doit-lib%C3%A9rer-les-dissid(site consulté le 23 avril 2008).

4 Ibid.

5 Salim Lamrani, Double Morale. Cuba, l’Union européenne et les droits de l’homme (Paris : Editions Estrella, 2008), pp. 45-55.

6 Cuban Democracy Act, Titre XVII, Section 1705, 1992.

7 Helms-Burton Act, Titre I, Section 109, 1996.

8 Colin L. Powell, Commission for Assistance to a Free Cuba, (Washington : United States Department of State, mai 2004). www.state.gov/documents/organization/32334.pdf (site consulté le 7 mai 2004), pp. 16, 22.

9 Roger F. Noriega, « Assistant Secretary Noriega’s Statement Before the House of Representatives Committee on International Relations », Department of State, 3 mars 2005. www.state.gov/p/wha/rls/rm/2005/ql/42986.htm (site consulté le 9 avril 2005).

10 Condolezza Rice & Carlos Gutierrez, Commission for Assistance to a Free Cuba, (Washington : United States Department of State, juillet 2006). www.cafc.gov/documents/organization/68166.pdf (site consulté le 12 juillet 2006), p. 20.

11 Gaceta Oficial de la República de Cuba, Ley de protección de la independencia nacional y la economía de Cuba (LEY NO 88), 15 mars 1999.

12 Ibid.

13 Ibid.

14 Ibid.

15 U.S. Code, Title 18, Part I, Chapter 45, § 951.

16 U.S. Code, Title 18, Part I, Chapter 45, § 953.

17 U.S. Code, Title 18, Part I, Chapter 45, § 954.

18 El Nuevo Herald, “Mensaje de Payá destaca que en la isla hay desaparecidos”, 18 mars 2005, p. 23A.

19 U.S. Code, Title 18, Part I, Chapter 115, § 2381.

20 U.S. Code, Title 18, Part I, Chapter 115, § 2385.

21 Code Pénal Français, Livre IV,Chapitre I, Section 2, Article 411-4.

22 Code Pénal Espagnol de 1995, chapitre II, Article 592.

23 Code Pénal Espagnol de 1995, chapitre II, Article 589.

24 Code Pénal Belge, Chapitre II, Article 114.

25 Code Pénal Italien, Livre II, Titre I, Chapitre I, Article 243.

26 Code Pénal Italien, Livre II, Titre I, Chapitre I, Article 246.

27 Code Pénal Suisse, Article 266.

28 Code Pénal Suédois, Chapitre 19, Article 13.

29 Code Pénal Suédois, Chapitre 19, Article 8.

Salim Lamrani est enseignant, écrivain et journaliste français, spécialiste des relations entre Cuba et les Etats-Unis. Il a notamment publié Washington contre Cuba (Pantin : Le Temps des Cerises, 2005), Cuba face à l’Empire (Genève : Timeli, 2006) et Fidel Castro, Cuba et les Etats-Unis (Pantin : Le Temps des Cerises, 2006).

Il vient de publier Double Morale. Cuba, l’Union européenne et les droits de l’homme (Paris : Editions Estrella, 2008).

Contact : lamranisalim@yahoo.fr