mercredi 30 juillet 2008

Communiqué de presse

PAJU (Palestiniens et Juifs Unis)
Le 30 juillet 2008 info: 514-961-3928



LA VICTOIRE DE PAJU

UN GROUPE DE DÉFENSE DES DROITS DE LA PERSONNE
CHASSE LE CONSULAT DE L’APARTHEID DU
CENTRE-VILLE

Le consulat d’Israël a fermé ses portes au centre-ville de Montréal.
Épuisé par sept années et demie de manifestations, le « consulat de l’apartheid » a discrètement quitté la tour CIBC la semaine dernière. Officiellement fermé pour le moment, il réouvrira dans un lieu moins central, moins visible au public et « moins pratique pour les manifestants ».
Le consulat a été la cible de manifestations durant les 389 dernières semaines. Ces manifestations du vendredi midi sont essentiellement l’œuvre de PAJU (Palestiniens et Juifs Unis), un groupe de défense des droits de la personne créé à Montréal il y a presque huit ans pour dénoncer la brutale occupation imposée par Israël à la Cisjordanie et à la bande de Gaza.
Le droit international interdit la conquête et la colonisation de territoire et le nettoyage ethnique de leurs habitants. Or, l’occupation d’Israël a commis ces crimes durant plusieurs décennies.
Le droit international condamne également le système d’apartheid qu’Israël applique pour contrôler les territoires occupés, où Israël a établi des réseaux routiers et des systèmes juridiques distincts pour Juifs et Palestiniens et exerce une occupation si répressive qu’elle est pire, à plusieurs égards, que ce qu’était l’apartheid sud-africain.
Les membres de PAJU se sont rassemblés pour la première fois devant le consulat d’Israël le 9 février 2001, et y sont retournés chaque vendredi depuis, appelant au boycottage d’Israël, brandissant des panneaux anti-occupation et distribuant des tracts d’information aux passants.
La vigile a suscité une forte attention médiatique, et les Sionistes locaux ont tout essayé pour la faire cesser : harcèlement, obstruction, menaces, insultes obscènes, contre-manifestations, et même violence physique. Sans résultats.
La bataille est maintenant terminée : le consulat s’est éclipsé, et ce vendredi, PAJU déménage sa vigile hebdomadaire devant la librairie Indigo, à l’angle des rues Sainte-Catherine et McGill College. La vigile continuera de dénoncer l’occupation israélienne et d’exiger un boycott international d’Israël. Elle fera ainsi partie du mouvement pan-canadien de boycott des librairies Indigo /Chapters, qui se poursuivra jusqu’à ce que les propriétaires cessent de financer les soldats étrangers qui servent dans la brutale armée d’occupation d’Israël.

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Conférence de presse:
le 1er août 2008 à 12h30, devant la librairie Indigo, à
l’angle nord-ouest des rues Sainte-Catherine et McGill College.
IMPORTANT!

Ce vendredi, le 1er août 2008 à 12h00,

PAJU déménage sa vigile hebdomadaire
devant la librairie Indigo,
à l’angle nord-ouest des rues Sainte-Catherine et McGill College.

Épuisé par sept années et demie de manifestations, le consulat d’Israël a fermé ses portes au centre-ville de Montréal.

Alors, ce vendredi, PAJU déménage sa vigile hebdomadaire devant la librairie Indigo, à l’angle des rues Sainte-Catherine et McGill College.

La vigile continuera de dénoncer l’occupation israélienne et d’exiger un boycott international d’Israël. Elle fera ainsi partie du mouvement pan-canadien de boycott des librairies Indigo /Chapters, qui se poursuivra jusqu’à ce que les propriétaires cessent de financer les soldats étrangers qui servent dans la brutale armée d’occupation d’Israël.

VENEZ A LA VIGILE CE VENDREDI DEVANT INDIGO!

dimanche 27 juillet 2008

LE CANADA VA-T-IL TOMBER EN RÉCESSION ?

Par Robert Luxley

À tous les jours, les bulletins télévisés de nouvelles nous parlent des fluctuations des marchés boursiers. Ils s’effondrent un jour, remontent un peu le lendemain, baissent à nouveau le surlendemain. Les investisseurs sont nerveux et tous les commentateurs qui spéculent sur les chances du Canada d’éviter la récession, semblent vouloir chercher à apaiser les craintes.

Alors que des usines ferment, que General Motors annonce un plan majeur de redressement pour éviter la faillite, que Ford annonce des pertes de près de $8,7 milliards, que les annonces de pertes d’emplois se multiplient, le ministre fédéral des finances Flaherty n’en déclare pas moins que les bases de l’économie canadienne sont solides.

Mais qu’est qu’une récession ? - Interviewé par le quotidien Le Devoir, le député Libéral de Laval-des-Rapides, Alain Paquet, ancien professeur d’économie à l’UQAM et détenteur d’un doctorat sur les cycles économiques répond: « Deux trimestres consécutifs de croissance négative! C'est la définition «populaire».

Ainsi, officiellement, après avoir connu une baisse durant le premier trimestre de 2008, le PIB aurait connu une légère hausse durant le second, de telle sorte qu’officiellement, le Canada échapperait à la récession pour l’instant. Quoi qu'il en soit, l'économie canadienne est loin d'être tirée d'affaire.

Une crise à l’échelle mondiale

Évidemment, surtout dans le contexte de mondialisation, l’économie canadienne ne fonctionne pas en vase clos. Bien au contraire, les Etats-Unis ont même considérablement renforcé leur mainmise sur l’économie canadienne depuis plusieurs années et particulièrement depuis l’accord de libre-échange. Les Etats-Unis étant non seulement l’économie dominante à travers le monde, mais aussi les principaux partenaires commerciaux du Canada, leur économie a forcément un impact majeur sur la celle de ce dernier. Il suffit par exemple de voir jusqu’à quel point la parité que le dollar canadien a maintenant avec la devise américaine, surtout à cause de la baisse de cette dernière, influe sur le niveau des exportations canadiennes, et sur les pertes d’emplois dans l’industrie.

Or les Etats-Unis vivent depuis l’été 2006 leur pire crise financière depuis les années trente. Partie dans l’immobilier qu’un crédit hypothécaire (subprimes) trop accessible (mais à des taux d’intérêt plus élevés) et que la spéculation avaient gonflé outre mesure, la crise a fini par s’étendre peu à peu à tout le secteur bancaire et financier, étasunien au départ, pour devenir une crise mondiale depuis l’été 2007. Les spéculateurs (incluant les banques) en voulant se débarrasser à la Bourse des titres représentant ces hypothèques à risques et pour rechercher des placements sûrs qui rapportent (notamment dans le pétrole et l’alimentation ce qui contribue à la flambée des prix et à la crise alimentaire mondiale), ont fait éclater la bulle provoquant par le fait même un manque de liquidité majeur.

Pour empêcher les banques de tomber en faillite, particulièrement aux Etats-Unis, ce qui provoquerait immédiatement une dépression majeure à l’échelle de la planète, les banques centrales des principaux pays impérialistes ont prêté depuis l’été 2007 plus de $1 000 milliards aux banques ordinaires. Mais cela n’a pas empêché dernièrement une banque californienne, IndyMac, de se retrouver en faillite et d’être placée sous tutelle bancaire, et non plus empêché que le gouvernement américain soit obligé de soutenir financièrement (On parle encore de plusieurs centaines de milliards) Freddie Mac (Federal Home Mortgage Corporation) et Fannie Mae (Federal National Mortgage Association). Il s’agit de deux des plus importantes institutions financières impliquées dans le refinancement hypothécaire et qui possèdent à elles seules ou garantissent environ la moitié des $12 000 milliards en hypothèques aux États-Unis. Il serait même question de les étatiser si les mesures actuelles sont insuffisantes (Lorsque ça va mal pour le privé, la bourgeoisie vire son capot de bord et devient soudainement partisane de rendre publiques…les pertes).

Selon le FMI, la perte des banques jusqu’à présent à cause de cette crise des « subprimes » se monterait à $945 milliards. Selon Alan Greenspan, l'ancien président de la Réserve fédérale américaine, l’économie mondiale a pris un tournant décisif. La période de croissance soutenue et d’inflation modérée est bel et bien révolue. Il prévoit que la période qui vient sera marquée par des prix élevés pour le pétrole et les aliments, dont la hausse récente serait selon lui, en grande partie causée par des tensions entre l’offre et la demande et en partie par la spéculation.

De leur côté, les banquiers européens craignent un effondrement du système bancaire mondial : « La situation aux États-Unis est bien pire que nous le pensions », déclare Maurice Lippens, grand patron de la Fortis en Belgique, « on prévoit quelque 6 000 faillites parmi les banques américaines qui ont actuellement une faible couverture. Mais des groupes comme Citigroup, General Motors, Chrysler peuvent être emportés. Un effondrement total s’amorce aux Etats-Unis. » L’économie mondiale selon ces spécialistes de la bourgeoisie serait donc au début d’une crise économique d’envergure sous tous ses aspects : économique, financier, industriel, avec une inflation des prix alimentaires et énergétiques.

La crise est causée par la baisse du taux de profit

Les perturbations financières actuelles ne sont pas la cause fondamentale de la crise qui se dessine mais en sont plutôt une manifestation qui la révèle. Les pertes financières provoquées par l’éclatement de la bulle spéculative dans l’immobilier sont la perte de ce que Marx appelait « un capital fictif ». Aucune richesse réelle n’est pour autant disparue. Bien au contraire, il y a même relativement trop de richesses.

Dans leur quête avide de profits, les capitalistes cherchent continuellement à augmenter la productivité des travailleurs-euses, c’est-à-dire d’augmenter le taux de plus-value (il s’agit du rapport entre le travail non-payé aux travailleurs-euses que les capitalistes empochent et le capital investi en salaires). Pour ce faire ils développent la production au maximum, en réinvestissant la plus-value dans des machineries plus performantes et dans une organisation du travail plus productive, afin de produire plus de marchandises à moindre coût en réduisant les coûts de main-d’oeuvre.

Cela modifie la composition du capital dans son rapport entre le capital fixe (machineries, bâtiments, matières premières etc.) qui augmente et le capital variable (main-d’œuvre) qui proportionnellement diminue. La conséquence de cette situation est que « le progrès de la production capitaliste implique nécessairement que le taux général moyen de la plus-value se traduise par une baisse du taux de profit général : c’est une nécessité évidente découlant de l’essence du mode de production capitaliste. La masse de travail vivant (capital variable, ndlr) employé diminuant sans cesse par rapport à la masse du travail matérialisé (capital fixe ou constant, ndlr) qu’elle met en œuvre, par rapport aux moyens de productions consommés productivement, il faut bien que la fraction non payée de ce travail vivant qui se concrétise en plus-value voit son rapport au volume de valeur du capital total diminuer sans cesse. Or ce rapport de la masse de plus-value à la valeur du capital total employé constitue le taux de profit ; celui-ci doit donc baisser continuellement. » (K. Marx, Le Capital, livre troisième, tome I, Éd. Sociales, 1974, p. 227)

Lorsque le taux de profit diminuant devient trop bas, les capitalistes ne voient plus aucun intérêt à faire fonctionner la machine économique et la production des marchandises s’enraye. Nous nous retrouvons alors dans une crise économique. Les mécanismes qui font baisser le taux des profits en remplaçant les ouvriers-ères par des machines provoquent par le fait même l’augmentation du chômage. L’augmentation du chômage à son tour diminue le revenu global des ouvriers-ères et leur consommation déjà limitée par des salaires maintenus le plus bas possible, ce qui affecte par ricochet la vente et la production des marchandises concernées (principalement des marchandises de première nécessité : aliments, vêtement, logement, énergie, etc.). D’autre part, la demande de marchandises de luxe et de moyens de production est quant à elle affectée par la baisse des profits des capitalistes. Bref, il y a alors une baisse de la demande globale faute de moyens alors que l’offre a été poussée à son plus haut niveau. (Voir ci-bas l’article sur les causes des crises économiques).

Marx explique que « dans l’état de choses existant, le remplacement des capitaux investis dans la production dépend pour la plus grande part de la capacité de consommation des classes improductives (Grosso modo, il s’agit de la petite bourgeoisie, rentiers, professions libérales, etc., qui constitue dans les pays capitalistes développés un portion importante de la population. ndrl) tandis que la capacité de consommation des ouvriers est limitée en partie par les lois du salaire, en partie par le fait qu’on ne les emploie qu’aussi longtemps que leur utilisation profite à la classe capitaliste. La raison ultime de toute véritable crise demeure toujours la pauvreté et la limitation de la consommation des masses, face à la tendance de la production capitaliste à développer les forces productives comme si elles n’avaient pour limite que la capacité de consommation absolue de la société. (K. Marx, Le Capital, livre troisième, tome II, Éd. Sociales, 1970, p. 145)

Face à la baisse des profits, les capitalistes ne restent pas les bras croisés. C’est la qu’intervient le phénomène de l’inflation.

La stagflation

Normalement, lorsque la crise arrive au stade de la dépression que l’économie stagne et que l’offre des marchandises est abondante pendant que la demande des consommateurs est en baisse bien malgré eux, les prix des marchandises ont tendance à baisser. On peut assister alors à une phase de déflation plus ou moins longue jusqu’au moment de la reprise économique.

Évidemment, la bourgeoisie craint d’arriver à ce stade, non seulement parce que les profits y sont au plus bas, mais surtout parce que cela inévitablement provoque des remous sociaux et risque d’amener la classe ouvrière à se mobiliser et même à devenir menaçante pour le capitalisme. Aussi cherche-t-elle à bloquer le processus « normal » des crises économiques qui ne sont, rappelons-le, que des manifestations nécessaires du fonctionnement cyclique du capitalisme.

Les gouvernements et leurs banques centrales interviennent donc via des politiques inflationnistes qui visent à atténuer l’amplitude des cycles économiques. (Une « récession » serait une sorte de ralentissement contrôlé). Voici comment la Banque du Canada explique sa politique :
« L'élément central du cadre de conduite de la politique monétaire de la Banque est sa stratégie de maîtrise de l'inflation, dont l'objectif consiste à maintenir le taux d'inflation à environ 2 %, c'est-à-dire au point médian d'une fourchette cible, qui va de 1 à 3 %. …La Banque se préoccupe de tout écart important — qu'il soit positif ou négatif — du taux d'inflation par rapport au point médian de 2 %. Lorsque la demande est forte, elle risque de pousser l'appareil de production aux limites de sa capacité. Dans ce cas, l'inflation a tendance à augmenter au-dessus du point médian. La Banque intervient alors en majorant les taux d'intérêt afin de ralentir le rythme d'expansion de l'économie. À l'inverse, lorsque la demande est faible, les pressions inflationnistes ont tendance à se relâcher. La Banque abaisse alors les taux d'intérêt dans le but de stimuler l'économie et d'absorber les capacités excédentaires.
Quels sont les avantages d'une telle politique?
Un taux d'inflation bas, stable et prévisible constitue la meilleure contribution que la politique monétaire puisse apporter à une économie productive, qui fonctionne bien. Il permet aux Canadiens et aux Canadiennes de prendre des décisions en matière de dépenses et d'investissements avec une plus grande confiance. Cette confiance est favorable aux investissements à long terme dans l'économie canadienne et contribue au maintien de la création d'emplois et à l'accroissement de la productivité, gage de l'amélioration réelle de notre niveau de vie. »

Cette politique inflationniste permet dans une certaine mesure de contrer la baisse du taux des profits puisque «…les capitalistes réagissent en s’efforçant d’augmenter leurs prix de manière à obtenir les profits nécessaires à la poursuite de l’expansion de la production. La vente des marchandises à ces prix plus élevés est rendue possible par l’existence du crédit (crédit commercial, crédit bancaire, crédit à la consommation), par l’intermédiaire des banques et, en dernière analyse, de l’État, qui adapte la quantité de monnaie en circulation aux augmentations de prix désirées. » (Louis Gill, L’économie capitaliste : une analyse marxiste, deuxième partie, Presses socialistes internationales, 1979, p. 298).

Évidemment, cette politique d’inflation permanente se fait au détriment des masses et particulièrement de la classe ouvrière. L’augmentation continuelle des prix des marchandises équivaut en réalité à une réduction générale des salaires. La bourgeoisie peut ainsi augmenter le taux de plus-value et accroître le degré d’exploitation de la classe ouvrière sans augmenter davantage la composition organique du capital (le rapport entre le capital fixe et le capital variable), atténuant ainsi la baisse du taux de profit (qu’on dit « tendancielle »). À cet égard, les salaires réels depuis 1980 ont diminué au Canada, particulièrement ceux des salariés-es les plus pauvres. (Voir l’article de Kimball Cariou publié sur ce blog le 21 mai 2008 : « Statistique Canada confirme que les écarts de revenu croissent de plus en plus rapidement »).

Le problème que la bourgeoisie rencontre à l’heure actuelle est que la crise financière et la spéculation, qui jouent un rôle important dans l’envolée des prix des matières premières, fait augmenter le taux d’inflation au dessus du niveau qu’ils trouvent souhaitable. Ainsi, le mois dernier le taux au Canada a dépassé les 3% et on prédit qu’il pourrait dépasser d’ici la fin de l’année 4%. Aux États-Unis, il dépasse déjà les 5%. Et évidemment, on parle du taux général, mais qui est encore bien plus élevé pour certains produits de première nécessité comme l’alimentation.

La difficulté d’une part est que les rentiers subiront une perte sèche si les taux d’intérêts qu’ils peuvent retirer des placements financiers de leur capital est plus bas que le taux d’inflation. D’autre part, une inflation trop importante peut provoquer une mobilisation de la classe ouvrière pour augmenter les salaires, annihilant les efforts des capitalistes pour augmenter leurs profits
Jusqu’à maintenant, la Banque du Canada a maintenu son taux directeur à 3% (Le taux auquel elle prête aux banques ordinaires) afin de ne pas aggraver le ralentissement économique. Mais en même temps, des mises-en-garde sont envoyées à la classe ouvrière d’accepter la hausse des prix docilement, sinon, on menace d’augmenter les taux d’intérêts. Ainsi, encore une fois selon Alan Greenspan, le défi pour les banquiers centraux sera de maintenir le contrôle de l’inflation. Les banques centrales « n’auront pas d’autre choix que de revenir à des taux d’intérêts élevés ». Il ajoute qu’il faudra que les politiciens « s’y fassent et convainquent la population de la nécessité de maintenir une politique monétaire plus rigide».
Le Canada frappé de désindustrialisation

Donc, la récession, que de nombreux économistes définissent comme deux trimestres consécutifs de croissance négative, «… demeure une définition «approximative, pas fausse, mais pas tout à fait complète, souligne Alain Paquet … Au fond, il faudrait parler d'un déclin ou d'une baisse significative de l'activité économique, dans l'ensemble de l'économie, qui dure plus de quelques mois L'expression «deux trimestres» est commode. Mais trop tranchante pour les situations économiques. Aussi, pour bien déterminer s'il y a récession ou non, ce n'est pas seulement le PIB réel qu'il faut observer, mais aussi le revenu réel, l'emploi, la production industrielle, les ventes de gros et de détail. »

Or, si on pousse l’analyse un peu plus loin de la situation économique au Canada, on se rend compte un peu comme le dit Alain Dubuc du journal La Presse « que les indicateurs économiques canadiens ne veulent pas dire grand-chose… L’économie canadienne est devenue une économie à trois vitesses. Les quatre provinces de l’Ouest qui ne sont même pas au courant qu’il y a des problèmes, le Canada central, le Québec et l’Ontario, très touchés, et les provinces maritimes, qui s’en sortent un peu mieux ».

En réalité, la faible croissance du dernier trimestre s’explique surtout par le fait que ce sont surtout les provinces de l’Ouest qui, profitant du boom spéculatif dans les matières premières, augmentent la croissance moyenne et qui compense pour la mauvaise performance du Québec et surtout de l’Ontario, le centre industriel du pays. Par exemple, tandis que Pétro-Canada annonce une augmentation de ses bénéfices nets de 77% pour le dernier trimestre (soit la coquette somme de $1,5 milliard volée au peuple) et que Potash Corp. de la Saskatchewan (profitant de la crise alimentaire et de la demande d’engrais) quant à elle annonce une hausse de ses profits de 181%, soit plus de $600 millions, en Ontario pendant ce temps on voit la croissance du PIB stagner depuis 2003 en dessous de la moyenne canadienne. La faible croissance que la province a malgré tout connue, a été réalisée essentiellement dans le développement dans les industries de services, alors qu’il y a eu une décroissance dans la production de biens. Grosso modo, il en va de même au Québec.

Selon les données de statistiques Canada, la production de biens (agriculture, extraction minière, pétrolière, construction, fabrication, etc.) a reculé au pays de 3,2% pendant que la production de services (commerce, transport, finance, restauration, etc.) a augmenté de 3,3% d’avril 2007 à avril 2008. En avril 2008, la production de biens se chiffrait à 368 milliards de dollars pendant que celle des services était de 866 milliards. Cela signifie que les services représentent 70% de toute l’économie. Or c’est la production des biens qui génère la plus-value à la base des profits que convoitent tant les capitalistes.

Cette « tertiarisation » de l’économie canadienne témoigne d’une part de son caractère parasitaire, typique de l’impérialisme. Mais en même temps, cela témoigne aussi de la désindustrialisation que le Canada subit du fait de la domination impérialiste, surtout américaine. Ainsi, même le secteur pétrolier qui est le Klondike en Alberta est complètement dominé par des entreprises privées et surtout étrangères (Le Canada serait un des rares sinon le seul pays dans le monde qui abandonne complètement ce secteur stratégique à l’entreprise privée).

La faiblesse de sa base industrielle rend l’économie canadienne plutôt fragile, dépendante du secteur des matières premières. Déjà, au moment d’écrire ces lignes, la baisse de la demande pour le pétrole en réaction à la hausse des prix a provoqué une baisse du prix du brut et une baisse du cours du pétrole à la Bourse. En avril, selon Statistiques Canada, même l’extraction de pétrole et de gaz aurait enregistré un recul, de telle sorte que la production du secteur de l’énergie a diminué de 1,1%

Au-delà de la définition « officielle » de la récession, on peut dire avec certitude que le Canada connaît actuellement un ralentissement économique très important qui va sérieusement affecter la vie des gens. Est-ce que cela va empirer et évoluer vers une crise économique ? Ce n’est pas encore certain, mais considérant le niveau d’imbrication des économies du monde entier, les possibilités sont considérables.


Quelle est la cause des crises économiques ?

Les crises économiques qui engendrent la misère dans le système capitaliste sont liées à la nature elle-même de ce système. Elles sont des manifestations régulières de sa contradiction fondamentale, à savoir, « celle qui existe entre le caractère social de la production (socialisée par le capitalisme) et le mode privé, individuel d’appropriation. » (Lénine, O.C., tome 2, p. 165, Éditions du Progrès, Moscou, 1966).

C’est pour cela que seule la fin du capitalisme et son remplacement par un mode de production socialiste pourra mettre définitivement fin à ces crises économiques.

L’explication scientifique du phénomène des crises est le résultat des recherches de Karl Marx, qu’il développa en particulier dans son chef-d’œuvre, Le Capital, dont voici des extraits pertinents :

LE CAPITAL, Livre troisième, chapitre XV, Développement des contradictions internes de la loi (Loi de la baisse tendancielle du taux de profit moyen, NDLR)

«… C'est le capital lui-même qui fixe une borne à la production capitaliste, parce qu'il est le point de départ et le point d'arrivée, la raison et le but de la production et qu'il veut qu'on produise exclusivement pour lui, alors que les moyens de production devraient servir à une extension continue de la vie sociale. Cette borne, qui limite le champ dans lequel la valeur-capital peut être conservée et mise en valeur par l'expropriation et l'appauvrissement de la masse des producteurs, se dresse continuellement contre les méthodes auxquelles le capital a recours pour augmenter la production et développer ses forces productives. Si historiquement la production capitaliste est un moyen pour développer la force productive matérielle et créer un marché mondial, elle est néanmoins en conflit continuel avec les conditions sociales et productives que cette mission historique comporte.
(…)
Même dans l'hypothèse poussée à l'extrême que nous venons d'examiner, la surproduction absolue de capital n'est pas une surproduction absolue de moyens de production. Elle n'est qu'une surproduction des moyens de production fonctionnant comme capital, devant produire une valeur supplémentaire proportionnelle à leur augmentation en quantité. Et cependant elle est une surproduction, parce que le capital est devenu incapable d'exploiter le travail au degré qu'exige le développement « sain » et « normal » de la production capitaliste, qui veut tout au moins que la masse de profit augmente proportionnellement à la masse de capital et n'admet pas que le taux du profit baisse dans la même mesure ou plus rapidement qu'augmente le capital.
La surproduction de capital n'est jamais qu'une surproduction de moyens de travail et d'existence pouvant être appliqués, à l'exploitation des travailleurs à un degré déterminé, le recul de l'exploitation au-dessous d'un niveau donné devant provoquer des troubles, des arrêts de production, des crises et des pertes de capital. Il n'y a rien de contradictoire à ce que cette surproduction de capital soit accompagnée d'une surpopulation relative plus ou moins considérable. Car, les circonstances qui accroissent la productivité du travail, augmentent les produits, étendent les débouchés, accélèrent l'accumulation comme masse et comme valeur et font tomber le taux du profit, sont aussi celles qui provoquent continuellement une surpopulation relative d'ouvriers, que le capital en excès ne peut pas occuper parce que le degré d'exploitation du travail auquel il serait possible de les employer n'est pas assez élevé ou que le taux du profit qu'ils rapporteraient pour une exploitation déterminée est trop bas.
(…)
…La contradiction qui caractérise le mode capitaliste de production, réside surtout dans sa tendance à développer d'une manière absolue les forces productives, sans se préoccuper des conditions de production au milieu desquelles se meut et peut se mouvoir le capital.
On ne produit pas trop de moyens de subsistance eu égard à la population; on en produit au contraire trop peu pour la nourrir convenablement et humainement. De même on ne fabrique pas trop de moyens de production, étant donnée la partie de la population qui est capable de travailler. Une trop grande partie des hommes est amenée par les circonstances à exploiter le travail d'autrui ou à exécuter des travaux qui ne sont considérés comme tels que dans un système absolument misérable de production. En outre, les moyens de produire que l'on fabrique sont insuffisants pour que toute la population valide puisse être occupée dans les circonstances les plus fécondes au point de vue de la production et par conséquent les plus favorables à la réduction de la durée du travail.
Mais périodiquement on produit trop de moyens de travail et de subsistance pour que leur emploi à l'exploitation du travailleur puisse donner le taux de profit que l'on veut obtenir. On produit trop de marchandises pour que la valeur et la plus-value qu'elles contiennent puissent être réalisées et reconstituées en capital, dans les conditions de répartition et de consommation inhérentes à la production' capitaliste, ou du moins parcourir ce cycle sans catastrophes continuelles. On peut donc dire que si la production de richesses n'est pas trop abondante, on produit périodiquement trop de richesses ayant la forme capitaliste avec les contradictions qui en sont inséparables.
Les faits suivants assignent une limite à la production capitaliste :
1. En entraînant la baisse continue du taux du profit, le progrès de la productivité du travail donne le jour à une force antagoniste, qui à un moment donné agit à l'encontre du développement de la productivité et ne peut être vaincue que par des crises sans nombre;
2. L'importance de la production, qu'elle doive être accrue ou restreinte, est déterminée, non par les besoins sociaux, mais par l'appropriation par le capitaliste du travail qu'il ne paye pas et le rapport de ce travail au travail matérialisé, en d’autres termes, par le profit et le rapport du profit au capital engagé; d'où il résulte que la production s'arrête, non lorsque les besoins sont satisfaits, mais lorsque l'impossibilité de réaliser un profit suffisant commande cet arrêt. »

samedi 19 juillet 2008

DE L'AGITATION SE MANIFESTE AU CONGRÈS DU CTC

Traduction d’un article du numéro du 16 au 30 juin 2008 de «People's Voice», principal journal communiste anglophone du Canada. Tout article peut être reproduit gratuitement si la source est indiquée. Tarif annuel des abonnements - Canada : 25,00$Can ou 12,00$Can pour les personnes à faible revenu - États-Unis : 25,00$US - Autres pays : 25,00$US ou 35$Can. Envoyer votre chèque en indiquant votre adresse à : People's Voice, c/o Directeur des affaires, 133 Herkimer St. Unit 502, Hamilton, ON, Canada L8P 2H3.

par Sam Hammond, président de la Commission syndicale centrale du Parti communiste du Canada

Le 25e Congrès du Congrès du travail du Canada (CTC) a eu lieu à Toronto du 26 au 30 mai derniers, en présence de 1 800 déléguées/ués, qui représentaient 54 syndicats affiliés. Le CTC se compose de 55 syndicats, mais 400 déléguées/ués du Syndicat national des employées et employés généraux du secteur public (SNEGSP) n'ont pas pu siéger parce que 20 000 dollars de cotisations ont été retenus au Manitoba parce que le CTC avait été incapable d'imposer la discipline et d'empêcher une tentative de maraudage syndical entreprise dans un casino par un autre syndicat affilié, celui des Teamsters,. La question des maraudages allait refaire surface un certain nombre de fois.

Le présent Congrès survient après la tentative faite en 2005 par Carol Wall d'évincer Ken Georgetti de son poste de président. Malgré la résistance de presque toutes/tous les dirigeantes/eants des grands syndicats affiliés, qui avaient empêché Carol Wall de se présenter aux principaux caucus et à des débats de candidats, celle-ci avait recueilli, la dernière fois, 38% des votes. Cela était une mesure exacte du niveau de l'agitation chez les syndiqués de la base et de leur appui au programme de Wall en faveur de réformes démocratiques et du rétablissement de liens organiques avec le mouvement de lutte pour la justice sociale. Cela aurait dû être pris en compte, mais ne l'a pas été.

L’absence de réponse à ces signes d'agitation a donné le ton de tout ce congrès. Dans son discours d'ouverture, Ken Georgetti, a déclaré : «À notre dernier Congrès, les syndicats ont lancé le défi au CTC : celui d’en faire plus et de faire mieux que jamais auparavant. Et je suis fier de dire que nous avons livré la marchandise.»

Mais quelle « marchandise » ? Elle n’est pas définie. Aussi il y en a qui pourrait déduire de cette déclaration que les déléguées/ués voulaient seulement plus de la même chose, seulement plus. Mais ce n'était assurément pas le cas de 38% des déléguées/ués et probablement de beaucoup d’autres. Malheureusement, à ce Congrès, elles/ils n'ont obtenu que plus de la même vieille « marchandise » : des représentations musicales et culturelles plus nombreuses et plus longues, un plus grand nombre d'invités, un petit peu plus de tout sauf des choses sérieuses et des débats. Elles/ils ont eu moins de temps pour élaborer les résolutions, pour intervenir dans les débats et certainement moins de possibilités pour les membres de la base de participer. Cette question a été soulevée par tous les caucus de gauche, le «Caucus des jeunes», le «Caucus pour l'action» et le «Forum socialiste».

Les caucus et les forums ont en fait constitué le point culminant du Congrès. Ils sont devenus, chaque jour davantage, les véhicules de l'expression démocratique et des débats. De nombreuses manifestations de déception ont eu lieu, en particulier de la part des quelques 200 déléguées/ués qui participaient pour la première fois à un Congrès syndical et dont la plupart étaient des jeunes.

Ce congrès du CTC aura été plus encadré que jamais il ne fut auparavant. Des représentants du personnel de la plupart des syndicats poursuivaient les microphones réservés aux opinions défavorables afin d’arrêter au passage les déléguées-ués dissidentes/ents et pour leurs rappeler que les politiques du syndicat et des caucus syndicaux devaient être respectées. Aussi, de nombreux délégués ont sentis qu'ils n'étaient là que pour approuver sans discussion des décisions déjà prises. Cette façon d'orienter l’expression des déléguées-ués démontre plus que toute autre chose l'insécurité de certains dirigeants syndicaux, qui sont très mal à l'aise face à des débats ouverts et à l'expression démocratique des opinions.

Un programme bien conçu, qui se transformait en affiche, a été largement distribué sur le plancher du congrès aux déléguées/ués par un groupe de syndicats de l'Ontario portant le nom d'«Action pour un changement». Ce programme n'était pas signé, et les syndicats concernés, entre autres, le Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP), les syndicat des Métallos, le Syndicat international des employés de services (SEIU), n'avaient pas indiqué leur nom sur l'affiche. Mais ils ont proposé un programme très général, qui exigait, en gros, plus de militantisme et d'imputabilité, une approche plus programmatique de riposte à l' Accord de libre-échange nord-américain (ALÉNA), de l'opposition à la privatisation, de la prévention contre le maraudage syndical, moins de collusion avec les employeurs, et des liens plus étroits avec les mouvements populaires.

L'affiche déclare ceci : «Notre «Action pour un changement» vise principalement à transformer le Congrès du travail du Canada en quelque chose dont nous avons besoin à nouveau : le CTC doit redevenir la voix collective, forte et claire, de toutes/tous les travailleuses/eurs du Canada». Rédigée par une dizaine de leaders syndicaux de l'Ontario, l'affiche représente les syndicats qui ont conclu entre eux un accord volontaire contre le maraudage et qui ont manifesté leur mécontentement.

Ces leaders ne sont pas restés passifs. Sid Ryan, leader du SCFP de l'Ontario, a assisté à la réunion du «Caucus pour l'action» au nom des syndicats de «Action pour un changement». Il a expliqué que les discussions avec la direction du CTC ont conduit à améliorer le Document 12, qui avait précédemment été rédigé, qui manquait de vigueur. Ce document recommandait, conformément aux conceptions typiques de direction où les décisions partent du sommet pour se rendre à la base, l'établissement d'une Commission de révision structurelle établie par le Comité exécutif et par le Conseil exécutif, en vue de l'examen des instances centrales des syndicats, de leurs relations et de leur financement, des consultations avec les syndicats affiliés et avec les Conseils du travail, et de la proposition d'un plan de mise en œuvre qui serait présenté au prochain Congrès.

Les syndicats liés à «Action pour un changement» ont réussi à obtenir des directives pour inclure des recommandations constitutionnelles sur le maraudage et sur les syndicats malhonnêtes, ainsi qu'une inclusion plus significative des Conseils du travail au sein de la Commission de révision. Au cours du débat sur la Révision structurelle, plusieurs leaders syndicaux de premier plan de l'Ontario, y compris Ryan, ont fait des contributions aux micros réservés aux opinions favorables, mais ils ont manifesté une forte opposition au maraudage. Pendant ce temps, des membres des Conseils du travail dominaient les micros réservés aux opinions défavorables et exprimaient leur insatisfaction avec le CTC et avec la façon de traiter les Conseils du travail. Le document a été adopté, mais les opinions exprimées durant le débat, favorables et défavorables, devraient être considérées comme étant des instructions à la direction du CTC pour plus de démocratie, plus d'appui aux Conseils du travail et plus de direction sur les questions sociales et sur les luttes.

Le Conseil du travail de Toronto et de la région de York avaient également un programme, qui était intitulé «Programme d'action - Construire le pouvoir syndical 21ème siècle». Ce programme d'action proposait onze résolutions appuyées par plusieurs Conseils du travail à travers le pays. Celles-ci ont été, pour la plupart, incorporées à des résolutions composites sur les questions d'organisation, d'une campagne pour gagner la «card-check», des travailleuses-eurs migrants et temporaires, de l'équité et de la politique municipale. Les résolutions ont renforcé les composites déjà élaborées et reflètent à nouveau la tendance vers la démocratie, l'action et l'imputabilité de la direction du CTC.

D'excellentes résolutions ont été adoptées sur l'Afghanistan, la Palestine, la Colombie et sur d'autres questions relatives à la solidarité internationale. Une très importante résolution sur la nationalisation des ressources pétrolières a été adoptée avec enthousiasme et soutenue par d'éminents porte-parole de grands syndicats affiliés, entre autres Jim Sinclair, de la Fédération du travail de la Colombie-Britannique. Le dernier jour du Congrès, le «Caucus pour l'action», qui s'était réuni et avait grandi chaque jour davantage, a fait des ajouts importants au Plan d'action du CTC sur les questions de l'unité syndicale, du droit de grève, de la démocratie syndicale et de l'imputabilité des membres de la direction.

Dave Pritchett, du local 500 de l'«International Longshore and Warehouse Union» (Syndicat international des travailleurs des quais et des entrepôts), a parlé avec éloquence de la nécessité de se rappeler les contributions faites par les membres du Parti communiste et par d'autres, en tant que fondateurs et combattants des syndicats. Plus tard, il a fait crouler la salle sous les applaudissements en suggérant de remplacer l'expression «faire pression sur le gouvernement» par «faire tomber le gouvernement», et de replacer la «dictature des grandes entreprises» par la «dictature de la classe ouvrière». L'enthousiasme général envers ces sentiments montre non seulement la nature combative des travailleuses/eurs mais aussi leur malaise d'avoir au Congrès une direction qui ne partage pas ces sentiments.

L'état d'esprit exprimé par les caucus et les deux «Programmes d'action» montre que la vague de fond de mécontentement commence à être articulée. La contribution du «Caucus pour l'action» montre le potentiel qui existe pour une gauche plus grande et en expansion, ingrédient indispensable pour le changement. Des dirigeants bien connus sont en train d'affirmer la nécessité de développer le changement, l'unité et la riposte. Cela augure bien pour l'unité et l'appui entre les membres de la base et de la direction, si nécessaires à la lutte.

Ce Congrès a peut-être été terne à bien des égards, mais une gauche naissante commence à se développer par la définition d'un programme et par la croissance de ses effectifs.

CONGRÈS DU TRAVAIL DU CANADA : LES DÉLÉGUÉES/UÉS EXIGENT LE RETRAIT DE L'AFGHANISTAN

Traduction d’un article du numéro du 16 au 30 juin 2008 de «People's Voice», principal journal communiste anglophone du Canada. Tout article peut être reproduit gratuitement si la source est indiquée. Tarif annuel des abonnements - Canada : 25,00$Can ou 12,00$Can pour les personnes à faible revenu - États-Unis : 25,00$US - Autres pays : 25,00$US ou 35$Can. Envoyer votre chèque en indiquant votre adresse à : People's Voice, c/o Directeur des affaires, 133 Herkimer St. Unit 502, Hamilton, ON, Canada L8P 2H3.

La résolution suivante a été adoptée par les déléguées/ués au 25ème Congrès du Congrès du travail du Canada, qui s'est tenue du 26 au 30 mai à Toronto :

Le Congrès du travail du Canada (CTC) demande de tous les partis politiques présents au sein de notre Parlement de prendre immédiatement des mesures pour mettre fin à l'occupation militaire en Afghanistan, pour mettre en œuvre le désengagement des forces canadiennes et pour ramener nos soldates/ats canadiennes/iens de la guerre illégale en Afghanistan.

Le CTC aidera les syndicats qui lui sont affiliés à sensibiliser et à mobiliser leurs membres pour s'opposer à l'intervention militaire canadienne en Afghanistan.

Le CTC continuera de travailler avec les partenaires oeuvrant au sein de l'Alliance canadienne pour la paix afin d'éduquer les Canadiennes/iens sur la guerre.

Le CTC développera la solidarité avec les travailleuses/eurs afghanes/ans, la justice sociale et les organisations de femmes.

Parce que les Canadiennes/iens ont une fière histoire d'engagement de nos forces armées à assumer le rôle du maintien de la paix, qui remonte à la fin de la Deuxième guerre mondiale.

Parce qu'il n'y a pas d'objectifs, de réalisations ou d'avantages clairs pour les Canadiennes/iens relativement à cette guerre dans laquelle des dizaines de jeunes Canadiens et des centaines de citoyennes/ens afghanes/ans innocentes/ents sont tués.

Parce que nos jeunes soldats sont en train de mourir en Afghanistan dans une guerre dans laquelle ils jouent un rôle d'armée d'invasion sans avoir reçu de mandat de la part des citoyennes/ens canadiennes/iens.

Parce que l'intervention militaire du gouvernement Harper en Afghanistan ne contribue pas à instaurer la paix et à entreprendre la reconstruction en Afghanistan.

Parce que la campagne militaire du gouvernement canadien vise à appuyer les intérêts politiques, économiques et militaires des États-Unis plutôt qu'à contribuer à instaurer la paix et à entreprendre la reconstruction en Afghanistan.

Parce que les actions de l'Organisation du traité de l'Atlantique nord (OTAN), menées sous la direction des États-Unis, accroissent la violence en Afghanistan.

Parce que les énormes sommes d'argent dépensées sur le plan militaire en Afghanistan seraient mieux utilisées si elles servaient à financer les soins de santé, l'éducation, la création d'emplois et les services sociaux.

Parce que le mouvement ouvrier a toujours été au centre de toutes les luttes pour la paix et pour la justice.

lundi 14 juillet 2008

Communiqué de la Table de concertation de solidarité Québec-Cuba (TCSQ-C) conjointement avec le Réseau Canadien de solidarité avec Cuba (CNC).

DES PARLEMENTAIRES CANADIENS
EXIGENT JUSTICE POUR LES CINQ
HÉROS CUBAINS
7 juillet 2008, Montréal

Sur l'initiative de Francine Lalonde, députée du Bloc Québécois de La Pointe-de-l'Île et porte-parole en matière d'affaires étrangères, 56 députés fédéraux, ont signé une lettre réclamant justice pour les Cinq Cubains emprisonnés aux États-Unis et pour leurs familles. Dans un geste de collaboration avec le Bloc Québécois, Libby Davies, députée du NPD, Vancouver Est, a réuni les signatures des député-e-s de son parti.

La lettre expliquant les cas des Cinq est signée par 40 député-e-s du Bloc Québécois et 16 député-e-s du Nouveau Parti Démocratique. Elle a été transmise, au cours de la semaine du 23 au 27 juin 2008, à l'honorable David Emerson, Ministre des affaires étrangères du Canada avec copie à Monsieur Michael Mukasey, Procureur général des États-Unis, et Monsieur David Wilkins, Ambassadeur des États-Unis au Canada.

La lettre indique que Fernando González Llort, René González Sehwerert, Antonio Guerrero Rodríguez, Gerardo Hernández Nordelo et Ramón Labañino Salazar, connus internationalement comme les «Cinq», emprisonnés aux États-Unis depuis plus de 9 ans, ont subi un procès inéquitable et des conditions de détention qui contreviennent à la Constitution étasunienne et au droit international. Cette lettre signée par 56 députés fédéraux s'appuie, entre autres, sur le Groupe de travail des Nations Unies sur les détentions arbitraires, qui relève de la Commission des droits de l'homme, un groupe de 110 parlementaires britanniques et Amnistie Internationale qui dénoncent les conditions du procès et de l'emprisonnement. La lettre fait aussi mention que ces cinq personnes sont détenues, séparées les unes des autres dans cinq prisons à sécurité maximale et maintenues pendant de longues périodes dans des cellules d'isolement et que deux d'entre elles se sont même vues refuser leur droit aux visites familiales. Elle stipule que, depuis que la Cour d'Appel d'Atlanta a déclaré que les jugements contre les cinq Cubains étaient invalides, rien ne justifie la poursuite de leur emprisonnement ni à ce que perdure cette situation arbitraire extrêmement douloureuse pour les Cinq Cubains et leurs familles.

Le gouvernement cubain avait remis aux autorités étasuniennes en 1998 un rapport volumineux qui démontrait que des actes terroristes se préparaient en sol étasunien par des groupes anti-cubains vivant majoritairement à Miami. Les informations résultaient en grande partie des renseignements recueillis par les Cinq Cubains qui avaient infiltré ces groupes, mais plutôt que d'agir sur ces renseignements, ce sont les Cinq qui ont été arrêtés, le 12 septembre 1998.

D'autres parlementaires dans le monde ont dénoncé l'injustice faite aux Cinq et à leurs familles, dont Karel De Gucht, ministre belge des Affaires étrangères, dans une déclaration faite le 30 juin dernier.

Au Québec, en plus de nombreux citoyens ordinaires, des personnalités connues telles que Claudette Carbonneau, présidente de la CSN, Elsie Lefebvre, ex-députée du Parti Québécois ainsi que 93 personnalités ont donné leur appui au Cinq. Au Canada, Mme Libby Davies, députée du NPD, Vancouver Est, a réuni les signatures des autres député-e-s de son parti. L'appui aux Cinq des député-e-s du NPD s'ajoute à celui du Congrès du travail du Canada et de la Fédération canadienne des étudiants, entre autres.

Madame Francine Lalonde avait reçu en octobre 2007, dans ses bureaux de circonscription à Pointe-aux-Trembles, Madame Elizabeth Palmeiro, épouse de Ramón Labañino, un des Cinq.

La Table de concertation de solidarité Québec-Cuba (TCSQ-C) et le Réseau canadien de solidarité avec Cuba (CNC) appuient de tout coeur le Bloc Québécois et le Nouveau Parti Démocratique dans cet appel conjoint pour la justice et nous unissons nos voix à celles de nos députéEs. Nous maintiendrons nos efforts conjoints pour que les Cinq obtiennent justice et pour faire connaître leur cas au Québec et au Canada. Nous collaborerons également avec des organisations des États-Unis et autres parties du globe qui sont reconnues pour leur recherche de la justice

Nous réclamons justice pour les Cinq et leurs familles!

Congrès de la CSN

PEU DE PERSPECTIVE
Par Pierre Bibeau

Sous le thème « Oser au quotidien », s’est tenu le 62ème congrès de la CSN du 12 au 17 mai dernier à Québec. Plus de 2 000 délégué-e-s provenant de tous les syndicats étaient présents pour débattre des positions élaborées par l’exécutif.

Outre l’environnement—sujet à la mode s’il en est un—les autres propositions étaient réunis par thèmes qui se définissaient comme suit : contrer la discrimination sur la base des statuts d’emploi; définir un cadre pour les agences de placement; la conciliation famille-travail; développement économique, travail et emploi; formation de la main-d’oeuvre; santé; éducation; pour une nouvelle approche de protection de revenu à la retraite; société québécoise et immigration; l’action syndicale internationale; négociations commerciales et finalement, la responsabilité sociale des entreprises et des institutions publiques.

Malheureusement, on a peu élaboré sur des préoccupations majeures pour la classe ouvrière, tel que la perte de pouvoir d’achat, la détérioration des conditions de travail au fil des ans et la détérioration marquée et continue de notre filet de sécurité sociale, bref, tout ce qui touche de près la vie des travailleurs-euses actuellement. Une réflexion sur le syndicalisme d’aujourd’hui, la diminution marquée des luttes et les attaques persistantes contre le droit de grève auraient pu également faire l’objet de débat.

On doit noter positivement la proposition demandant une législation favorisant le droit pour tous les salarié-es d’être couverts par un régime de retraite financé par les patrons et régi par une loi. Mais ce type de propositions a été trop rare dans ce congrès. Les propositions touchant le secteur économique en lien avec le travail sont peu engageantes, timorées et favorisent même une plus grande concertation employeur-état-syndicat. Il s’agit ici d’une certaine continuité idéologique social-démocrate conséquente de la centrale syndicale depuis les années 80 ce qui fera dire à un camarade délégué que nous étions loin du syndicalisme de combat. On remarquera l’amélioration de la CSN sur son positionnement au plan international, la venue de Guy Ryder, secrétaire général de la Confédération Syndicale Internationale, ne fut pas fortuite sur ce plan.

L’éternel conflit opposant la Fédération de la santé et des services sociaux et la Fédération des professionnèles concernant leurs juridictions représentatives respectives, qui peuvent se chevaucher dans le secteur de la santé et des services sociaux, a été remis sur la table par la FSSS. Les votes d’allégeance que la loi 30 avait imposés en fusionnant de force les accréditations syndicales dans ce secteur avaient placé les deux fédérations en compétition dans plusieurs cas et exacerbé les contradictions. La FSSS appelait le congrès de lui reconnaître l’exclusivité dans le secteur.

Malheureusement, ce débat purement structurel a complètement pris le dessus sur presque toutes les autres propositions et occultant pour beaucoup le reste du congrès. Cela fut au point où l’horaire a dû être modifié suite à l’étirement du débat ce qui a eu pour conséquence d’annuler les ateliers. Le débat s’est finalement terminé sur le maintien du statu quo puisque le congrès a rejeté la requête de la FSSS. Les ateliers ayant été supprimés, les propositions ont dû être soumises directement en plénière.

Ce congrès n’a pas été marquant pour l’histoire de la CSN. Il est peut-être en continuité avec la crise que vie le syndicalisme dans le monde occidental et sa perte de contre-pouvoir. Pour reprendre sa place et en acquérir une nouvelle, les luttes et le combat sous toutes ses formes devront être renforcés et, sans perspective, c’est plus difficile. La CSN et ses syndicats devront « Oser au quotidien » avec la crise économique qui frappe à nos portes. Mais est-ce que ce sera suffisant ? Ce congrès a malheureusement manqué le coche cette fois.

dimanche 13 juillet 2008

DES MILLIERS DE PERSONNES PARTICIPENT À LA JOURNÉE D'ACTION AUTOCHTONE

Traduction d’un article du numéro du 16 au 30 juin 2008 de «People's Voice», principal journal communiste anglophone du Canada. Tout article peut être reproduit gratuitement si la source est indiquée. Tarif annuel des abonnements - Canada : 25,00$Can ou 12,00$Can pour les personnes à faible revenu - États-Unis : 25,00$US - Autres pays : 25,00$US ou 35$Can. Envoyer votre chèque en indiquant votre adresse à : People's Voice, c/o Directeur des affaires, 133 Herkimer St. Unit 502, Hamilton, ON, Canada L8P 2H3.

Le chef national de l'Assemblée des Premières Nations (APN), Phil Fontaine, a dit qu'il était «encouragé et stimulé» par la participation de milliers de Canadiennes/iens aux manifestations et aux rassemblements organisés dans le cadre de la Journée nationale d'action du 29 mai dans tout le pays et par le fait que des organisations qui représentent des millions de personnes ont appuyé le «Plan en sept points pour le changement» de l'APN.

«Les activités d'aujourd'hui représentent une énorme témoignage d'appui à la construction d'un avenir meilleur pour les enfants des Premières Nations et d'une vie meilleure pour les peuples des Premières nations» a déclaré Fontaine. Mais ce jour ne sera vraiment un succès que si le gouvernement et le premier ministre écoutent cet appel à l'action de millions de Canadiennes/iens et acceptent de travailler avec nous à mettre en oeuvre un véritable plan en vue d'un changement réel et de réels progrès.»

Paru à la fin mai, le Plan en sept points de l'APN a été approuvé par le Congrès du travail du Canada, qui compte 3,2 millions de membres, par le réseau œcuménique KAIROS, qui comprend les principales confessions chrétiennes, par le Sierra Club du Canada, par le Syndicat canadien de la fonction publique et par de nombreuses autres organisations.

Parmi les plus importantes activités organisées le 29 mai mentionnons les rassemblements d'Ottawa, qui ont réuni plus de 1 500 personnes. Parmi les participants se trouvaient des aînés et des jeunes des Premières nations, le primat de l'Église anglicane du Canada, le président de l'Association nationale des centres d'amitié, Ray Zahab de la Fondation «One X One», des organisations étudiantes, des syndicats et une délégation d'enfants de la Première nation Attawapiskat de l'Ontario, qui demandent depuis longtemps au gouvernement qu'il tienne les promesses qu'il a faites il y a de nombreuses années de construire une école dans leur communauté, où les étudiants doivent se contenter de constructions mobiles de fortune.

À Toronto, une manifestation semblable a été réalisée, au cours de laquelle les participants à la marche ont été rejoints par des délégués du Congrès du Congrès du travail du Canada. Les activités ont réuni plus de 500 personnes à Winnipeg et environ 300 à Vancouver. Dans tout le pays, plus de vingt événements ont été organisés dans le cadre de la Journée d'action, c'est-à-dire un nombre bien plus élevé qu'en 2007.

«Le temps est venu d'agir» a déclaré le chef national de l'APN. «Nous avons le choix de continuer à maintenir un système brisé qui ne fait que perpétuer pauvreté et pessimisme ou de saisir l'occasion d'investir dans une nouvelle approche et avec un nouvel optimisme qui nous pousse vers l'avant, en vue de l'édification d'un avenir d'espoir, d'harmonie et de bonheur pour toutes et tous les Canadiennes/iens.»

37ème Congrès des communistes de Colombie-Britannique

Traduction d’un article du numéro du 16 au 30 juin 2008 de «People's Voice», principal journal communiste anglophone du Canada. Tout article peut être reproduit gratuitement si la source est indiquée. Tarif annuel des abonnements - Canada : 25,00$Can ou 12,00$Can pour les personnes à faible revenu - États-Unis : 25,00$US - Autres pays : 25,00$US ou 35$Can. Envoyer votre chèque en indiquant votre adresse à : People's Voice, c/o Directeur des affaires, 133 Herkimer St. Unit 502, Hamilton, ON, Canada L8P 2H3.

Bureau du «People's Voice» à Vancouver

Au cours de la fin de semaine, les 31 mai et 1er juin, les délégués de la région de l'Okanagan, de l'Île de Vancouver et du «Lower Mainland» (région métropolitaine située à l'extrême sud-ouest de la C.-B.) ont participé, à Vancouver, au 37ème Congrès provincial de la Colombie britannique du Parti communiste du Canada. George Gidora, qui occupait le poste de leader du Parti communiste de la Colombie britannique depuis la moitié des années 1990, a été réélu au Comité provincial, qui est composé de 13 membres.

Les débats tenus au cours du Congrès ont porté, en grande partie, sur la détérioration de la situation des travailleuses/eurs de la Colombie-Britannique. Bien que les grands médias bourgeois parlent de "croissance économique" pour la province, la crise économique capitaliste naissante frappe durement la majorité de la population. Les licenciements massifs et les réductions de personnel sont particulièrement nombreux dans les communautés qui dépendent de la foresterie et la pêche. Selon les chiffres les plus récents, au cours des deux dernières années environ 10 000 emplois ont été perdus dans la foresterie sur la Côte ouest, tendance parallèle à la chute du nombre d'emplois survenue au sein de l'industrie manufacturière et du secteur secondaire en Ontario, au Québec et dans d'autres provinces. Les données statistiques officielles sur l'emploi demeurent assez élevées, mais la plupart des "nouveaux" emplois se caractérisent par des salaires très inférieurs et par des postes à temps partiel ou temporaires.

La hausse vertigineuse des prix des denrées et de l'immobilier a accru le fossé entre riches et pauvres en Colombie-Britannique. De nous jours à Vancouver, alors que les appartements les plus chers construits sur les toits d'immeubles en copropriété (penthouses de condominiums) coûtent plus de 20 millions de dollars, à quelques pâtés de maisons, sur la Rive Est du centre-ville, des milliers de personnes sont sans abri ou ne survivent qu'avec quelques centaines de dollars par mois et doivent se loger dans de minuscules chambres simples infestés de vermine. Les délégués du Congrès ont critiqué fortement les gouvernements provincial et fédéral de gaspiller des milliards de dollars dans des extravagances tape-à-l’oeil tels que les Jeux olympiques d'hiver de 2010 au lieu de construire des logements sociaux ou d'améliorer l'éducation publique.

Le Congrès a adopté une série de résolutions spéciales, dont plusieurs dénonçaient le gouvernement Campbell pour ses attaques contre les droits démocratiques et pour ses dernières mesures visant à éliminer l'universalité des soins de santé. Une autre résolution a appuyé la campagne menée par le mouvement syndical et le mouvement pour la paix visant à rendre hommage à Kanuko Laskey, survivant du bombardement d'Hiroshima, pour le rôle important qu'il a joué en Colombie-Britannique dans le cadre des campagnes pour le désarmement nucléaire. Les délégués ont également dénoncé le projet de loi C-50 du gouvernement conservateur de Harper comme étant la continuation des politiques racistes et anti-immigrantes qui ont débuté durant le 20ième siècle avec les lois d'exclusion des Asiatiques et l’incident honteux du navire «Komagata Maru» en 1914, au cours duquel des centaines d'immigrants indiens ont été refoulés du port de Vancouver.

Plusieurs membres de la plus nouvelle organisation du Parti communiste, la cellule de la Haute vallée du Fraser, créé en mai et surtout constituée de membres de la communauté sud-asiatique, ont participé au Congrès. Des rapports de délégués ont signalé l'augmentation, en 2008, en Colombie-Britannique, du nombre de demandes d'adhésion au Parti et du nombre d'abonnements au journal «People's Voice» (de 15%).

La principale résolution de principe que le Congrès a adopté appelle la présentation de candidats communistes aux élections provinciales de mai 2009, et la mise en oeuvre commencera bientôt par le choix des candidats et par la finalisation de la plate-forme de la campagne.

Parmi les faits saillants du Congrès il faut souligner une allocution du leader du Parti communiste du Canada, Miguel Figueroa, sur la situation politique internationale et nationale, et un rapport présenté par Nazir Rizvi sur les récents Congrès tenus en Inde par les deux principaux Partis communistes de ce pays, auprès desquels notre camarade représentait le PCC.

Le nouveau Comité provincial de la Colombie-Britannique se réunira le 29 juin pour élire les membres de son exécutif et pour commencer à élaborer des plans détaillés pour le travail du Parti au cours de l'été et de l'automne.

jeudi 10 juillet 2008

Quel oncle est vraiment fou?

Par Mumia Abu-Jamal
1er Mai 2008
Lorsque les émissions à succès conservatrices ont commencé à soulever des questions au sujet de l'ancien pasteur de Barack Obama, le révérend Dr. Jeremie Wright, le candidat démocrate a essentiellement essayé de minimiser sa relation avec lui, suggérant que Wright était un peu comme «l’oncle fou» commun à de nombreuses familles.

En raison de la pression engendrée par les émissions d’information continue 24 heures sur 24, un long chemin a été parcouru depuis. Bien que le Sénateur Obama ne se réfère plus à lui de cette manière, il vaut la peine d'examiner ce que le pasteur Wright a dit qui a fait monter à l’assaut l’univers sombre des commentateurs-trices de droite de la radio et de la télévision comme un beffroi rempli de chauve-souris affolées qui dissertent. Parmi les commentaires "controversés" du révérend Wright il y avait ceux-ci:

« Nous avons bombardé Hiroshima, nous avons bombardé Nagasaki, et nous avons irradié beaucoup plus de personnes que les milliers de New York et du Pentagone, et sans même jamais cligner un oeil ... et maintenant nous sommes indignés, parce que les choses que nous avons fait outre-mer nous reviennent maintenant dans notre propre cour. Les poulets d’Amérique sont revenus se percher à la maison ... La violence engendre la violence. La haine engendre la haine. Et le terrorisme engendre le terrorisme. Un ambassadeur blanc vous a dit a dit cela à tous, pas un militant noir ... Un ambassadeur dont les yeux sont grands ouverts et qui essaie de nous réveiller et de nous éloigner de ce dangereux précipice sur le bord duquel nous sommes maintenant... »

Les paroles du Rev Wright sur la façon dont l'Amérique a traité ses citoyens a la peau plus foncée ont également été qualifiées de « controversées » Voici quelques-unes d'entre elles:

« Et le gouvernement des États-Unis d'Amérique, quand le temps est venu de traiter ses citoyens d'origine autochtone équitablement, il a échoué. Il les a mis dans des réserves. Quand le temps est venu de traiter ses citoyens d'origine japonaise équitablement, il a échoué. Il les interner dans des camps de prisonniers. Quand le temps est venu de traiter ses citoyens de descendance africaine équitablement, l'Amérique a échoué. Elle les a enchaînés, le gouvernement les a vendus aux enchères, les a mis dans les champs de coton, les a mis dans des écoles inférieures, les a mis dans des logements insalubres, les a utilisé comme cobayes dans des expériences scientifiques, les a mis dans les emplois les moins bien rémunérés, et leur a refusé une égale protection de la loi, les a maintenus à l’extérieur de leurs bastions racistes de l'enseignement supérieur et les a enfermés dans les positions de désespoir et d'impuissance. Le gouvernement leur donne des drogues, construit des prisons plus grandes, adopte la loi sur les récidivistes et puis il veut que nous chantions «Que Dieu bénisse l’Amérique ». Non, non, non, Dieu ne bénit pas l'Amérique. Dieu condamne l’Amérique -c’est dans la Bible - pour tuer des innocents. »
Sur le rôle du gouvernement des États-Unis outre-mer, M. Wright a prêché ce qui suit:
«Les gouvernements mentent. Le gouvernement a menti au sujet de l'expérience de Tuskegee ... Le gouvernement a menti au sujet du bombardement du Cambodge ... Le gouvernement a menti au sujet du complot de la drogue pour armer la Contra orchestré par Oliver North ... Le gouvernement avait menti sur le prétendu lien entre Al-Qaida et Saddam Hussein et sur la relation entre le 11 septembre 2001 et l’Opération libération de l’Iraq. Les gouvernements mentent. »

Je ne sais pas pour vous, mais je n'ai pas entendu une seule déclaration qui ne soit pas catégoriquement, historiquement, absolument vraie. Comme le copain de mon pays, Bro. Willie pourrait demander, « Quel est le problème? »
La réponse d’Obama, a servi à apaiser la droite fascisante, sonnait comme des excuses: «Je rejette carrément les déclarations qui sont en cause faites par le révérend Wright.»

Le problème n'est pas que le révérend Wright était fou, mais qu'il disait la froide, la stricte vérité. C'est ça le problème.
Les nationalistes étasuniens demandent que toute personne qui déclare quelque vérité soit « dénoncée ». Quand surgira-t-il un candidat qui dénoncera l'impérialisme, et la ruineuse guerre sans fin contre une grande partie du Tiers-Monde, au profit des entreprises d’ici?
Si cette élection en est une mesure, ce n’est pas bientôt.
Quel oncle est vraiment fou? L'Oncle Jérémie ou l'Oncle Sam?

UNE MANNE DE $50 MILLIARDS POUR L’INDUSTRIE PÉTROLIÈRE

(Traduction d’un éditorial de l’édition du 1-31 juillet 2008 du People's Voice, le principal journal communiste au Canada. Ses articles peuvent être reproduits gratuitement si la source est citée. Abonnement au Canada: $ 25/année, ou $ 12 pour les faibles revenus; abonnement pour les États-Unis - 25 $ US par année; abonnement d'outre-mer - $ 25 US ou 35 $ CAN par année. Envoyer à: People's Voice, c / o PV Business Manager, 133 Herkimer St., Unit 502, Hamilton, ON, L8P 2H3.)

On fait rarement mention lors de la couverture que font les médias de la montée fulgurante des prix du carburant, de la montée tout aussi radicale des profits des compagnies pétrolières. Les quatorze plus importantes entreprises canadiennes du pétrole et du gaz se sont emparé de $6,4 milliards en bénéfices durant le premier trimestre de cette année. Petro-Canada, désormais privatisé, a été le grand gagnant, avec $1,1 milliards de bénéfices. Mis en perspective, ça correspond à peu près à $200 de profit par Canadien-ne au cours des trois premiers mois de 2008 seulement. En termes de pourcentage, les bénéfices de ces sociétés sont en hausse de plus de 33% par rapport à la même période en 2007.
Depuis lors, les prix du pétrole ont monté en flèche à plus de $135 le baril, et les automobilistes doivent payer près de $1,50 le litre. Le total des bénéfices annuels pour l'ensemble de l'industrie de l'énergie au Canada pourrait facilement atteindre $50 milliards pour l'année 2008, soit l’équivalent de $1500 par habitant. Chaque fois que les prix du pétrole augmentent au détriment du peuple travailleur, la Bourse de Toronto augmente, de telle sorte que les riches deviennent plus riches alors que le reste d'entre nous devenons toujours plus pauvres.
Pas étonnant que la majorité des Canadiens appuie l’idée d’une propriété publique des ressources énergétiques. Songez à ce que ces bénéfices stupéfiants pourraient nous fournir: assez de logements sociaux pour mettre fin à l'itinérance, un système de garderie universel et gratuit, une augmentation considérable des travailleurs-euse de la santé, et beaucoup plus.
Pas le moindre, la propriété publique permettrait aux peuples du Canada de prendre des décisions fondamentales quant à la nature même de l'industrie, qui consiste présentement à pomper de grandes quantités de gaz à effet de serre et à alimenter la machine de guerre meurtrière des États-Unis. L’exploitation des sables bitumineux dans le nord de l'Alberta est en train de tuer des travailleurs-euses et de détruire de vastes étendues de la province, avec des effets particulièrement dévastateurs sur les peuples autochtones dont les territoires sont engloutis.
Il est temps de suivre l'exemple du Venezuela, de la Bolivie et d'autres pays, où les ressources énergétiques sont considérées comme vitales pour aider à conserver et à améliorer la vie des travailleurs-euses, et non pas comme une source de bénéfices ahurissants pour l'ultra-riche.

mercredi 9 juillet 2008

LE RAPPORT BOUCHARD-TAYLOR : UN PAVÉ DANS LA MARE IDENTITAIRE

Par Hugo Pouliot

Le 23 mai dernier la Commission Bouchard-Taylor a finalement publié son long rapport sur la question des « accommodements raisonnables ». Des fuites avaient déjà été rapportées par le quotidien anglophone montréalais The Gazette à l’effet que le rapport critiquait la majorité francophone du Québec pour son manque d’ouverture envers les immigrant-es et leurs coutumes. Les deux responsables de la Commission, Gérard Bouchard et Charles Taylor, s’en sont bien défendus et ont nié toute volonté de leur part d’accuser les Québécois-es dit « de souche » d’être les seuls responsables de la crise autour des fameux « accommodements raisonnables ». Néanmoins il n’en fallait pas plus pour déclencher l’ire d’une bonne partie du mouvement indépendantiste québécois qui y voyait, entre autres choses, une tentative de culpabiliser le peuple québécois pour son malaise identitaire.

Les audiences publiques tenues l’automne dernier à travers le Québec par la Commission Bouchard-Taylor ont en effet révélé l’existence d’une véritable crise identitaire au sein de la population québécoise qui se sent toujours menacée par son statut de minorité francophone dans une Amérique du Nord à très forte prédominance anglophone.

Suite à l’enflure médiatique qui a été faite autour de quelques demandes d’ « accommodements raisonnables » formulées par des groupes minoritaires ethniques et religieux, ces derniers ont été de plus en plus perçus par une certain nombre de Québécois-es comme une « menace » pour la survie de la culture et de l’identité québécoises. Comme si la présence de femmes musulmanes voilées ou de Sikhs portant le turban pouvait mettre en danger l’existence de la nation québécoise! Ou bien que le fait de permettre à des gens de s’intégrer à la société québécoise tout en conservant leurs coutumes et leurs rites religieux risquait de mener à l’assimilation du peuple québécois! C’est une démonstration éclatante de ce que Lénine appelait la mentalité étriquée de petite nation. Le nationalisme des petites nations a en effet tendance à faire preuve d’étroitesse et de repli sur soi face aux cultures et aux traditions nationales « étrangères » parce qu’il est généralement guidé par la peur de disparaître.

Le sentiment d’insécurité généré par l’oppression nationale historique du peuple québécois a été habilement exploité par des démagogues racistes et ultranationalistes qui y ont vu l’occasion rêvée pour stigmatiser les immigrant-es et faire la promotion d’une certaine « pureté » ethnique et nationale. L’Action Démocratique du Québec, populiste de droite et ultraconservatrice, s’est servie du débat sur les « accommodements raisonnables » pour remonter dans les sondages et gagner une certaine popularité après avoir connu un déclin sérieux.

L’ADQ fait ouvertement la promotion d’un discours nataliste, pour les femmes québécoises francophones bien sûr, et dénonce les quotas d’immigration du gouvernement Charest comme étant trop élevés! Malheureusement l’ADQ a réussi en jouant sur le malaise identitaire des Québécois-es à devenir l’opposition officielle lors des élections du 26 mars 2007, repoussant le PQ à la troisième place.

Il y a eu aussi le code de vie du village d’Hérouxville en Mauricie qui stipulait entre autres choses que la lapidation des femmes était interdite dans cette localité et que les immigrant-es avaient intérêt à se conformer aux « valeurs de la société québécoise qui les accueille si généreusement »! C’était une manière d’associer l’ensemble des musulman-es à des pratiques barbares qui ont cours dans un nombre infime de pays et d’encourager le développement de l’islamophobie qui est très présente en Occident depuis les attentats du 11 septembre 2001.

Suite aux dernières élections québécoises, le gouvernement libéral minoritaire de Jean Charest a décidé de mettre sur pied la Commission Bouchard-Taylor sur les « accommodements raisonnables ». Les audiences de cette commission furent marquées par des interventions racistes et intolérantes contre les minorités ethniques et religieuses injustement accusées d’abuser de notre soi-disant « trop grande tolérance et mollesse » à leur égard. Il y a eu également des témoignages d’immigrant-es sur les difficultés multiples qui parcourent leur existence au Québec, comme le taux de chômage élevé et la non-reconnaissance des diplômes professionnels « étrangers ». D’ailleurs le rapport Bouchard-Taylor aborde les conditions de vie des immigrant-es et la discrimination qui les confronte quotidiennement dans leur volonté d’améliorer leur sort.

Le problème du racisme qui est présent dans la société québécoise, comme dans toutes les sociétés occidentales, est très clairement démontré et expliqué dans ce rapport et fait voler en éclat les élucubrations des nationalistes radicaux à l’effet que les minorités ethniques et religieuses seraient traitées si généreusement au Québec! De plus, le rapport Bouchard-Taylor parle de crise des perceptions pour décrire le délire identitaire au sujet des « accommodements raisonnables ».

Contrairement à l’opinion largement répandue, il n’y a eu aucune augmentation des accommodements consentis par les autorités publiques pour satisfaire les groupes minoritaires ces dernières années. La thèse d’une société québécoise assiégée par des groupes religieux cherchant à imposer leurs valeurs et leurs traditions à la majorité est donc fausse de bout en bout. C’était essentiellement des faits divers, comme les vitres givrées du YMCA d’Outremont ou la fameuse histoire de la cabane à sucre de Mont St-Grégoire, qui ont été monté en épingle par les médias bourgeois dans le but de susciter le scandale et la haine entre les Québécois-es d’origine canadienne française souvent qualifiés de « souche » et les autres, les Québécois d’autre origine, les autochtones et les immigrant-es.

Nous pourrions même rajouter que toute cette crise fait partie de la tactique classique de la bourgeoisie de diviser la classe ouvrière pour mieux régner. En divisant ainsi les travailleurs et les travailleuses selon des lignes ethniques et religieuses, la classe dirigeante capitaliste est en meilleure position pour lancer ses attaques contres nos droits sociaux et nos conditions de vie et de travail et pour affaiblir tout mouvement unifié de riposte.

Tel que mentionné plus haut, une bonne partie du mouvement indépendantiste québécois a réagi très négativement au rapport Bouchard-Taylor. Jacques Parizeau a déclaré qu’il était bon pour la poubelle et que c’était normal que les immigrant-es aient un taux élevé de chômage durant les premières années de leur vie au Québec et qu’on ne pouvait rien faire contre ça! Il en a profité pour dénoncer vivement l’intention du gouvernement Charest de hausser le seuil annuel d’immigration du Québec de 40000 à 55000 au cours des prochaines années. On reconnait bien là le Jacques Parizeau du 30 octobre 1995 avec sa célèbre déclaration sur les « votes ethniques »!

De son côté, Bernand Landry a accusé les deux commissaires de vouloir culpabiliser les Québécois-es francophones et de faire preuve d’un supposé manque de courage en refusant d’interdire le port des signes religieux par les enseignant-es.

L’actuelle cheffe du PQ, Pauline Marois, a déclaré que le rapport faisait fi du malaise identitaire ressenti par nombre de Québécois-es, ce qui est complètement faux. Il est bon de rappeler ici que le PQ a déposé l’automne dernier un projet de loi sur la citoyenneté et l’identité québécoises qui préconise de retirer le droit d’éligibilité aux immigrant-es ne maîtrisant pas le français. Un bel exemple de nationalisme étroit et réactionnaire.

Le Parti Indépendantiste, crée à l’automne 2007 à cause de la volonté du PQ de mettre plus ou moins en veilleuse le projet souverainiste, a déclaré que le rapport Bouchard-Taylor est insultant pour le peuple québécois et que c’est aux immigrant-es de faire l’effort de s’intégrer à la société qui les accueille. Le PI n’hésite pas à afficher ouvertement ses tendances ultranationalistes et xénophobes et à décrire l’immigration « intensive et forcée » comme un danger pour la nation québécoise. Pas étonnant que l’ancien député bloquiste Ghislain Lebel, célèbre pour son racisme anti-autochtone, ait adhéré à ce parti!

Il faut par contre mentionner que Québec Solidaire, qui a une position en faveur de la souveraineté du Québec, a réagi favorablement au rapport Bouchard-Taylor, ce qui est une excellente chose. Les deux chefs du parti, Amir Khadir et Françoise David ont souligné la sagesse et l’ouverture d’esprit du rapport. Ils ont appuyé la proposition de permettre aux enseignant-es de porter le foulard islamique, ce qui a provoqué l’ire de certains éléments nationalistes de QS. Ils ont également salué les propositions pour faciliter l’amélioration du sort des immigrant-es.

Cet appui de QS pour le rapport Bouchard-Taylor a placé le groupe révisionniste trotskisant et ultranationaliste d’André Parizeau, qui prétend frauduleusement être le PCQ, dans une bien mauvaise posture. Il faut rappeler que Parizeau n’avait pas hésité à se joindre l’année dernière à la campagne hystérique contre le droit de vote des femmes musulmanes portant le niqab ou voile complet. Il avait alors dénoncé vivement notre position qui s’opposait à cette croisade raciste en se portant à la défense des lois québécoises supposément menacées par la soi-disant mollesse d’Élections Canada. Les parizionnistes veulent à tout prix être à la remorque des éléments les plus radicaux du mouvement indépendantiste québécois, n’hésitant pas à participer à une manifestation organisée par les Jeunes Patriotes du Québec ultranationalistes le 19 mai dernier. Ils ont alors diffusé un tract reprochant à bon nombre d’immigrant-es leur « refus » de s’intégrer à la société québécoise en choisissant l’anglais, ce qui selon leurs propres mots « a pour conséquence, à moyen et à long terme, de réduire le poids démographique et démocratique des francophones »! On croirait entendre la Société St-Jean-Baptiste de Montréal!

Mais comme le faux PCQ ne veut pas se couper de Québec Solidaire, ils ont commencé par appuyer la position des deux chefs en faveur du rapport BT, ce qui allait à l’encontre de ce qu’ils avaient précédemment dit sur la question des accommodements raisonnables, et suite à une réunion de leur Comité central ils ont commencé à émettre des doutes sur le bien-fondé de permettre le port du foulard islamique dans le milieu de l’éducation et de la fonction publique en général. Certains de leurs membres ont insisté sur la nécessité de défendre les « valeurs québécoises » de laïcité et d’égalité hommes-femmes, comme si ces valeurs étaient exclusives au Québec! On voit bien que le nationalisme étroit finit toujours par prendre le dessus chez les parizionnistes et que ces derniers veulent conserver à tout prix leur réputation d’indépendantistes « purs et durs ».

La position du Parti Communiste du Canada, dont le Parti Communiste du Québec (le vrai bien sûr) est la section québécoise, sur cette question des « accommodements raisonnables » est, comme nous l’avons mentionné dans la déclaration publiée dans le numéro 10 de Clarté, de défendre sans condition les droits des immigrant-es et de nous opposer à ce délire identitaire. Nous sommes contre l’interdiction du port des symboles religieux, comme le hidjab ou foulard islamique, car nous croyons que ce genre de mesures vise à semer la haine et la division et risque d’isoler davantage les personnes immigrantes du reste de la société. Nous sommes pour la séparation de l’Église et de l’État et pour une véritable laïcité mais sans pour autant interdire les croyances et pratiques religieuses. Nous ne voulons pas non plus que la laïcité devienne une arme pour propager le racisme et attaquer les droits des immigrant-es.

En tant que marxistes-léninistes, nous prônons l’égalité complète des langues et des nations partout à travers le Canada, ce qui est loin d’être la réalité présentement, et nous nous opposons à toute mesure discriminatoire contre les droits des minorités. Le Parti Communiste du Canada combat à la fois le nationalisme étroit du Québec et le chauvinisme de grande nation du Canada anglais, qui favorisent l’exclusivisme national et ethnique et qui briment les droits des différentes minorités linguistiques et nationales composant le Canada. C’est le seul programme susceptible de créer l’unité de la classe ouvrière partout à travers l’État canadien dans le but de vaincre l’offensive de la classe dirigeante capitaliste contre nos acquis sociaux et pour instaurer un Canada socialiste libre de toute discrimination et exploitation.

mercredi 2 juillet 2008

PLUS QUE JAMAIS MANIFESTONS NOTRE SOLIDARITÉ AVEC LA PALESTINE!

Par Hugo Pouliot

L’année 2008 est marquée par un double anniversaire très dramatique et négatif, soit celui du 60ème de la Nakba (tragédie) palestinienne et celui du 41ème anniversaire de l’occupation par Israël des territoires palestiniens. En 1948 lors de la création de l’État d’Israël, plus de 750 000 Palestiniens furent brutalement expulsés de leurs terres par les milices sionistes qui ont également rasées 450 villages palestiniens. En 1967 suite à la guerre des Six-Jours entre Israël et quelques-uns de ses voisins arabes, l’Égypte, la Jordanie et la Syrie, l’armée israélienne s’est emparée du contrôle de la Cisjordanie et de la bande de Gaza. Ces deux territoires étaient peuplés de Palestiniens qui tombèrent sous le joug cruel et impitoyable du colonialisme israélien lourdement armé et financé par l’impérialisme américain. Nous pouvons donc affirmer que le peuple palestinien a été victime de deux catastrophes au cours du XXème siècle, causées par les puissances impérialistes occidentales et leur volonté de domination du Proche-Orient.

Peu de temps après la fin de la guerre des Six-Jours, le gouvernement israélien a mis en oeuvre une politique de colonisation progressive des territoires palestiniens occupés en confiscant les terres des fermiers palestiniens pour les donner à des colons juifs dont une bonne partie sont des fondamentalistes religieux enragés qui considèrent que la Palestine est le berceau du peuple juif et que les Arabes n’ont pas le droit d’y vivre. La résistance des Palestiniens contre cette politique de dépossession et de nettoyage ethnique « en douceur » a été systématiquement réprimée par l’armée israélienne. En même temps un mouvement de solidarité s’est créé à l’intérieur d’Israël parmi la population arabe mais aussi parmi les Juifs de gauche. Le Parti communiste israélien a été dès le départ au premier plan de la lutte contre l’occupation de la Cisjordanie et de la Bande de Gaza et pour la création d’un État palestinien viable et souverain avec le droit au retour pour les réfugiés de la guerre de 1948. Le PCI a été le seul parti à la Knesset(parlement israélien) à dénoncer la guerre des Six-Jours comme une politique d’agression contre les pays arabes. Le chef historique du PCI, Meir Vilner, a été poignardé en 1967 par un extrémiste de droite à cause de cette position courageuse (voir cette courte notice biographique de ce grand leader communiste sur le site du Israeli Communist Forum, www.icf.org.il/vilneren.htm). L’Union Soviétique et tout le camp socialiste ont également donné un solide appui à la lutte palestinienne en suivant la doctrine de l’internationalisme prolétarien. L’aide des pays socialistes a été très précieuse pour les combattants de l’Organisation pour la libération de la Palestine(OLP) qui avaient contre eux tous les pays impérialistes alliés à l’État israélien expansionniste et colonialiste. Le soutien donné actuellement par le gouvernement révolutionnaire de Cuba aux Palestiniens n’est sûrement pas étranger au fait qu’Israël est un des seuls pays dans le monde à soutenir le blocus américain contre ce pays socialiste.

En 1987 éclata la première Infifada(soulèvement)contre l’occupation israélienne. C’était une révolte populaire contre des années de répression intense et de vol systématique de terres par un régime colonisateur. La première Intifada a mis plus que jamais à l’ordre du jour la lutte de libération nationale du peuple palestinien. Les pays impérialistes occidentaux se devaient de tenir compte de cette lutte et des pourparlers furent entamés avec l’OLP. Malheureusement la chute de l’URSS et des autres régimes socialistes en Europe de l’Est entre 1989 et 1991 a enlevé un appui de taille à la cause palestinienne. En 1993, après une longue négociation débutée deux ans plus tôt, Yasser Arafat, dirigeant de l’OLP, signe une déclaration de principes appelée « les Accords d’Oslo » avec le premier ministre travailliste israélien, Yitzhak Rabin. Cette entente visait à engager un processus de paix qui impliquait notamment la reconnaissance de l’État d’Israël par les Palestiniens et la reconnaissance par Israël d’un gouvernement palestinien autonome sur deux territoires (Gaza et Jéricho). Cependant, d’une part, le contenu de l’accord demeurait vague et ambigu quant à la reconnaissance réelle du droit des Palestiniens à l’autodétermination, et d’autre part, les forces sionistes les plus radicales n’y étaient pas moins farouchement opposées (Rabin fut d’ailleurs assassiné par un sioniste d’extrême-droite qui lui reprochait d’avoir signé ces accords). En fait, Israël, particulièrement après le retour au pouvoir du Likoud, a par la suite poursuivi sans relâche sa politique de colonisation et d’occupation pendant le processus de paix d’Oslo(1993-2000)tout en faisant de vagues promesses pour une « autonomie palestinienne ». La regrettée linguiste israélienne Tanya Reinhart, disciple de Noam Chomsky, a très bien analysé la période des accords d’Oslo et tous les problèmes que ça impliquait pour les Palestiniens dans son magnifique livre Détruire la Palestine publié en français par les Éditions Écosociété. La visite provocatrice du chef du parti de droite Likoud, Ariel Sharon, sur le Mont du Temple à l’automne 2000, alors que les musulmans considéraient ce site comme sacré pour leur religion, a mis le feu aux poudres et a permis le déclenchement de la deuxième Intifada. Les frustrations des Palestiniens envers le processus de paix d’Oslo ont éclaté au grand jour et ont mis fin à cette tromperie monumentale.

La deuxième Intifada a été marqué par un très fort esprit de résistance de la part du peuple palestinien mais malheureusement aussi par des attentats-suicide dirigés contre des civils israéliens. C’est une tactique condamnable même si nous comprenons très bien le désespoir qui pousse un certain nombre de Palestiniens à commettre ces actes. Les attentats-suicides font le jeu de la droite israélienne représentée par des politiciens réactionnaires comme Ariel Sharon, Binyamin Netanyahu et Ehud Olmert. La classe ouvrière israélienne, qui doit jouer un rôle crucial dans la lutte contre l’occupation, est poussée dans les bras de sa classe dirigeante belliqueuse. Néamoins il est important de mentionner que la lutte de libération nationale du peuple palestinien est loin de se résumer aux attentats-suicide comme le laisse croire trop souvent les médias bourgeois occidentaux. Il y a une lutte populaire importante en Cisjordanie contre le Mur de l’Apartheid, érigé soi-disant pour des raisons de sécurité mais en réalité pour annexer des terres palestiniennes à Israël, avec des manifestations régulières qui sont constamment et violemment réprimées par l’armée israélienne. Les communistes palestiniens du Parti du Peuple palestinien appuyés par les communistes israéliens jouent un rôle important dans ce mouvement de résistance populaire et anticolonialiste qui ne fait pas beaucoup parler de lui dans nos médias monopolisés mais qui est quand même très présent sur le terrain. En 2004 la Cour Internationale de Justice a publié un avis dénonçant le Mur de l’Apartheid que le gouvernement israélien a ignoré et que le gouvernement canadien, alors dirigé par les Libéraux de Paul Martin, a dénoncé pour son soi-disant parti pris contre Israël. La poursuite de la construction de ce Mur, à l’intérieur de la Cisjordanie et non sur la ligne verte qui sépare Israël des territoires palestiniens, nuit terriblement à la vie quotidienne des Palestiniens qui se trouvent bien souvent coupés de leurs terres et de leurs emplois.

Un des enjeux les plus importants pour la lutte de libération nationale palestinienne est la question des ressources en eau de la Cisjordanie, qui sont entièrement contrôlées par Israël au bénéfice des colons et des besoins de l’État israélien. C’est ce qui explique pourquoi l’État sioniste veut garder le contrôle de la vallée du Jourdain après la création d’un État palestinien. L’eau est une des ressources les plus précieuses du Proche-Orient avec le pétrole. Il y a un véritable système d’apartheid qui a été mis en place par le gouvernement israélien concernant l’utilisation de l’eau, par exemple les colons juifs ont le droit de consommer au moins cinq fois plus d’eau que les Palestiniens et ces derniers doivent obtenir l’autorisation des occupants israéliens pour creuser des puits d’eau, ce qui leur est systématiquement refusé. Pendant ce temps-là les colons peuvent arroser à volonté leurs terrains et leurs vergers et remplir leurs piscines alors que les Palestiniens sont condamnés au rationnement le plus strict. Un autre exemple qui démontre la perversité et la rapacité extrêmes du colonialisme israélien.

A l’été 2005 le gouvernement israélien s’est retiré de la Bande de Gaza et a déplacé ses colons qui y étaient installés au cours d’un évènement hautement médiatisé en Occident. Par contre on a peu ou pas mentionné que ce « retrait » avait pour but de renforcer l’occupation de la Cisjordanie en y déménageant un certain nombre de colons originaires de Gaza. De plus la Bande de Gaza est depuis de nombreuses années une véritable prison à ciel ouvert dont les entrées et sorties sont rigoureusement contrôlées par Israël et cette situation n’a pas changé d’un iota depuis le soi-disant retrait israélien de l’été 2005. Les bombardements israéliens ne cessent de se succéder depuis ce temps prenant pour prétexte les tirs de roquettes de certains groupe armés palestiniens et le nombre de civils palestiniens tués lors de ces opérations ne cessent de s’alourdir, dépassant de loin le nombre de civils israéliens tués lors des attentats palestiniens. En 2006 l’élection du Hamas (mouvement de résistance islamique) à la tête de l’Autorité Palestinienne, à cause de la corruption de certains dirigeants du Fatah et de la montée du scepticisme parmi les Palestiniens envers la stratégie de concertation avec Israël et les États-Unis pratiquée jusqu’alors par l’AP, a déclenché un mouvement de boycottage du gouvernement palestinien élu par les pays impérialistes occidentaux. Le gouvernement canadien a été un des premiers à cesser toute aide au peuple palestinien par mesure de représailles. Les Conservateurs de Stephen Harper ont ainsi intensifié le dur virage pro-israélien amorcé sous le règne des Libéraux. Quelle que soit notre opinion du Hamas, de sa stratégie et de son idéologie, il a été démocratiquement élu par les Palestiniens qui sans aucun doute percevaient comme un échec la politique de négociation avec l’occupant israélien et l’impérialisme américain poursuivie par la direction du Fatah. En 2007, le Hamas a pris le contrôle de la Bande de Gaza suite à des affrontements armés avec le Fatah et un blocus inhumain de ce petit bout de territoire a immédiatement été décrété par Israël et ses alliés occidentaux, dont bien sûr l’État impérialiste canadien. Pour la nième fois les souffrances du peuple palestinien ont été amplifiées délibérément par les dirigeants impérialistes dans le but de mettre un terme à son combat pour la liberté et contre l’occupation israélienne.

La solidarité est donc plus que jamais nécessaire avec la lutte de libération nationale du peuple palestinien. Nous devons dénoncer la collusion et la collaboration de nos dirigeants capitalistes avec l’État sioniste. Le soutien aveugle et total que donne le gouvernement conservateur de Stephen Harper à Israël est complètement scandaleux et doit être combattu sans relâche par toute personne éprise de justice, de démocratie et de paix. Il faut appuyer activement les organisations et mouvements palestiniens progressistes et démocratiques dans leur combat pour un État palestinien indépendant et digne de ce nom. En ce moment il y a encore des milliers de prisonniers politiques palestiniens dans les prisons israéliennes, dont le célèbre dirigeant du Fatah Marwan Barghouti qui a été condamné cinq fois à la prison à perpétuité par un tribunal civil israélien. La raison de sa condamnation vient du rôle de premier plan joué par Barghouti dans la résistance palestinienne et aussi de son immense popularité au sein de son peuple. En emprisonnant un tel symbole, l’État sioniste espérait sans aucun doute affaiblir et démoraliser les combattants palestiniens, ce qui n’a heureusement pas réussi. La campagne BDS (Boycott, Désinvestissement et Sanctions) dirigée contre les politiques meurtrières, colonialistes et ségrégationnistes du gouvernement israélien constitue un excellent moyen de soutenir la cause palestinienne. Il faut également être très lucide et critique envers tous les « processus de paix » qui sont tant vantés par les médias bourgeois occidentaux, que ce soit la Feuille de Route de George Bush ou bien le sommet d’Annapolis tenu en décembre 2007, qui finissent toujours par une impasse et qui n’apportent rien de positif aux Palestiniens toujours aussi durement opprimés.

mardi 1 juillet 2008

Samir Amin : le nouveau défi de l’internationalisme des peuples

Entretien
www.humanite.frdimanche 3 février 2008

Samir Amin est membre du Conseil international du Forum social mondial et président du Forum mondial des alternatives (Égypte). Il est auteur de très nombreux ouvrages d’analyse économique et politique et de géopolitique. Il participait samedi dernier à Paris au colloque « Altermondialisme et post-altermondialisme » organisé par l’association Mémoires des luttes et la revue Utopie critique.

***

Comment analysez-vous les développements actuels de la crise économique et financière à l’échelle mondiale ?

Samir Amin. La financiarisation du système libéral, considérée par beaucoup comme une forme nouvelle, durable du capitalisme, n’était à mon avis que le moyen conjoncturel pour le capital de surmonter ses contradictions.

La croissance des revenus du capital et la réduction de ceux du travail ne peuvent être poursuivies indéfiniment. Le versant financier du système était son talon d’Achille.
Les subprimes ne sont pas la cause de la crise, qui est systémique, mais seulement l’accident de parcours qui l’a déclenchée. Après la privatisation des profits, les forces dominantes en place vont s’employer à en socialiser les pertes, c’est-à-dire à les faire payer aux travailleurs, aux retraités et aux pays vulnérables du tiers-monde.

Le capitalisme, comme système historique, est, selon vous, dans une phase de « déclin ». Qu’est-ce qui justifie une telle analyse ?

Samir Amin. Le système capitaliste, comme système historique, a connu une très longue maturation. Au contraire, son apogée, amorcé au plan politique par la Révolution française et au plan économique par la révolution industrielle, s’est concentré sur le XIXe siècle, c’est-à-dire sur une période très courte. La fin de cet apogée est annoncée très tôt, dès 1871, par la Commune de Paris et peu après, en 1917, par la première révolution au nom du socialisme, la révolution russe. Contrairement aux apparences et aux opinions dominantes, le capitalisme est entré, alors, dans une longue période de déclin. Remis en cause au XXe siècle, comme système économique, social et politique par les projets alternatifs (socialistes, communistes), il est également confronté au contraste grandissant qu’il a lui-même produit entre les centres dominants et les périphéries dominées. Ce contraste a alimenté la révolte, le refus des peuples dominés de s’ajuster, d’accepter cette domination et la dégradation des conditions sociales qu’elle engendre.

Comment s’articulent ces deux dimensions - idéologique et géopolitique - de la remise en cause du capitalisme ?

Samir Amin. Elles sont indissociables. Tout simplement parce que le capitalisme réellement existant, comme système mondialisé, est impérialiste par nature. Cette indissociabilité a été formalisée, au siècle dernier, par les révolutions socialistes qui ont pris corps aux périphéries du système capitaliste. Je pense aux révolutions chinoise, vietnamienne et cubaine. Cette association, au XXe siècle, entre les deux dimensions de la remise en cause du capitalisme constitue en quelque sorte une première « vague ». Celle des révolutions au nom du socialisme, des grands mouvements de libération nationale avec des degrés divers de radicalité, du non-alignement, de l’anti-impérialisme. Cette première vague a atteint ses limites historiques assez rapidement. Elle s’est essoufflée. Très rapidement, dans le cas des pays du tiers-monde sortis de la libération nationale. Moins rapidement dans le cas des révolutions au nom du socialisme. Mais le résultat est le même : cette première vague s’est émoussée, puis exténuée.

Vous estimez néanmoins qu’une seconde « vague » de remise en question d’ensemble du système mondialisé peut prendre naissance. Mais comment ?

Samir Amin. Entre la vague qui s’est épuisée et la nouvelle vague, possible et nécessaire, du XXIe siècle, il y a un creux. Dans ce creux, les rapports de force sociaux, politiques, sont inégaux. Tellement inégaux qu’ils permettent une contre-offensive du capital, renforcée par les illusions de la fin de l’histoire, de l’effacement totale de la première vague.

Ce qui permet au néolibéralisme de construire un discours réactionnaire, et non pas « libéral », comme il se prétend. C’est un discours de retour au XIXe siècle, sur le modèle du discours de la Restauration, qui illustrait, en France, l’aspiration à un retour avant la Révolution. Sarkozy est la parfaite illustration de ce discours réactionnaire. Ce qu’il appelle « réformes » désigne en réalité des contre-réformes visant l’abolition de tout ce que les travailleurs ont conquis au cours du XXe siècle.

Nous sommes dans ce creux. Mais nous voyons déjà se dessiner sur l’océan les premières rides de ce qui peut devenir la nouvelle vague. On peut les voir, par exemple, dans ce que j’appelle les avancées révolutionnaires de l’Amérique latine. Le processus que connaît ce sous-continent est caractéristique. Il est à la fois anti-impérialiste (particulièrement anti-yankee, puisque c’est l’impérialisme nord-américain qui domine brutalement cette région du monde) et à aspiration socialiste. Cette aspiration est formulée de façons diverses, parfois vagues, parfois plus précises, voire dogmatiques. Mais il est intéressant de constater qu’anti-impérialisme et aspiration socialiste sont, là encore, indissociables.

Vous évoquez des « avancées révolutionnaires » en Amérique latine. Qu’entendez-vous exactement par là ? Quelle différence faites-vous avec la révolution ?

Samir Amin. Je crois qu’il faut voir ce long déclin du capitalisme comme pouvant devenir une longue transition vers le socialisme mondial. « Longue » signifiant ici qu’un tel processus historique pourrait prendre plusieurs siècles, cette transition impliquant des vagues successives. La tradition communiste a pensé la révolution et la construction du socialisme comme des possibilités relativement rapides, dans un temps historique court, sur des années ou des décennies. Je préfère, aujourd’hui, parler d’avancées révolutionnaires plutôt que de révolution. « Révolution » inspire l’idée, fausse, que tous les problèmes pourraient être réglés du jour au lendemain. Des « avancées révolutionnaires » correspondent, à mes yeux, aux amorces de mise en place d’autres logiques que celles du capitalisme. Elles peuvent, à leur tour, préparer d’autres avancées, des « vagues » ultérieures. Mais il n’y a pas, en la matière, de déterminisme historique. Il y a des nécessités objectives, au sens hégélien du terme, mais pas de déterminisme absolu. Si cette transition vers le socialisme ne devait pas s’opérer, le scénario serait celui d’une longue transition vers toujours davantage de barbarie. Les deux possibilités coexistent.

Ce creux de la vague est propice, dites-vous, au développement de toutes sortes d’« illusions » sur le capitalisme. Qu’est-ce à dire ?

Samir Amin. « Le vieux monde se meurt. Le nouveau monde tarde à paraître. Et dans ce clair-obscur les monstres surgissent », écrivait Antonio Gramsci. Cette phrase m’a toujours frappé par sa justesse et sa puissance. On peut dire que l’ancien monde, celui de la première vague de remise en cause du capitalisme, est mort. La seconde vague est en train de naître. Dans ce clair-obscur, les « monstres » prennent la forme de personnages comme Bush, Sarkozy, Berlusconi, d’un côté, comme Ben Laden et ses complices de l’autre. Mais ce clair-obscur est aussi un moment de grandes illusions, que l’on peut classer en trois familles. Elles se répartissent dans le monde en des lieux différents, l’une ou l’autre est dominante selon les régions, mais elles existent et coexistent partout.

Appelons la première l’illusion « sociale-démocrate ». C’est l’illusion d’un capitalisme à visage humain. Elle a pu se traduire dans un projet politique à certains moments de l’histoire du capitalisme, quand le rapport de forces était plus favorable aux classes populaires. Je ne dénigre pas du tout ce qu’ont réalisé les régimes du « welfare state » après la Seconde Guerre mondiale. Mais ces réalisations n’auraient pu voir le jour sans la « menace communiste » qui hantait alors la bourgeoisie. Cette menace était incarnée, aux yeux des dominants, par l’URSS. En réalité, la menace n’était pas tant celle du communisme ou de l’URSS que la menace que représentaient pour eux leurs propres peuples.

Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, les retraites par répartition, les régimes spéciaux ou la Sécurité sociale auraient été impensables sans la puissance, dans le cas français, du Parti communiste. C’est vrai un peu partout dans le monde, sous des formes différentes. Ce capitalisme à visage humain n’est donc envisageable que dans les périodes d’affaiblissement du capital.

En revanche, lorsque la domination du capital est assise, forte, il n’a pas du tout de visage humain. Il prend son visage réel, un visage tout à fait sauvage. Nous sommes dans un moment de ce genre. Dès lors, croire, aujourd’hui, dans la possibilité d’un mouvement vers un capitalisme à visage humain relève de l’illusion. Une illusion grave et dangereuse, dans la mesure où elle désarme les classes populaires en leur faisant miroiter la possibilité d’avancées sans luttes, sans renversement des rapports de forces en leur faveur. Cette famille d’illusions est dominante en Europe occidentale.

Dans les pays dits émergents, ce sont les illusions nationalistes qui dominent. Ce type d’illusions consiste à considérer que des pays comme la Chine, l’Inde, le Brésil, assez forts, désormais, pour entrer dans le système capitaliste mondial, peuvent s’imposer comme des partenaires à égalité avec les anciennes puissances. Ces illusions sont nourries par une abondante littérature sur la crainte de « l’hégémonisme chinois montant », presque une variante de la peur du « péril jaune ». À cette littérature en répond une autre, nationaliste celle-là, faisant l’éloge des évolutions en Chine et ailleurs.

En réalité, les rapports de forces internationaux, la domination du capital financier, de l’impérialisme collectif des États-Unis, de l’Europe et du Japon ne permettra pas à ces pays de jouer à égalité, sur la scène mondiale, avec les vieilles puissances. Le langage de plus en plus agressif vis-à-vis de la Chine en témoigne. Ce langage trouve déjà sa traduction, dans le réel, avec des agressions brutales visant des pays faibles, comme l’Irak. D’autres pays, moins faibles, mais qui sont néanmoins des puissances moyennes, comme l’Iran, sont à leur tour menacés. Derrière ces agressions se profile, en réalité, la volonté des États-Unis d’envisager jusqu’à une guerre contre la Chine si celle-ci devenait trop menaçante pour leurs intérêts. Dans un tel contexte, croire que les pays émergents pourront s’imposer dans le système pour rompre avec la logique capitaliste est une illusion.

La troisième série d’illusions, la pire, recouvre les passéismes. Ces illusions-là frappent les peuples défaits dans l’histoire. C’est le cas des pays arabes, et, plus largement, des pays islamiques, mais aussi de l’Afrique subsaharienne, tentés par la recherche de solutions dans les « racines », dans la reconstruction aberrante d’un passé mythique qui n’a jamais existé. Ces passéismes se déguisent facilement. La religion, l’adhésion à la religion s’y prêtent, de même que la revendication de racines « ethniques » ou « tribales ». Ces illusions se fondent sur une pseudo-authenticité fabriquée, qui n’a rien à voir avec la réalité. Nous sommes dans un moment où ces trois illusions travaillent des sociétés différentes.

Vous proposez, dans votre dernier livre Pour la Cinquième Internationale, de favoriser la cristallisation de la deuxième vague critique du capitalisme. De quelle manière ?

Samir Amin. Le moment de démoralisation des forces populaires, des ralliements aux idées selon lesquelles le « socialisme était définitivement vaincu » et le capitalisme était devenu « la fin de l’histoire » ont cédé la place, dès la fin des années quatre-vingt-dix, à l’appel au combat pour un autre monde, meilleur. Les forums sociaux altermondialistes ont été l’un des lieux donnant une visibilité aux luttes. Mais il reste beaucoup de chemin à parcourir pour que la convergence de ces luttes se cristallise dans des stratégies cohérentes et efficaces, capables de mettre en déroute les projets de contrôle militaire de la planète par les États-Unis et leurs alliés, d’ouvrir des voies nouvelles au socialisme du XXIe siècle, un socialisme plus authentiquement démocratique que celui de la vague du XXe siècle. Associer le combat démocratique au progrès social, reconstruire sur cette base l’internationalisme des peuples face au cosmopolitisme du capital, tel est le défi auquel la gauche est confrontée dans le monde entier.

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Entretien réalisé par Rosa Moussaoui